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MARIE. BIENFAITS PROCURÉS l’AK SON CULTE

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terminer sa vie, en récitant quelques prières, même quotidiennes, à Marie, ou en lui rendant quelque hommage, tandis que, dans son cœur, il entretient le péché, col. 178. La critique que l’auteur fait des arguments traditionnels et l’approbation qu’il donne à la conclusion de Muratori, col. 188 sq., n’ont pas d’autre lmt, ce semble, que d'écarter une interprétation absolue de cette proposition, au moins malheureuse, qu’il attribue a plusieurs théologiens : l’crire omnino non posse, qui Mariée dévolus sit, utcumque dévolus is sit, etiamsi in adipiscenda teterna sainte négligeas sit et deses, col. 176.

Selon saint Alphonse de l.iguori. celle affirmation qu’un dévot serviteur de Marie ne peut se damner, doit s’entendre de ceux qui, avec le désirde s’amender, sont fidèles à honorer Marie et à se recommander à elle. Gloires de Marie, part. I, c. viii. Quant aux pécheurs, le saint docteur dit que s’ils s’elïorcent de sortir du péché, où ils sont encore, et s’ils cherchent, pour cela, l’aide de Marie, cette bonne mère ne manquera pas de les secourir et de les ramener en grâce avec Dieu. Op. cit., part. I, c. i, 4. La même doctrine est exposée dans la Véritable épouse de JésusChrist, xxi, 10. Ces explications sont communément données par les théologiens plus récents, Terrien, op. cit., t. iv, p. 291 sq.

2° Conclusions doctrinales concernant l’assurance du salut provenant de la dévotion à Marie.

1™ conclusion concernant la nature de cette assurance. — Bien que cette assurance ou espérance du salut soit certaine du côté de Marie dont la protection ne peut faire défaut à ses fidèles serviteurs, il y a toujours du côté de ses serviteurs, quelque mélange de crainte qu’il n’y ait point persévérance dans la fidélité à son service. — a) Du côté de la puissance et de la miséricorde de Marie, l’espérance est certaine. Selon l’enseignement théologique constant, la protection de Marie est toujours assurée à ses fidèles serviteurs, tant qu’ils persévèrent dans cette dévotion et cette protection de Marie ne peut manquer de leur obtenir le bien principal qui est la récompense éternelle. Du côté de Marie, l’espérance du salut est donc très certaine, comme du côté de la puissance et de la miséricorde de Dieu qui ne nous font jamais défaut, notre espérance en Dieu est certaine, selon S. Thomas, Sum. theol., II a -II ie, q. xviii, a. 4. — b) Du côté des serviteurs de Marie, l’assurance du salut est toujours mélangée de quelque crainte qu’il n’y ait, par la faiblesse de leur libre arbitre, manque de générosité ou de constance dans l’accomplissement des conditions requises pour mériter constamment cet amour et cette protection efficace de Marie. C’est encore ce qu’affirme saint Thomas relativement à notre espérance dans la toutepuissance divine : Quod hoc quod aliqui habentes spem deficiant a consecutione beatitudinis, contingit ex defectu liberi arbitra ponentis obslaciilum peccati, non autem ex defectu divina ? potentiel' vel misericordiæ cui spes innititur, unde hoc non præjudical certitudini spei. hoc. cit., ad 3um.

On doit, d’ailleurs, se rappeler que les signes de prédestination, si excellents qu’ils soient, ne peuvent jamais donner, de notre côté, une certitude absolue. 2e conclusion concernant les conditions requises pour que la dévotion à la très sainte Vierge donne cette espérance de salut.

