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MAGIE, II M’I'.'i ; rS AVEI LA R I l IGION

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confier au suffrage de l’humanité h solo de décide) quelle est la vérité religieuse, ce <im l’emporterait à une Immense majorité, ce serait la fol aux esprits de la nature, aux fantômes des morts, aux Interveo tions arbitraires île la puissance surhumaine, à l'éludes pratiques magiques. Revue d’hist. des reltg., t. i i, p. 10. Le principal défenseur <lu tnagisme pur r. Le volumineux travail çu’il a publie dus ce titre : The golden Bough ou Rameau d’or, est une vaste compilation où l’auteur a amassé quantité

ts qui justifient, croit-il, ses mus sur l'évolution de la religion et de la société primitive. La magie proprement dite remplit deux forts volumes : Magie art. 3* eilit.. 1911. L’idée fondamentale de Fraser

que les superstitions magiques sont a l’origine de

toutes les religions : Dans l'évolution île la pensée.

comme présentant un stade Inférieur, u

louvr stnitiim. d’intelligence, a probablement partout

précédé la religion, i.u.w.v.t.i.p. w. Malheureusement

pour sa thèse, l’auteur ramène à la magie une foule de

pratiques qui n’en sont pas. au moins neeessairement :

remèdes empiriques. Influences des étoiles, de la lune, « lu soleil. îles marées sur les événements humains, sur stfo.ee humaine, culte superstitieux du vrai Dieu. Hit-n plus, il donne de la magk une définition déjà matique, en la présentant comme « un système bâtard des lois de la nature… une fausse science et un art avorté. T. i. p. 53. D’un mot : la magie serait une science mal faite. Pareille définition, nous l’avons remarqué dans la 1° partie, tombe a taux Cf. col. 1514.

En partant d’une telle définition, Fraser conclut a une opposition entre magie et religion. Mais antérieurement a cette opposition, qui suppose l’existence de deux termes, l’auteur croit découvrir une période d’Indifférenciation : et. antérieurement encore, une période de magie pure P. 226-23 l. Ainsi, pour Fra/er, l’ordre de succession et de causalité serait le suivant : magie pure, magie animiste, religion. D’ailleurs, l’auteur ne craint pas d’affirmer eu général que les foules s'élèvent difficilement jusqu'à la vraie religion. T. i. p. 240. Ce serait toujours, dans l’Europe moderne, la même confusion d’idées, le même mélange de religion et de magie : et il paraîtrait qu’en France spécialement la majorité des paysans attribuent au prêtre un pouvoir secret et irrésistible sur les éléments ». T. I, p. 231.

Outrageante exagération. L’auteur semble confondre a plaisir deux états totalement disparates : celui qu’il appelle magie animiste, dans lequel religion et e seraient encore indistinctes, parce que la religion ne serait pas encore formée, et celui où la religion formée est entachée de quelque superstition. Or. dans il faut l’avouer, la superstition n’est pas rare ; mais, en général, elle voisine avec la religion l’altérer profondément. Ajoutons que toute snperstition n' « st pas magie : dans les campagnes chrétiennes la superstition est souvent religion mal éclairée, culte superflu ou vicieux du vrai Dieu ou nnts. Cela n’est pas de la magie.

Frazcr qui perce d’un regard si sur les profondeurs du passé, qui ne se laisse pas tromper sur la vraie nature du présent, n’hésite pas à se transformer en devin pour nous dévoiler les secrets de l’avenir.

