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nelle ; l’actrice se planta devant le trou du souffleur, puis l’air adorablement bébête, elle défila son rondeau, d’une voix aigrelette, sans un trait, sans un geste, sans une intention — comme une boîte à musique bien organisée. Le rondeau fini, Cora salua d’un air timide, souriante, remontant la scène à reculons, pour rejoindre le compère qui l’attendait dans le fond.

Le public, bon enfant, la trouvait drôle. Des loges, on voyait des messieurs battre des mains avec ostentation. De l’orchestre, on lui cria bis ! Le compère, tout gaillard, tout épanoui, lui prit la main, et, malgré ses protestations, la reconduisit à l’avant-scène. Les gens du poulailler crièrent : Chut ! à ceux de l’orchestre pour faire taire les bis afin qu’on pût écouter. On obtint du silence. Alors le compère dit :

— Allons, Cora… perle-nous encore ton petit air, puisque ces messieurs te le demandent.

Il n’était plus jeune, ce calembour-là, mais c’était une maladie chez le compère. Jamais il ne ratait une occasion de le placer.

Cora attaqua une seconde fois son dernier couplet :

Voulez-vous voir mon grand ressort ?

tandis que le public, de plus en plus joyeux, trépignait. Tout en chantant, l’actrice se tourna du

côté de la loge de Valterre et de Taïko et les regarda avec attention. Le Japonais la tenait au