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— Voilà qui est neuf, voilà qui est émouvant, voilà qui est humain… Pour sûr, le monsieur qui a trouvé ça aura au moins une mention… Ça le consolera de l’indifférence du public.

Du reste, reprit le journaliste, s’animant au son de sa voix, il est très curieux, le public. Voulez-vous savoir ce qui l’attire : Regardez, là, au milieu, à droite. C’est mièvre, c’est sucre candi, c’est un buste… mais c’est la tête d’une femme-peintre et c’est une comédienne célèbre qui l’a faite… Presque un phénomène… Aussi regardez la foule, bouche ouverte. Du reste, c’est ainsi que s’établissent les réputations. Dans un concert, l’artiste le plus acclamé est celui qui imite la clarinette avec un violon. On s’extasie devant le comédien qui fait de la peinture. Notre époque est une foire : on va dans les baraques admirer les phénomènes…

Il s’arrêta un instant, souriant de son propre emballement et il ajouta :

— Tiens, c’est très beau, ce que je vous dis là. J’en ferai une chronique demain.

— Mais, reprit-il, au bout d’un instant de silence, il y a quelque chose qu’on admire plus que l’œuvre — qui est plus phénoménal encore, — c’est l’auteur. — Tenez, voilà Dinah Samuel, la comédienne-peintre-sculpteur-aréonaute. Voyez comme on l’entoure. On fait la haie sur son passage. Elle s’avance au milieu d’une cour d’artistes dont le plus mauvais lui donnerait aisément des leçons.