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plus. Il y a dans tout cela une facilité de relations qui rappelle les amours philosophiques du siècle dernier, moins ce qui les gâtait, la galanterie libertine. Ce tableau d’intérieur des beaux esprits de la première moitié de notre siècle est très-piquant, très-curieux, très-instructif ; c’est comme le bouillonnement romantique avant sa systématisation de 1830, c’est l’admiration pour Napoléon Ier, Chateaubriand, madame de Staël ; madame de Saman ne nomme jamais Corinne, mais cet idéal l’enlève, la conduit en Italie et décide certainement de sa longue prédilection pour un délicieux Oswald qu’elle quitte sans cesse avec joie et retrouve avec ivresse. Disons en passant que jamais homme n’a été dépeint avec plus d’amour et de charme, et que la vie d’un enchanteur de femmes est remplie quand il a pu inspirer de ses perfections et de ses imperfections un portrait si magistralement exécuté.

Cette fermentation romantique dont je parle est toute une phase d’histoire littéraire très-intéressante à étudier, madame de Saman en est un spécimen et y jette une vive lumière. On était romantique sans le dire, sans le savoir, sans cesser d’être classique par beaucoup d’endroits. C’est Victor Hugo et son école qui ont opéré la scission et tranché les genres, et je considère cette révolution comme un malheur. Nous lui devons, il est vrai, l’éclat d’une pléiade splendide autour d’une gloire immortelle, et je pardonne au débordement de mauvais goût, de pas-