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si mal à propos aujourd’hui. Un jour, dans les rangs de ces hordes sauvages, avait couru le bruit, de proche en proche, que, désormais, pour l’expiation d’un crime, il ne suffirait plus du supplice de son auteur, que le châtiment survivrait au condamné, que les enfants, en un mot, seraient à jamais punis du crime de leur père. En entendant promulguer cette loi nouvelle, les barbares avaient frémi ; puis, comme elle avait été appliquée bientôt, sans merci, aux premiers d’entr’eux qui avaient volé, qui avaient tué, qui avaient brûlé, voyant ensuite les enfants de ces condamnés, errer nus et pauvres, les fiers Normands, pris enfin de peur, avaient regardé leurs enfants et tremblé pour ces innocentes créatures ; puis, d’année en année, on avait vu moins de vols, d’incendies, d’assassinats ; ils s’étaient détournés de mal faire, voyant leurs enfants en porter infailliblement la peine ; tant il est vrai que le père souffre plus au mal de ses enfants qu’au sien propre ! Ainsi, continuait-il, ainsi sans doute l’avaient pensé les Romains. Car, dans une de leurs lois, parlant de ces violences insurmontables qui vicient et rendent nulle l’obligation qu’elles ont extorquée, ils mettaient au premier rang celles exercées sur un enfant pour contraindre ses parents et leur arracher une promesse ; un père (disaient-ils), un père craignant toujours plus, pour ses enfants que pour lui-même.