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MARIE MÉDIATRICE : ACQUISITION DE LA GRACE


munion de douleurs et de volonté entre.Jésus et Marie, celle ci a mérité de devenir très dignement la réparatrice de l’humanité décime : Promeruit Ma ut reparaIrix perditi orbi.s dignissime fleret.

i" Conclusions doctrinales. - /" conclusion concernani le fait de la coopération de Marie à la rédemption,

par le consentement qu’elle donne à l’incarnation rédemptrice.

a) Implicitement indiqué dans l’antithèse patristique entre Eve et.Marie, souvent affirmé, selon l’enseignement script uraire, par les théologiens depuis saint Bernard et saint Thomas, le consentement de Marie à notre rédemption est expressément enseigné par Léon XIII et Pic X. Dans l’encyclique Fidentem piumque du 20 septembre 189(1, Léon XIII déclare que Marie a coopéré à notre réconciliation avec Dieu, quand elle a causé la venue de notre divin Sauveur, par son assentiment donné, pour toute la nature humaine, sur la demande du messager céleste. Suivant l’enseignement de Pie X dans l’encyclique du 2 février 1904, Marie, par une parfaite communion de vie et de souffrances entre elle et son divin FiJs, a mérité d'être la réparatrice de l’humanité déchue, et la dispensatrice de tous les dons que Jésus nous a acquis par sa mort et par son sang.

b) A cause des fins providentielles pour lesquelles il était demandé, et pour qu’il pût être dignement associé au sacrifice intime de Notre-Seigneur, le consentement de Marie à l’incarnation dut porter, au moins en substance, sur l’incarnation telle qu’elle devait être réalisée, avec le sacrifice de la croix auquel elle était ordonnée, avec la part de souffrance qui devait en résulter pour Marie. Cette éminente connaissance était nécessaire pour qu'à cette fin Marie pût ordonner tous ses mérites, et qu’avec un très pur amour de sacrifice et d’immolation elle fût dignement associée, ne fût-ce qu'à titre secondaire, au sacrifice de son divin Fils. C’est ce que suggère la parole de Pie X, que nous venons d’entendre, louant la parfaite communion de douleurs et de volonté entre le Fils et la mère,

c) Comme conséquence de cette intime communion entre Marie et son divin Fils, le consentement, exprimant sa participation au sacrifice rédempteur, dut, dans son âme comme dans celle de Notre-Seigneur, être comme incessamment présent, par une constante rénovation, jusqu'à la pleine et suprême consommation du Calvaire. C’est encore ce qu’indique, dans la même encyclique, l’affirmation de Pie X, que Marie eut la charge de garder et de nourrir la divine victime et de l’offrir, au moment voulu, à l’autel du sacrifice. D’où, entre le Fils et la mère, une constante association de douleurs et de volonté, méritant qu'à tous deux l’on applique la parole du Prophète : Déficit in dolore vita mea et anni mei in gemitibus.

Ps. XXX, 11.

d) Très grand fut le mérite d’un consentement si parfait, incessamment renouvelé avec une si excellente charité, unissant Marie à son divin Fils, jusqu'à la consommation suprême du Calvaire. Les mérites ainsi acquis ne pouvaient, comme ceux de Notre-Seigneur, seul médiateur principal, être des mérites stricts, de condigno. Mais, dans leur sphère propre, comme mérites de convenance, de congruo, ils s'étendirent effectivement à l’humanité tout entière, comme nous venons de l’entendre de Pie X.

2e conclusion concernant la nature de la coopération de Marie à notre rédemption. — a) Nécessairement subordonnée à la médiation souveraine de son divin Fils, la coopération de Marie fut toujours secondaire et dépendante.

Coopération secondaire, supposant que tout le mérite de condigno du sacrifice rédempteur provient de

Notre-Seigneur seul, puisque c’est une vérité de fol que Jésus est l’unique rédempteur et médiateur. A ses mérites toute grâce est principalement due, comme le montre saint Thomas, Sum. theol., III a, q. xlvut, a. 5, comme l’enseigne le concile de Trente, sess. v, Décret, de peccato originali, can. 3 ; comme le déclare Pie X dans l’encyclique déjà citée : Equidem non diflUemur horum erogalionem muncrum privai » proprioque jure esse Christi ; siquidem et illu ejus unius morte nobis sunt parla et ipse, pro potestate, mediator Dei atque hominum est. Coopération toujours très dépendante de la médiation souveraine de NotreSeigneur, en ce sens que le consentement, par lequel Marie coopéra à notre rédemption, fut donné par elle avec l’aide de grâces provenant de la rédemption accomplie par Jésus-Christ ; et qu’il en fut de même pour tous ses mérites et satisfactions de congruo. Car Notre-Seigneur est, selon l’enseignement de la foi, le seul médiateur de qui toute grâce procède : De plenitudine ejus omnes nos accepimus. Joa., i, 10.

b) Coopératrice de notre rédemption, Marie a été elle-même, rachetée par Notre-Seigneur, non d’une rédemption libératrice comme le reste des créatures, mais d’une rédemption préservatrice provenant d’une grâce toute particulière. C’est une vérité définie par l'Église que Marie a été inluitu merilorum Christi Jesu salualoris humani gemris. ub omni originalis culpee labe.prœservata immunis. Denzinger-Bannwart, n. 1641. Vérité bien exprimée aussi dans l’oraison pour la fête de l’Immaculée Conception : Quwsumus, ut qui ex morte ejusdem Filii tui præoisa eam ab omni labe præservasti, etc.

3° conclusion concernant le litre de corëdemplrice donné à Marie. — a) Bien que les documents pontificaux n’aient point cette expression, ils ont des termes équivalents. Dans l’encyclique Adjutricem populi, du 5 septembre 1895, Léon XIII appelle Marie sacramenti humanæ redemptionis patrandi administra et reparatri.v tolius orbis. Pie X, dans l’encyclique du 2 février 1904, donne à Marie le titre de reparatrix perditi orbis ; titre d’autant plus significatif que le souverain pontife affirme, au même endroit, la communion de douleurs et de volonté entre la mère et le Fils.

b) Le mot corédemptrice signifiant, par lui-même, une simple coopération à la rédemption de JésusChrist, et ayant reçu, depuis plusieurs siècles, dans le langage théologique, le sens très déterminé d’une coopération secondaire et dépendante, selon les témoignages précités, il n’y a point de difficulté sérieuse à s’en servir, à condition que l’on ait soin de l’accompagner de quelques expressions indiquant que le rôle de Marie, dans cette coopération, est un rôle secondaire et dépendant. Cette précaution peut être souvent opportune, soit dans le langage théologique, soit surtout dans l’enseignement des fidèles et dans la polémique avec les non catholiques.

4° conclusion concernant la participation de Marie au sacerdoce de Jésus. — a) C’est une conclusion théologique certaine, que Marie coopéra, de quelque manière, à l’acte principal du sacerdoce de JésusChrist, en donnant comme l’exigeait le plan divin, son consentement au sacrifice de la croix, tel qu’il a été accompli par Jésus-Christ.

Selon l’enseignement de saint Thomas, Sum. theol., III a, q. xxii, a. 2, l’acte principal du sacerdoce de Jésus-Christ a été l’acte par lequel Jésus s’est offert en sacrifice pour la rédemption du monde. Dès le premier moment de son incarnation, il eut la volonté d’accomplir ce sacrifice ; mais la parfaite consommation à laquelle, selon le plan divin, était attachée notre rédemption, eut lieu seulement sur le Calvaire. Ce fut par ce sacrifice suprême que Jésus remplit