Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 9.2.djvu/525

Cette page n’a pas encore été corrigée
2455
2456
MARIE, BIENFAITS PROCURÉS l’Ali SON CULTE


nifeste de la toute-puissance d’Intercession de Marie s’exerçant spécialement en faveur de ceux qui l’invoquent fidèlement et habituellement, il n’est point formulé d’une manière explicite avant le XIe siècle. La première expression que l’on rencontre est une parole attribuée aux anges, dans un récit d’un fait miraculeux rapporté par saint Pierre Damien : Nec ad seterni fudicis poterit paire conspectum qui genitricis ejus sibi providit auxilium. Opusc, xxxiii, 2, P. L., t. c.xlv, col. 563. Saint Anselme assure qu’il est impossible que celui-là périsse qui se tourne vers Marie, et est regardé par elle. OmL, ui, P. L., t. CLvm, col. 95(3. Eadmer estime que penser souvent avec amour à la très sainte Vierge est magnum promercndic salutis initium. De excellent ia H. Marin-, iv, /'. L., t. eux, col. 566. Saint Bernard affirme, d’une manière générale, qu’en suivant Marie on ne dévie point. Super M issus est, liom. ir, 17, P. L., t. clxxxiii, col. 71. Selon Adam de Perseigne († 1203), celui qui aime Marie d’une manière persévérante ne périra point. Mariale, serm. ii, P. L. t. ccxi, col. 715.

Saint Thomas enseigne que, comme les navigateurs sont dirigés vers le port par l'étoile de la mer, ainsi par Marie les chrétiens sont dirigés vers la gloire éternelle. Opusc. VIII in salut, angel. A cette même époque, Richard de Saint-Laurent cite la parole déjà rapportée de saint Anselme, De laudibus B. M., t. II, c. v, parmi les œuvres du B. Albert le Grand, Lyon, 1651, t. xx, p. 70. Selon Raymond Jordan, Marie glorifiera, dans la vie future, ses serviteurs qui l’auront honorée dans la vie présente. Contemplationes de B. V., proœm., dans la Summa aurea, t. iv, col. 852. Tauler († 1361) assure que ceux-là ne peuvent jamais périr qui honorent et invoquent Marie dévotement et persévéramment. Marie glorifiera, dans la vie future, tous ses serviteurs pourvu qu’ils l’aient honorée. Tractalus de decem cœcitatibus, iv, Opéra omnia, Cologne, 1603, p. 874 sq. Saint Antonin de Florence fait sienne la parole de saint Anselme, Sum. theol., part. IV, tit. xv, c. xiv, p. vii, t. iv, col. 1007. Saint Laurent Juslinien († 1455) commentant les paroles de Jésus-Christ à sa mère du haut de la croix, met sur les lèvres de Notre-Seigneur ces mots : Nullus devotus tibi a me efficietur alienus. De triumphali Christi agone, xviii, Opéra omnia, Lyon, 1569, p. 357.

A la fin du xve siècle, Pelbart de Temesvar émet cette proposition que servir Marie est un signe de salut très certain et très assuré. Ce qu’il prouve par plusieurs textes scripturaires appliqués à Marie dans la liturgie de l'Église, notamment Prov., viii, 34 sq. ; Eccli., xxiv, 30 sq. ; par les titres d'étoile de la mer, de mère de la grâce et d’avocate des chrétiens donnés à Marie dans la liturgie ; enfin par quelques faits d’intervention miraculeuse de Marie en faveur de ses serviteurs. Op. cit., p. 216 sq. Puis Pelbart prend soin d’indiquer les conditions requises pour que la dévotion à Marie soit ainsi un signe assuré de salut. La première condition est de servir Marie dans la pratique de la foi catholique, car sans la foi il est impossible de plaire à Dieu, conséquemment impossible aussi de plaire à la Mère de Dieu. Donc les hérétiques et les schismatiques, et tous ceux qui s'éloignent de la foi catholique ne présentent point à Marie un culte qui lui soit agréable et qui leur soit salutaire. La deuxième condition est que les actes du culte envers Marie soient exempts de faute grave, car Marie, étant parfaitement exempte de tout péché, aime seulement le culte de ceux qui sont purs. Donc ceux qui ont l’intention de commettre le péché, ou qui le commettent actuellement, mettent un obstacle à l’intervention efficace de Marie pour eux, p. 217. Un peu plus loin Pelbart affirme que Marie n’abandonnera pas le pécheur qui se tourne

