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L’AVIATEUR INCONNU

yeux de votre père, je vaux bien un as de l’aviation, quoique n’ayant jamais accompli le moindre vol !

— Bon, bon, nous examinerons plus tard quels argu­ments il y aura lieu de lui opposer. Restons-en à notre convention pour le moment ; dès demain, je causerai avec mon oncle, c’est dit, et, comme il se fait tard, Jean-Louis, je me sauve !

— Déjà ! Oh ! encore cinq minutes !

— Savez-vous qu’il est onze heures passées !

— Encore cinq petites minutes !

— Je connais ça ! Je vais rester cinq petites minutes et il sera minuit et demi !

— Le temps passe vite quand on est nous deux !

— Mais bien lentement quand vous êtes loin de moi, Jean-Louis !

Il répondit :

— On devrait bien nous marier tout de suite… Si l’on tarde trop, nous aurons à peine le temps de nous aperce­voir de notre bonheur !

Pour toute réponse, Elvire se rapprocha de la grille… et la nuit n’entendit plus qu’un murmure indistinct. Il fallut que les douze coups de minuit retentissent à l’horloge de l’antichambre, toute proche, pour rappeler la jeune fille aux exigences de la réalité. Vite elle traversa le jardin, ouvrit sans bruit et, bientôt, se trouva dans sa chambre. Elle s’endormit à l’instant, mais son sommeil fut traversé de rêves insensés, dans lesquels Jean-Louis Vernal se promenait à travers les nuages tout en peignant avec sérénité le portrait de l’oncle Tristan.

Le lendemain, comme elle s’y était engagée auprès de son fiancé — car il était son fiancé, il faudrait bien en convenir officiellement un jour ou l’autre — elle prétexta le désir, après le déjeuner, de choisir un livre dans la bibliothèque de M. Bergemont aîné, bien sûre d’obtenir, par ce moyen, un tête-à-tête, car le vieux garçon ne pouvait supporter que ses bouquins fussent touchés par autrui. Il pria donc Elvire de l’accompagner et, lorsqu’ils furent dans la pièce réservée aux livres, il lui demanda quelle sorte d’ouvrage elle voulait.

— N’êtes-vous pas d’avis, mon oncle, dit-elle en sou­riant, que j’aurais intérêt à compulser l’histoire de l’aviation depuis ses origines jusqu’à nos jours, puisque,