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qui, le voyant sans armes, l’avait menacé, le sabre à la main, et lui avait fait affront à l’issue de la messe, en présence de tous les habitans qui sortaient de l’église. Ce soldat poursuivait et insultait, depuis long-tems, le sieur Des Ifs père, qui, disait-il, l’avait dénoncé aux moines du Bec, comme ayant tué leurs pigeons et leurs volailles. A la vue d’un vieillard, d’un père en pleurs et qui venait d’être lâchement outragé, le jeune Des Ifs avait été si violemment ému, que le sang lui avait coulé abondamment par le nez et par la bouche. Transporté de colère, il s’était saisi d’un couteau de chasse, et avait couru chez Martel. Ce dernier avait voulu lui fermer sa porte ; mais Des Ifs, plus prompt que l’éclair, était entré, s’était jeté sur lui, et lui avait porté un coup de son couteau de chasse, dont il était mort peu de jours après. Le jeune Des Ifs, obligé de fuir le pays, avait pris du service dans les cuirassiers du roi, et s’était acquis, par sa bonne conduite, l’estime de tous les officiers supérieurs de ce corps ; on voulut même l’élever au grade d’officier ; mais, pour cela, il fallait qu’il ne fût plus sous le poids de la procédure criminelle qui avait été dirigée contre lui, à raison du meurtre de Martel. Il vint donc à Rouen, en 1780, c’est-à-dire vingt ans après ce meurtre, solliciter la fierte, appuyé de la recommandation de Louis-Philippe-Joseph D’Orléans, duc de Chartres, père