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“affaiblissement de sa santé, quittait Paris et se retirait d’la maison professe de Tolède. C’est la qu’il composa les ouvrages qui ont fait sa renommée, L’un d’entre eux devait lui attirer de cruels désagréments ; ce n’est pas d’ailleurs celui qui profusse sur le tyrannicide une déctrine plus qu’aventurée : malyre les instances de la “cuur de France, ce livre continua à circuler librement en Espagne. Mais un traite sur l’altération des mon- “naics. paru avec d’autres miscellanea à Cologne, en’LOUY, lui attira la haine des ministres de Philippe EL qui y sont nettement accusés d’incapacité et de trafics coupables. Sous prétexte que cet ouvrage portait atteinte au crédit de l’Etat. Mariana fut arrèté, et enfermée dans le couvent des franciseains de Madrid. Son procès fut commencé ; mais on recula finalement devant une condamnation. Après une détention d’un an. l’écrivain rentraæ en 1610 semble-t-il, dans la saison de Tolède, où il mourut le 16 février 1624. “Merveilleusement outillé pour faire un historien, doue dé-remarquables qualités intellectuelles, Mariana mble avoir été desservi par un caractère passableHuent ombrageux. Il fut l’un des chefs de la coterie de …jtsuites espagnols mécontents qui essavèrent de créer, ’dans la péninsule. un mouvement séparatiste, ou tout “au moins de limiter les pouvoirs du général.

L’œuvre capitale de Mariana est son lZistoire « d’Espagne. monument de haute érudition en même temps que chef-d’œuvre de composition et de style. lula publin d’abord en latin, De rebus hispanis, en 20 livres, Tolède, 1592, puis en 25 livres, Molède. 1595, enfin en 30 livres, Francfort, 1606 : menant le récit des événements jusqu’à la mort de Ferdinand le Catholique (1516). Lui-même la traduisit, ou plutôt l’adapta. en espagnol, avec des corrections et des additions qui rendent ce travail préférable à l’original : Historia général de España, Tolède. 1601, deux volumes in-fol. : il v a eu de nombreuses éditions successives, jusqu’au miiieu du xIx° siècle, avec des continuations. dont on trouvera le détail dans SommerVogel : la traduction française du P. Charenton, Paris, 1725, est restée célèbre.

Plus important pour l’historien de la théologie morale est le traité intitulé : De rege et regis inslitutione libri tres. Tolède, 1599, dédié au roi Philippe IIL et muni de toutes les approbations officielles, entre autres d’un chaleureux hommage du censeur Pierre de Oùa, religieux mercédaire. C’est dans ect ouvrage que Mariana, après avoir développé la doctrine démocratique de l’origine du pouvoir royal, esquisse sur le tvrannicide un certain nombre de thèses pour le moins risquées. Concrétisant ses idées, il ne craint pas de juger avec beaucoup d’indulgence l’attentat perpétré sur le roi de France. Henri II, par Jacques Clément (1589). Dans la première édition. de l’aveu du P. Sommervogel, se trouve bien la phrase : Sie Ciemens persit ælernum Galliæ decus, ut plerisque visum est les éditions suivantes, Mayence, 1603. 1605, 1611, ont subi des retranchements. Au moment même de sa publication, le livre ne suscita en Espagne aucun esclandre. En France, il fut assez vite remarqué : mais c’est après l’assassinat de Henri IV par Ravaillac (14 mai 1610) que les colères se déchafnèrent : le 8 juin, l’ouvrage était condamné par le Parlement de Paris et brûlé par la main du bourreau : la Sorbonne s’associait à ce jugement, des représailles s’ensuivaient contre les jésuites de france. et les autorités de la Compagnie prenaient des mesures pour ramener les écrivains jésuites à plus de circonspection. Cette question sera étudiée avec plus de développement à l’art.TYRANNICiDE ; Voir aussi t. vi. col. 1062 et col. 1083.

