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    1. MAHOMÉTISME##


MAHOMÉTISME, CHIISME OUTRÉ

HiO’i

Nous savons pourquoi le salut est dans l’obéissance à l’imam : c’est l’affranchissement définitif du corps, l’obtention du nirvana et il n’y avait pas, dans la doctrine, d’autre paradis. Peut-être cependant via-à- vis

des initiés des premiers degrés recourrait-on à des moyens plus brutaux. Le fait certain, c’est que le grand-maître des Assassins, celui que les Croisés appelèrent le Vieux de la Montagne, obtenait de ses adhérents une obéissance aveugle, et sur un signe de lui le fidâwî se précipitait au bas de la forteresse.

Hasan et ses successeurs immédiats ne se présentaient pas comme imâms, mais comme mandataires de l’imâm toujours vivant, Nizàr, auquel ils donnaient le titre fàtimide d’al Moustafâ lidîn Allah « l'élu pour la religion de Dieu ». Mais le quatrième grand maître d’Alamoût, Hasan II, se déclara lui-même imâm, c’est-à-dire incarnation de la Divinité. Il alléguait une prétendue descendance de Nizàr comme le premier inahdi fàtimide à l'égard de Mouhammad ibn Isma’il.

Nous ne continuerons pas cette histoire de l’ordre des Assassins. Nous nous contenterons de dire que la dynastie fut détruite par le sultan mongol Houlagou 655 = 1257) et que la petite dynastie secondaire de Syrie le fut par le sultan d’Egypte, Beïbars (671 = 1 273). Quelques sectaires semblent avoir survécu en Syrie. On en signale de nos jours encore en Perse et aux Indes, qui vénèrent comme leur imâm Hasan II. Ils représentent, avec les Druzes, les derniers débris de risma’ilisme.

La secte des douze imâms.

Nous allons étudier

maintenant la dernière grande secte mahdiste, celle des douze imâms qui, ne reconnaissant pas l’imamat d’Isma’il, s’attacha à un autre fils du sixième imâm Dja’far, Moûsâ, qui devint ainsi le septième. Une secte secondaire appelée Moùsawite, Mamtoûrite ou Wâkifite, refusa, à sa mort, de lui reconnaître un successeur et attendit son retour ; elle ne paraît pas s'être maintenue. Le huitième imâm fut son fds 'Alî surnommé ar Rida, le malheureux choisi par al Ma’raoùn, le khalife "abbàsside, pour héritier présomptif et empoisonné par son ordre ; après lui vinrent successivement Mouhammad, 'Alî, Hasan et enfin Mouhammad douzième et dernier. A chacun de ces imâms se rattache, semble-t-il, une secte secondaire de Wàkifites, c’est-à-dire « maintenant » l’imamat en sa personne avec application de la théorie mahdiste, absence et retour ; mais une seule a survécu, celle qui s’applique au douzième reconnu le vrai et seul Mahdî. Aucune secte n’a prolongé la série. Donc, avec lui finit ou plutôt se cristallise le madhisme. Il est le « Fàtimide attendu » vraiment descendant de Fàtima et vraiment attendu depuis l’année de sa disparition (265 = 878). En 1502 de notre ère, les Safawides, descendants du septième imâm Moûsâ, introduisirent en Perse cette croyance, où elle est restée comme religion d'État. Nous en reparlerons quand, ayant achevé l’histoire du mahométisme, nous l'étudierons dans sa forme actuelle.

Les Mahdismes secondaires.

En dehors des

cinq grandes sectes mahdistes que nous venons de décrire, avec leur cortège de sectes secondaires dérivées et aberrantes, il y a eu un certain nombre de mahdismes excentriques, dont quelques-uns ont joué un rôle historique.

