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L’AVIATEUR INCONNU

travers l’azur, c’est un mari qui ne m’inspire pas beaucoup de confiance… Il est trop dans les nuages !

L’aviateur inconnu fut-il instruit de ces commentaires et voulut-il prouver sa constance ? C’était à croire qu’un démon familier le poussait à surgir au moment le plus opportun. Douze heures après cette conversation, il faisait de nouveau parler de lui.

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Conformément au rite établi par lui-même, l’Aviateur signala son approche au déclin de la nuit, lorsque les premières clartés de l’aube commençaient de rosir l’orient. Le vrombissement de son moteur grandit avec une rapidité telle que lorsque, çà et là, les persiennes s’entr’ouvrirent, l’avion était déjà au-dessus de la bourgade. Elvire, à tra­vers son sommeil, entendit avant tout le monde le tumulte aérien. Mais, au lieu de bondir à la fenêtre ainsi qu’elle l’avait fait jusque-là, elle frappa violemment à la cloison pour avertir Flossie dont la chambre était contiguë à la sienne. En même temps, elle criait à tue-tête : « Le voilà, Flossie, voilà l’Aviateur inconnu, mets-toi au balcon ! »

La jeune Britannique ne sauta pas hors des draps comme l’eût fait une impulsive Française ; réveillée par le tin­tamarre provoqué par sa nièce, elle demeura un moment recueillie, puis tendit l’oreille et enfin consentit à pousser ses contrevents. À sa gauche, Elvire, les yeux fouillant le ciel, lui dit :

— Voilà la cérémonie qui recommence ! C’est ainsi qu’il opère chaque fois… Il s’avance jusqu’à la mer, rebrousse chemin en décrivant un grand cercle, puis s’en retourne et on ne l’entend plus.

— En tout cas, on l’entend fort en ce moment, constata Flossie. Il a un moteur très puissant, cet avion. Est-ce que tu te connais en avions, Elvire ?

— Du tout, répondit la jeune fille, et je confesse que ça ne m’intéresse guère !

— Moi, ça m’intéresse ! Je ne suis pas encore venue en France par la voie de l’air, mais j’ai exécuté quelques vols assez importants autour de Londres… Oui, continua-t-elle, en suivant du regard l’aéroplane, qui, maintenant, piquait vers la rade, oui, c’est un appareil de vitesse, taillé pour la course. Tiens ! le voilà qui tourne…

— Oui ! fit Mlle Bergemont, toujours son manège