Le traité De pondessous et mensuris. Tolède, 1609, réimprimé dans Menochius, Commençant totius sacræ Seripluræ. se rapporte exclusivement à l’herméneutique et explique les poids et mesures des Flébreux en fonction des divers systèmes espagnols de l’époque. — En 1669 parut à Cologne un fort Volume in-fol. contenant Zractatus septem : 1. De adventu B. Jacobi apostoit in Isispaniam : 2. Pro editione vulgata ; 3. De speëtaculis ; 4. De monctæ mulatione : 3. De dit mortis Christi ; 6. De annis Arabum : 7. De morte et immortaditate. Le n° 2 est reproduit dans Menochius, op. est. our. et dans le Cursus Scripluræ sacræ de Migne, 1. xt, p. 987-698, Nous avons dit plus haut les désagréments qu’attira à l’auteur le traité sur l’altération des monnaies. Au dire des spécialistes, it S’\ rencontre un cerain nombre de Vues, lout à fait remarquables pour l’époque, sur la question monétaire. En 1612, Mariana fit paraître à Munich et à Ingolstact une édition princeps de Luc de Tuy : De allera vita fideique controversiis adrersus Albigensium essores libri 111, ef. ci-dessus, col. 1001. — Les Scholia in Velus et Novum Testamentum, Madrid. 1613. Paris, 1620, un gros in-folio dédié à Bellarmin, ont été goûtés par Richard Simon. Voir Histoire critique du Vieux Testament. 1. III. €. x, Xvut. et fisloire critique des prin cipaux commentateurs du Nouveau Testament, €. XI. — Dans l’édition d’Isidore de Séville, publiée par J. Grial, en 1599, avec l’aide de nombreux collaborateurs, Mariana fut chargé de trois opusecuies : ln dibros Veteris ae Novi Testamenti proœmia, De fide catholica ex Veteri et Novo Testamento contra Judæos, Synonyma de lamentatione animæ peccatricis : ses annotations ont été reproduites dans Arevalo et sont passées dans P. L., t. LXxxm1, col. 155-180, 41$1-$238. 825-868.

Nous avons noté, ci-dessus, l’attitude que prit Mariana à l’endroit de l’autorité centrale de la Compagnic. Son opposition dut commencer d’assez bonne heure ; lors de son procès de 1609, les personnes chargées de l’enquète. et qui étaient étrangères à la Compagnic. mirent la main sur des papiers passasiblement compromettants où le savant historien ne ménagreait guère la direction imprimée à la Société, tant au point de vue administratif qu’à celui des études. Après sa mort. ces papiers furent publiés en latin, Discursus de essoribus qui in forma gubernationis Societatis Jesu occurrunt, Bordeaux, 1625, ce en espagnol, Tratado del gobierno de la Compañau de Jesus ; une traduction française parut à Paris, en 1625, Trailé des choses qui sont dignes d’amendement en la Compagnie des jésuites, une italienne à Bordeaux, 1625. Cette apparition simultanée. en diverses langues, tient évidemment à un plan concerté. Longtemps contestée par les jésuites, « l’authenticité (des Discursus), dit le P. 3. Brucker, ne paraît guëre douteuse :. La Compagnie de Jésus, Paris, 1920, p. 193. 194. Voir en sens contraire Hurter, Nomenclator, 3° édit., t. ii, col. 763

Outre les ouvrages imprimés, Mariana a laissé une quantité considérable de mss. dont on trouvera le détail dans Sommervogel. Il y aurait intérêt pour l’histoire de la théologie à étudier une volumineuse explication de saint Thomas, 1570-1522, reproduisant les cours faits au Collège de Clermont. Saint-Gall, n. 2129, et une courte Isagoge in sacram Scripluram, Saint-Gall. n. 1115.

Il y a une biographie ancienne de Mariana par Famago de Vergas.

Renseignements intéressants dans Bayle, Dictionnaire historique et critique, art. Mariana ; ample bibliographie dans Sommervogel, Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, t. v, col. 547-567 ; quelques indications dans Ilurter, Nomenclator, 3° édit., t. m1, col. 759-763. La bibliographie pour la question du tvrannicide sera donnée à l’art. spécial. —— Pour l’attitude frondeuse de Mariana à l’égard de la Compagnie :.. Brucker, S..L., La Compagnie de Jésus, Paris, 1919, p. 192-201

É.AMANN.