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MAHIK. PUISSANCE D’INTERCESSION


gloire céleste conférée à Marie. Suarez, lu III"" S. Tlwmæ, disp. XXI, sect. iv, 4. L’une et l’autre formule, fréquemment employées dans toute la tradition catholique, ont eu leur consécration dans la bulle Ineffabilis Deus de Pie IX du 8 décembre 1854, dans le prologue et dans l'épilogue.

II. TOUTH-I’UISSA.SCK J’I.XTKIICESSION DE MARIE IV

ciel. — C’est un enseignement théologique très assuré

que la puissance d’intercession des saints est proportionnée à leur degré de gloire au ciel : Quaulo sunt Deo conjunctiores, tanto eorum orutiones sunt mugis efficaces, S. Thomas. Sam. theol., IF-IF 1 ', q. lxxxiii, a. 11. Donc Marie, dont la gloire surpasse incomparablement celle de tous les autres saints, les surpasse aussi quant à la puissance d’intercession, et de telle manière que, selon le témoignage constant de la tradition catholique, elle possède la toute-puissance d’intercession. Nous étudierons cette puissance d’intercession dans l’enseignement théologique aux diverses périodes de son histoire. Puis nous en déduirons quelques conclusions doctrinales.

Enseignement théologique.

1. Avant le VIII » 

siècle, le concept de la toute-puissance d’intercession de Marie ne se rencontre d’une manière explicite, que dans plusieurs textes attribués à saint Éphrem, où il est dit que Marie, parce qu’elle est vraiment mère de Dieu, peut tout, et qu’elle a tout crédit auprès de son divin Fils, Precationes ad S S. Dei matrem, iii, vii, x, Opéra omnia, édit. Assémani, Rome, 1746, t. iii, grreco-latina, p. 526, 537, 549. Textes très explicites mais dont l’entière authenticité n’est pas bien certaine.

2. Depuis la première moitié du VIIIe siècle jusque vers la fin du xvii° siècle. — Au viiie siècle, en Orient les affirmations les plus explicites sont celles de saint André de Crète, saint Germain de Constantinopie et saint Jean Damascène.

Saint André de Crète († 720), dans une prière liturgique à Notre-Seigneur, le prie d'écouter les supplications de sa mère qui, parce qu’elle est sa mère, peut le fléchir ou le vaincre par ses prières. Triodia majoris hebdomadæ, od. 8, P. G., t. xcvii, col. 1117. Selon saint Germain de Constantinopie († 740), les prières faites à Jésus par Marie lui sont très agréables et ont toute la persuasion que donne l’autorité d’une mère. In præsent., i, 17, P G., t. xcviii, col. 308. Le pouvoir de Marie comme mère de Dieu va de pair avec sa volonté. Ibid., ii, col. 320. Marie a sur Dieu un pouvoir maternel ; elle ne peut pas ne pas être exaucée ; Dieu fui obéit ou lui cède en tout et pour tous et en tous. In dormit. B. M., ii, col. 352. Suivant une homélie attribuée à saint Jean Damascène, mais dont l’authenticité n’est pas certaine, l’intercession de Marie n’est point repoussée et sa prière n’est point récusée. In annunt., P. G., t. xevi, col. 647. Au x c siècle en Orient, saint Nicéphore le confesseur, patriarche de Constantinopie († 829), affirme que le patronage de Marie auprès de son divin Fils est pour nous d’une force assurée, à cause de son autorité maternelle, littéralement à cause de son franc-parler de mère, Si 'r)v (x^Tpixïjv 71app7)cnav t/ei. Antirrh., II, P. G., t. c, col. 341. Ces expressions sont reproduites par Georges de Xicomédie († 879), In SS. Deiparæ ingressum, vi, col. 1340.

En Occident, on rencontre fréquemment, avant la fin du xie siècle, notamment chez saint Ildefonse († 667), Fulbert de Chartres († 1028) et saint Pierre Damien (| 1072), des expressions de très grande confiance dans l’efficacité de la prière à Marie, qui contiennent implicitement la croyance à sa toutepuissance d’intercession. A la fin du xie siècle, saint Anselme († 1109) estime que la puissance d’intercession de Marie est, à cause de sa maternité divine,

supérieure à celle de tous les saints qui, eux-mêmes, prient en union avec la mère de Dieu : Et quod possunt omnes isti tecum, tu sola potes sine illis omnibus. Oral., xi. vi. P. L., t. CL viii, col. 941. Plus explicite, Kadmci († 1124), disciple de saint Anselme, affirme formellement la toute-puissance d’intercession de .Marie : Jésus fils très bienveillant de Marie est toujours prêt à accorder à Marie tout ce qu’elle veut, De excellentia B. M., xii, P. I.., t. eux, col. 579. Selon Geoffroy de Vendôme († 1132), il n’y a point de doute que la vierge Marie ne puisse, quasi quodam matris imperio, demander tout ce. qu’elle veut à son divin Fils. Elle ne sera jamais déçue dans son droit maternel. Serm.. vin. P. L., I ci. vii, col. 268.