l'âge de la religion, nous dit-il, en substance, succédera l'âge de la science : ce sera donc, puisque la magie n’est pas autre chose qu’une science mal faite. un retour, non pas a la magie, mais à l’esprit de la le. Science mil faite. Science bien faite, réunies par un pont fragile et éphémère qui s appelle la religion, telle est en deux mots l’histoire de la religion a travers les Ages. La religion a chassé la magie, science mal faite, ou l’a fait tomber en discrédit. Mais lorsque plus tard, la conception des forces élémentaires i

dereis comme des agents personnels, cède devant la

découverte des lois naturelles, alors la magie, basée Implicitement sur l’idée d’un enchatnement nécessaire et invariable entre les causes et 1rs effets, enchaînement indépendant d’une olonte personnelle, la magie soit de l’obSCUrité et du discrédit où elle était tombée, et par la recherche des relations de cause i effet dans la nature, elle prépaie directement la mute à la science. 1. 'alchimie conduit à la chimie, i P. i,

p., .71. l'.f. Rech. de science relig., t iii, p. 181. 3. Critique de l’hypothèse iootutionniste. - Pour nous

limiter strictement a notre nr question, nous nous demandons ce qu’il faut penser du système de l’r.i/er en tant qu’il concerne le passe

s’en tenir dans l’abstrait, et en faisant appel à la raison toute seule, on ne peut pas dire que ce système répugne, ni qu’il soit Illogique On peut en effet, comme nous l’avons indique en traitant la u" questio i, imaginer des transitions vraisemblables entre les dit ferents stades assignés par Frazer (col. 1538). Mais tout cela n’est pas encore de l’histoire.

Or. l’histoire est sévère, de plus en plus sévère, pour le système de Frazcr. « La thèse du magisme primitif n’a pas de fondement dans les faits », éc Ivait le 1'. Bouvier en 1913. Rech, de. sciences relui.. t. iv, p. 118. Les savants qui parlent après enquête jugent et condamnent sans tendresse le magisme pur et simple. Tel F.-B..levons, dans son livre An introduction to the study oj comparative religion, NewYork, 1908. « L’idée que la religion a été précédée par la magie et en est sortie, a pu être entretenue dans le passé par des hommes qui étudiaient la science de la religion, et peut n’avoir pas encore été rejetée de tous. Mais aujourd’hui elle n’a plus de place dans la science de la religion. Faire sortir la religion ou la science de la magie, laquelle n’existe qu’en Imitant l’une ou l’autre, est aussi absurde que d’imaginer que l’insecte, qui par mimétisme prend la couleur de la feuille sur laquelle il vit, précède et produit l’arbre destiné à le porter. » P. 101. H. R. Marctt non plus ne ménage pas les critiques au système de Frazer : « Frazer, dit-il, oppose trop magie et religion ; il plaide en divorce quand il suffirait de plaider en séparation, il identifie à tort la causalité magique et la causalité co.itumière… » Hastings, art. Magic, p. 250 ; cf. Rech. de science relig., t. iii, p. 182-181.

Mais quand il s’agit de remplacer le système de Frazer, ces auteurs et d’autres encore, lui opposent un autre système, prémagisme, animisme, préanimisme. Ils voient, ils entrevoient avant la magie pure, un état encore indistinct. Ainsi Marett, .levons, E.-S. Hartland, Loisy… Pour.levons, religion et magie dérivent d’une source commune, l'âme humaine et son idée de Dieu. The idea of God, p. 155, 156. Pour Loisy : Antérieurement à la magie et à la religion, nous p » uvons conjecturer un état social très imparfait ou magie et religion sont encore confondues dans quelque chose qui n’est, à proprement parler, ni la magie ni la religion. » A propos d’histoire des religions, Paris, 11)11, p. 183.

Le prémagisme mélangé d’animisme, en proportions variables, est un système plus habile et plus vraisemblable que le magisme pur. Cependant les considérations sur lesquelles on essaie de le fonder sont des assises fragiles et souvent ruineuses. II y a souvent, pour donner apparence de consistance et de solidité, des principes philosophiques reliant les observations et les faits, en particulier le grand principe de l'évolution. De ce principe nous avons assez parlé' pour notre but dans la i ro question. Restent les faits. On peut dire hardiment que ni l’histoire, ni l’ethnologie n’imposent le magisme ou le prémagisme, même renforcé d’animisme. Au contraire, aussi haut que nous