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PLANTES CULTIVÉES POUR LEURS GRAINES

ou deux. Quoi qu’il en soit, la distinction établie par Pison entre ces deux graines souterraines, l’une brésilienne, l’autre d’Afrique, tend à faire penser que l’Arachis est du Brésil.

« L’ancienneté et la généralité de sa culture en Afrique est cependant un argument de quelque force, qui compense jusqu’à un certain point l’ancienneté au Brésil et la présence de six autres Arachis dans ce seul pays. Je lui donnerais beaucoup de valeur si l’Arachis avait été connue des anciens Égyptiens et des Arabes ; mais le silence des auteurs grecs, latins et arabes, comme l’absence de l’espèce en Égypte du temps de Forskal, me font penser que sa culture en Guinée, au Sénégal[1] et sur la côte orientale d’Afrique[2] ne remonte pas à une date fort ancienne. Elle n’a pas non plus des caractères d’antiquité bien grande en Asie. En effet, on ne lui connaît aucun nom sanscrit[3], mais seulement un nom hindustani. D’après Rumphius[4], elle aurait été importée du Japon dans plusieurs des îles de l’archipel indien. Elle n’aurait eu alors que des noms étrangers, comme, par exemple, le nom chinois qui signifie seulement fève de terre. A la fin du siècle dernier, elle était cultivée généralement en Chine et en Cochinchine. Cependant malgré cette idée de Rumphius d’une introduction dans les îles par le Japon ou la Chine, je vois que Thunberg n’en parle pas dans sa Flore japonaise. Or le Japon a eu depuis seize siècles des rapports avec la Chine, et les plantes cultivées originaires de l’un des deux pays ont ordinairement passé de bonne heure dans l’autre. Elle n’est pas indiquée par Forster parmi les plantes usitées dans les petites îles de la mer Pacifique. L’ensemble de ces données fait présumer l’origine américaine, j’ajouterai même brésilienne.

« Aucun des auteurs que j’ai consultés ne dit avoir vu la plante spontanée, soit dans l’ancien, soit dans le nouveau monde. Ceux qui parlent de l’Afrique ou de l’Asie ont soin de dire que la plante y est cultivée. Marcgraf ne le dit pas pour le Brésil ; mais Pison indique l’espèce comme semée. »

Des graines d’Arachide ont été trouvées dans les tombeaux péruviens d’Ancon[5], ce qui fait présumer quelque ancienneté d’existence en Amérique et appuie mon opinion de 1855.

L’étude des livres chinois par le Dr Bretschneider[6] renverse l’hypothèse de Brown. L’Arachide n’est pas mentionnée dans les anciens ouvrages de ce pays, même dans le Pent-Sao, publié au XVIe siècle. Il ajoute qu’il croit l’introduction seulement du siècle dernier.

  1. Guillemin et Perrottet, Fl. seneg.
  2. Loureiro, Fl. cochinch.
  3. Roxburgh, FL ind., 3, p. 280 ; Piddington, Index.
  4. Rumphius, Herb. amb., 5, p. 426 et 427.
  5. Rochebrune, d’après l’extrait contenu dans Botanisches Centralblatt, 1880, p. 1634. Pour la date, voyez ci-dessus, p. 273.
  6. Bretschneider, On the study and value of chinese bot. works, p. 18.