vers elle, jusqu'à ce qu’elle l’ait réconcilié ave Dieu, p. 220. La troisième condition est la sincérité qui demande l’imitation des vertus de Marie. La quatrième condition est de présenter à Marie des hommages qui lui soient rendus agréables par la charité qui les anime, p. 217. Ces deux dernières conditions, bien que l’auteur ne le dise point de manière expresse, appartiennent vraisemblablement à la perfection de la dévotion, puisque selon lui, Marie n’abandonnera point le pécheur qui se tourne vers elle jusqu'à ce qu’elle l’ait réconcilié avec Dieu.

Au xvp siècle, on rencontre, chez Louis de Blois († 1566), cette affirmation incidente, que celui-là ne peut périr qui a été un humble et zélé serviteur de Marie. Canon vilæ spiriluulis, xvii, Opéra, Anvers, 1632, p. 19. Pierre Antoine Spinelli († 1616) reproduit et fait sienne la thèse de Pelbart. Comme lui, il conclut que ceux qui ont une dévotion particulière envers Marie peuvent, à cause de cette dévotion, concevoir une grande espérance de leur salut. Il n’excepte point les pécheurs, du moins ceux qui ont quelque volonté de rompre avec le péché. Il ajoute que l’on doit au plus tôt, s’efforcer de sortir du péché, par la réception du sacrement de pénitence, et rendre son élection certaine par la pratique des bonnes œuvres. Les grâces privilégiées accordées par Marie à quelques pécheurs notoires doivent tellement enflammer la piété envers Marie qu’elles inspirent en même temps une horreur souveraine du péché, de peur que, par l’abus de la bonté de Jésus-Christ et de sa sainte Mère, l’on ne se mette dans un danger manifeste de damnation. Pietas ac deuotio quibus B. Deipara Maria a nobis colenda est, c. i, 19, dans la Summa aurea, t. v, col. 25 sq. Selon Novato, la dévotion à Marie est un très grand signe de prédestination. Le salut des pécheurs est également assuré, s’ils s’approchent de Marie avec vénération et amour et s’ils implorent sa protection. Op. cit., t. i, p. 404.

Paciuchelli († 1660) fait siennes les paroles de Louis de Blois précédemment citées. Excitationes ad colendam Virginem Deiparam, 2e édit., Venise, 1671, p. 345. Théophile Raynaud († 1663) parle surtout contre quelques exagérations qu’il attribue à des auteurs récents, dans la défense de cette proposition qu’il est impossible qu’un serviteur de Marie se damne. Il estime que la proposition est vraie seulement en ce sens qu’il y a grand espoir de salut pour quiconque sert Marie avec piété et persévérance. On ne peut, sans erreur, promettre à aucun serviteur de Marie, si dévot qu’il soit, une conversion infaillible s’il est dans le péché, ni une persévérance infaillible dans la grâce s’il la possède déjà. La persévérance ne tombe pas sous le mérite, et il n’y a pas de diplôme céleste promettant aux pieux serviteurs de Marie, avec une certitude infaillible, les secours divins. Diptycha mariana, x, 37, Opéra, t. vii, p. 237. Christophe de Vega explique en quel sens la dévotion à Marie assure le salut. Quoique les serviteurs de Marie puissent pécher et défaillir et persévérer finalement dans le péché, ils n’y persévéreront cependant point, parce que la Mère de Dieu obtiendra pour eux les secours efficaces avec l’aide desquels ils mourront infailliblement dans l'état de grâce. Op. cit., t. ii, p. 408. Vega parle de tous les serviteurs de Marie, si criminels qu’ils soient, loc. cit., tamelsi Judas sit., p. 410. Mais il est manifestement question des seuls pécheurs qui prient la Mère de Dieu et implorent son secours, p. 409. b) Depuis la fin du XVIIe siècle jusqu'à l'époque actuelle. — En 1673, les Monita salutaria, dans leur 3 8 avertissement, blâmaient cette affirmation que l’on peut, à cause du culte que l’on rend à Marie, être prédestiné si l’on n’a pas la charité. Leur blâme était motivé par cette assertion que seule la charité établit