Page:Amable Floquet - Anecdotes normandes, deuxieme edition, Cagniard, 1883.djvu/286

Cette page a été validée par deux contributeurs.

il faut bien le dire, quelques magistrats, zélateurs endurcis de la coutume, essayaient de défendre les dispositions si claires et si répétées de la loi normande. Car, pour tous presque, en Normandie, la coutume était chose inviolable et sainte, et s’y attaquer était commettre un inexpiable sacrilège. « Après qu’une clause aura été biffée (disaient ces apologistes du statut normand), quel pouvoir, ensuite, sauvera les autres ? ». C’était, à leur sens, mettre tout en péril. « Il faut (disaient-ils) laisser le moustier où il est. » L’humanité, toutefois, la raison, la justice durent, à la fin, prévaloir. Les fortes paroles que l’avocat du roi Laurent Bigot venait de faire entendre à l’audience, avaient affermi les sages, décidé les timides, ébranlé les opiniâtres, et donné bon espoir à Brétignières ; sa confiance ne devait pas être déçue. Un grand bruit s’étant fait entendre, MM. du Parlement revinrent bientôt dans la grand’chambre du plaidoyer ; mais tous, cette fois, en robe rouge, et les présidents avec leurs amples manteaux d’écarlate, fourrés d’hermine. Car c’était avec cette solennité qu’avaient toujours été prononcés les grands arrêts, les arrêts généraux destinés à devenir la loi du pays. Or, c’était (dit La Roche Flavyn), « un des plus célèbres et pompeux actes de la cour. » Il se fit un profond silence ; et, au ton ferme et pénétré dont parla le premier président