Suivant saint Bernard († 1153), le Fils de Dieu ne manquera pas d’exaucer toujours sa mère, et le Fils de Dieu sera exaucé par Dieu le Père. Le Fils ne peut rejeter la demande de sa mère, ni avoir lui-même de refus de son Père. Marie trouvera toujours grâce devant Dieu. Serm. de uquæductu, 7, P. L., t. clxxxiii, col. 441. Ernald de Cfrartres (+ 1156) exprime la même doctrine. De laudibus B. M. V., P. L., t. clxxxix, col. 1725. Dans un sermon souvent attribué à saint Pierre Damien, mais qui est de Nicolas de Clairvaux, disciple de saint Bernard, il est dit que toute puissance a été donnée par Dieu à Marie au ciel et sur la terre : rien ne lui est impossible. Elle s’approche de son divin Fils, non solum rogans sed imperans, domina non ancilla. Serm., xlvi, parmi les œuvres de saint Pierre Damien, P. L., t. cxliv, col. 740.

Adam, abbé de Perseigne († 1203), dit que Marie obtient du Tout-Puisssant tout ce qu’elle veut, qu’elle ne peut pas ne point obtenir ce qu’elle demande, parce que le Fils du Père, tout-puissant en miséricorde, a voulu naître d’elle. Mariale, serm. i, P. I… t. ccxi, col. 703. Quant à saint Thomas, son affirmation absolue, dans l’Exposition de l’Ave Maria, qu’en tout danger on peut, de la Mère de Dieu, obtenir le salut, et avoir son assistance pour tout acte de vertu, exprime équivalemment la toute-puissante intercession de Marie. Suivant saint Bonaventure, Marie ne peut point ne pas être exaucée par son divin Fils, De annunt. B. M. V., serm., iv, 1, Opéra omnia, Quaracchi, 1901, t. ix, p. 673 ; Soliloquium de IV mentalibus exerciliis, i, 23 sq., t. mi, p. 37. A la même époque, Richard de Saint-Laurent reproduisait et amplifiait la doctrine de saint Bernard et de Nicolas de Clairvaux. De laudibus B. M. V.. t. II, c. i, n. 18 sq. : 1. III. c. xi ; t. IV, c. xxix, parmi les œuvres du B. Albert le Grand, Lyon. 1651, t. xx, p. 38 sq., 94, 146. On observera, chez Richard, l’usage qu’il fait de plusieurs textes scripturaires, notamment de III Reg., ii, 20 ; x, 13 : Is., lxv, 24 ; Esth., v, 3 ; Luc, ii, 51. On observera aussi cette déclaration très explicite que la soumission de Jésus aux désirs et aux prières de Marie provient uniquement de l’amour de Jésus envers sa mère : Nec fuit Ma subjectio necessitatis sed pietatis. t. III, c. xi, p. 94.

De la fin du xme jusqu'à la fin du xviie siècle, les mêmes formules se rencontrent habituellement chez les auteurs qui parlent de la puissance d’intercession de Marie. Nous citerons comme particulièrement explicites : Jacques de Voragine († 1298), Mariale, De laudibus Deiparæ Virginis, serm. iii, Lyon, 1688, p. 7. 394 ; Augustin d’Ancône(AgostinoTrionfo)(† 1328), In salutationem angelican, lect. vi, dans la Bibliothrt n virginatis d’Alva et Astorga, t. iii, p. 330 sq. : Raymond Jordan († 1381), Conlemplationes de B. M. Y., part. VI, cont. xvii, dans la Summa aurea de Bourrasse, t. iv, col. 921 ; Gerson, Tract. IV super Magnificat, Opéra omnia, t. iv. p. 287 ; S. Bernardin de Sienne, Sermones pro festiiutatibus SS. et immaculut ; c V..1L, serm. vi, a. 1, ciii, Opéra omnia. Paris. 1635,