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des pages et des pages, relatant les misères de sa vie, demandant un amour sans partage en échange du sacrifice complet de son existence. Puis elle la jeta à la poste, sans vouloir réfléchir, heureuse de faire l’abandon d’elle-même. Fidé, fou de joie, parvint à lui remettre un billet qui disait tous ses rêves, toutes ses tentatives pour la voir. Elle fut délicieusement charmée. Pendant quelque temps, ils échangèrent ainsi leurs plus intimes pensées, attendant avec impatience des lettres pleines de riens charmants, de menus détails qui les intéressaient parce qu’ils se rapportaient à leur commune affection. Ils se racontaient heure par heure leur existence, leurs méditations, toujours dirigées vers le même but. Et c’était chaque fois des étonnements nouveaux, des ravissements, du bonheur pour plusieurs jours.

Solange qui pouvait difficilement s’isoler avec ses chères pensées, s’était décidée à confier son amour à la bonne Kartynn. La vieille demoiselle, épouvantée d’abord, par affection pour la jeune fille s’était sacrifiée, ayant conscience de ses torts et de la colère de Mme de Maubourg, lorsqu’elle apprendrait sa complicité. La pauvre déshéritée avait trop souffert de ses belles années perdues, desséchées, pareilles à des fleurs fanées, pour n’être pas miséricordieuse aux amoureux. Elle trouvait un amer plaisir dans le