Le premier est le soufyânisme qui, tout en restant dans la tribu de Mahomet, s’oppose à la branche hâchimide et prétend établir le mahdisme dans la famille oumayyade. Un fils de Yazîd, le second khalife de cette famille, nommé Khâlid aurait, dit-on, altéré les hadîlhs attribuant à un descendant de 'Alî le caractère de Mahdî et déclaré que ce rôle appartiendrait à un descendant d’Aboû Soufyân, le grandpère de Yazîd. Un petit-fils de Yazîd, Aboû 'Abd

Allah qui tint tête a as Sallah T’abbâsside, mais fut vaincu et mis à mort, lut un moment considéré comme le Soufyânide attendu. En 195 (810), peut-être en relation avec la fameuse conjonction astronomique île 191, eut lieu la sédition d’un autre descendant de Khâlid, qui fut à nouveau considéré comme le Soufyânide : il échoua de même. D’autre part, les Oumayyades d’Espagne entretinrent ces espérances. Mais ce ne furent que des tentatives sporadiques.

Il convient de remarquer que certains partisans de cette famille prétendirent que les khalifes syriens avaient porté des titres semblables à ceux des imâms 'abbâssides et fâtimides et que l’un d’eux Souleïmân avait porté le titre d’al Mahdî. Enfin, le successeur de ce dernier, 'Oumar II, fils de 'Abd al' Azîz, révéré par tous les musulmans, même les plus hostiles aux Oumayyades, est représenté dans beaucoup de récils comme ayant été le Mahdî. Comme aucune doctrine particulière ne se rattache à cette forme du mahdisme. plus dynastique que religieuse, nous ne nous y arrêterons pas.

Nous ne ferons aussi que mentionner les croyances de certains Yéménites qui, ne pouvant supporter la domination que s’arrogeaient sur tous les Arabes les tribus descendues d’Abraham, proclamaient que les descendants de Kahtân (identifié avec le Yoctân de la Bible) reprendraient la suprématie à la fin du monde sous la bannière du Kahtànide. C’est encore une conception purement nationaliste, si l’on peut employer cette expression moderne ; elle n’a qu’un lien très lâche avec le mahométisme.

A ces Mahdîs nationalistes se rattache le berbère Sàlih dont la doctrine fut suivie pendant plusieurs siècles par la tribu des Berghouata, branche de la grande famille des Masmouda. En l’an 127 de l’hégire (745), il se proclama prophète et prêcha un nouveau Coran de sa composition. Il se considérait comme celui qui est désigné dans le Coran de Mahomet (lxvi, 6) sous le nom de : Sâlih al Mou’minîn. Après 47 ans de règne, il partit pour l’Orient déclarant à ses sectateurs qu’il reviendrait parmi eux au temps de leur septième roi. Il déclara qu’il était le Mahdî annoncé pour la fin du monde, qu’il combattrait l’Antéchrist, que JésusChrist lui-même serait de ses disciples, etc. Bekri qui nous apprend ces détails, nous renseigne aussi sur cette religion particulière qui, dans ses pratiques, prenait systématiquement, le contre-pied de l’islam mais ne paraît pas énoncer sur Dieu et les prophètes de vues originales. Ils donnaient à Dieu le nom de Yakoûch, qui n’est pas berbère et où on a voulu voir le Yacchos des Grecs ; leur jour férié était le jeudi ; ils s’interdisaient de manger des poules et des œufs, etc. Cette petite principauté indépendante défia ainsi l’islam jusqu’en 420 (1029), époque où elle fut détruite et englobée dans les États musulmans.

C’est dans cette même famille berbère des Masmouda qu’un peu plus tard s'éleva un autre Mahdî qui fonda une dynastie célèbre destinée à jouer un rôle historique presque aussi important que celle des Fâtimides et menaça un moment très gravement la chrétienté d’Occident. Il mérite d’attirer notre. attention.

C’est vers 514 de l’hégire (1120) que parut l’imâm des Masmouda, le savant Mouhammad ibn Tournait fondateur de la secte des Unitaires (Al Mouwahhidoùn, d’où l’on a fait Almohades). Né dans cette peuplade berbère, il était allé de bonne heure s’instruire dans les écoles d’Orient. Aux chiites il emprunta la doctrine de l’imâm ma’soûm « infaillible » et la croyance au Mahdî ; aux sommités il emprunta la doctrine rationaliste d’al Ach’arî que le célèbre Ghazâlî apappuyait de tout son génie. Même, on rapporte que celui-ci avait lu dans le dja’fr. le fameux livre des