a) Il est absolument requis que l’on ait au moins le désir sincère de rompre avec le péché, ou que l’on ait la volonté d’avoir ce désir véritable ; et qu’avec une telle volonté on prie Marie pour qu’elle aide à briser les chaînes du péché, ou qu’elle aide à en obtenir le désir efficace et la volonté. Marie ne peut vouloir aider une âme qui reste résolument attachée au péché, et qui exclut même tout désir de rompre avec

le péché. Vis-à-vis du pécheur, Marie ne peut avoir d’autre attitude que celle de Dieu lui-même, qui exaucela prière du pécheur, seulement quand celui-ci demande quelque chose a Dieu, non selon ses affections coupables, mais selon la direction de la foi et pour s'éloi. du péché, et qu’il le demande avec constance, s. Thomas, Sum. theol., ILIF', q. lxxxhi, a. 10. Comme une telle prière obtient de la miséricorde divine, pour le l>' cheur, ce qui est nécessaire à son salut, à cause de la grâce divine dont elle procède, loc. cit., ad 2 ainsi la dévotion à Marie, semblablement pratiquée par un pécheur ayant un vrai désir de rompre avec le péché, donne l’espérance fondée d’obtenir, à titre miséricordieux, la protection de Marie, pour qu’elle l’aide à briser les chaînes du péché, ou pour qu’elle l’aide à commencer à résister au mal et à enlever l’occasion, ou du moins à en obtenir un vrai désir. Comme i ! espoir que le pécheur qui prie, sans avoir encore la volonté ou le désir de se convertir, mais qui n’est point obstiné dans le péché, obtienne finalement, de la miséricorde divine, la grâce et le pardon, de même les pécheurs qui n’ont pas encore actuellement la volonté ni le désir de se convertir, pourvu qu’ils continuent persévéramment à honorer et à prier Marie, et qu’ils ne comptent point présomptueusement sur sa protection pour pécher avec impunité, peuvent espérer obtenir de la miséricorde divine, par l’intercession de Marie, la grâce et le pardon. On remarquera particulièrement les paroles de Benoît XIV parlant, d’une manière générale, de 1 efficacité de la prière faite par le pécheur, et appliquant cette doctrine à l’obtention du salut éternel par le moyen du scapulaire. Il peut se faire dit-il que, par l’infinie miséricorde de Dieu, la prière du pécheur soit exaucée, même sans la volonté de changer de vie, pourvu qu’il ne soit pas d’une volonté tellement obstinée qu’il rejette pour toujours, toute pensée de pénitence, qu’il persévère dans la prière avec dévotion et avec une ferme confiance, demandant à Dieu les secours dont il a besoin pour obtenir le salut. De festis B. Mariæ virginis, vi, 7, Opéra, t. ix, p. 269.

b) La dévotion à Marie, quand elle est portée jusqu'à l’imitation des exemples de la sainte Vierge dans sa haine du péché et sa fidélité à suivre la volonté ou les commandements de Dieu, donne une plus grande assurance d’obtenir de sa toute-puissante protection, le salut éternel. C’est en ce sens que s’exprime saint Bernard : Non recédât ab ore, non recédât a corde et ut impelres ejus orationis suffragium, non deseras conversationis exemplum. Super Missus est, hom. ii, 17, P. L., t. CLxxxiii, col. 70. En conseillant une constante invocation à Marie qui est de perfection, le saint docteur veut aussi donner un conseil de perfection relativement à l’imitation des vertus de Marie. Saint Bonaventure dit, de même, qu’il y a peu d’utilité à jeûner par amour pour Marie, sine orationis inslanlia et fervore et ipsius imitatione. Après avoir rappelé les paroles de saint Bernard, il conclut : Nam si deseris, non potes in ea certitudinaliter confidere, ac per hoc nec gratiam obtinere. Sermones de B. virgine Maria. De annuntiatione, serm. v, Opéra, t. ix. p. 680. 3e conclusion relative à plusieurs textes scripturaires, souvent cités en faveur de l’assurance du salut résultant de la dévotion à Marie, notamment : Qui me invenerit, inveniel vitam et hauriet salutem a Domino, Prov., viii, 34 sq. ; Qui audit me non conjundetur et qui élucidant me vitam eclernam habebunt, Eccli.. xxiv, 30. Ces textes sont appliqués à Marie dans un sens simplement accommodatice. Au sens littéral immédiat, ils doivent s’entendre de la Sagesse éternelle et des bienfaits surnaturels assurés à ceux qui l’aiment et la suivent fidèlement. L’application accommodatice de ces textes à la très sainte Vierge, telle qu’elle se ren-