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MARIAGE DANS L’ÉGLISE GRÉCO-RUSSE

malthusiunisme des catholiques, 1926 (dans les éditions Spes, que nous aurions pu mentionner vol. 2315).

M. Wendel doit soutenir prochainement une thèse sur Le mariage à Strasbourg à l’époque de la Réforme. Un cours sera fait À l’institut de Droit canonique de Strasbourg en 1927-28 sur la compétence des juridictions ecclésiastiques en matière matrimoniale au Moyen Age, et plus spécialement sur le plein exercice, à partir du XIe siècle, des droits que l’Eglise a toujours été fondée à se réserver sans limitation sur le sacrement de mariage : les conclusions en seront publiées.

5. À la bibliographie, qui, pour être complète, devrait tenir un fascicule, on ajoutera : sur les anciennes collections canoniques (col. 2130 sq.), P. Fournier, De quelques infiltrations byzantines dans le droit canonique… (Mél. Schulmberger, 1924) : sur le mariage de la sainte Vierge, art. de Girerd dans la Nouvelle Revue Théologique. 1923, p. 119-163 (cf. col. 2187 et 2296) : sur le mariage mixte (question surtout canonique, dont nous n’avons guère eu à nous occuper) : Eichmann, Das kathobische Miseheherecht nach dem Codex fjuris canonici, Paderborn 1921, et l’intéressant opuscule de Stutz, Zum neuesten, Stund des kathol. Mischeherechts un Deutschen Reiche, Stuttgart, 1918 ; Sur la doctrine classique du contrat, Thaner, Die Per : lichkeit in der Eheschliessung, Gratz, 1900 et Error qualitalis redun dans in personam, dans Acad. Vienne, 1900 : sur la doctrine générale du mariage : Brevilæqua. Trattatu dommatico-giuridicoe morale sur matrimonis cristiane, Rome, 1918 ; Biz, Die Ehe un Lichte der kath. Glaubenslehre, Fribourgen-B., 1920 ; Rive-Umberg. Die Ehe un dogmaltischer, moralischer und soziale Beziechung. Rome, 1921°. :

G. Le Bras.

IV. MARIAGE DANS L’ÉQLISE GRÉCO-RUSSE.

Le mariage chrétien pouvant être étudié au triple point de vue dogmatique, liturgique et canonique, c’est avant tout au point de vue dogmatique que nous entendons l’examiner dans les diverses Eglises dissidentes d’Orient, et tout d’abord dans la principale de toutes, l’Église gréco-russe. Mais nous ne pourrons négliger complètement les deux autres points de vue, à cause du rapport étroit qu’ils ont avec la doctrine.

Chez les Orientaux, le mariage se présente d’abord comme un rite sacré à deux actes : la cérémonie des fiançailles et celle du mariage proprement dit ou couronnement. Ce rite est beaucoup plus développé que celui du rituel latin, et il a par le fait, beaucoup plus impressionné les théologiens orientaux, auxquels parfois il a fait perdre de vue la vraie nature du sacrement de mariage. Par ailleurs, au milieu des multiples règles canoniques qui, dans toutes les Églises, concernent le contrat matrimonial, il en est quelques-unes (particulièrement celles qui regardent la séparation des époux et la rupture du lien conjugal), qui ont une portée d’ordre dogmatique, et que nous ne pourrons négliger. Ceci posé, voici comment nous divisons notre étude du sacrement de mariage dans l’Église gréco-russe :
I. Origine du mariage considéré comme contrat naturel.
II. Le caractère sacramentel du mariage chrétien (col. 2317).
III. Le double rite liturgique des fiançailles et du couronnement et la manifestation publique du consentement des époux (col. 2318).
IV. De l’essence et du ministre du sacrement de mariage (col. 2319).
V. De l’indissolubilité du lien matrimonial et des causes de divorce (col. 2323).
VI. Du sujet du sacrement de mariage (col. 2328).
VII. Du droit de légiférer sur le mariage ce de connaître des causes matrimoniales (col. 2329).

Qu’on ne s’étonne pas de ce long sommaire. Sur tous les points indiqués, la théologie gréco-russe présente des divergences avec la théologie catholique, bien que Grecs et Latins, aux époques des grandes controverses, aient gardé, sur la question du mariage, un silence à peu près complet, alors qu’ils bataillaient sur des sujets de bien moindre importance.

t. Origine du mariage considéré comme contrat naturel.

Les théologiens gréco-russes enseignent, tout comme les catholiques, que c’est Dieu lui-même qui institua le mariage, à l’origine de l’humanité : mais plusieurs d’entre eux adoptent la conception étrange de certains anciens Pères grecs touchant la création hypothétique de la femme. D’après cette conception, que saint Jean Damascène fait sienne dans la Foi orthodoxe, I, II, c. xxx, I, IV, c, xxiv, P. G. t, xciv, col. 976, 1208, si homme n’avait pas péché, la propagation de l’espèce humaine se serait faite par une autre voie que par l’union des sexes. C’est pourquoi la femme ne fut pas créée en même temps qu’Adam, mais tirée de lui un peu après. Tant que dura l’état d’innocence, l’homme jouit d’une parfaite incorruptibilité et impassibilité : il était comme il sera après la résurrection. À ce bienheureux état primitif le psalmiste faisait allusion, lorsqu’il s’écriait : Homo, cum in honore esse, non intellexit : comparatus est jumentis (par la génétation), et semilis factus est illis. Ps. xlviii, 12. Telle est la doctrine que développe longuement Michel Glykas dans son VIIIe chapitre théologique, en se référant à saint Grégoire de Nysse, à saint Jean Chrysostome, au Pseudo-Athanase (Réponses & Antiochus), à saint Maxime, à Anastase le Sinaire, à saint Jean Damascène. Il conclut même de là que la distinction des sexes ne subsistera pas après la résurrection. Michel Glykas, Εἰς τὰς ἀπορίας τῆς θείας γραφῆς κεφάλαια, éd. Eustratiadès, t. 1, Athènes, 1906, p. 89-115 ; cf. c. xcii, t, ii, Alexandrie. 1912, p. 418-135. On trouve des traces de la même théorie dans Siméon de Thessalonique, De sacramentis, c. xxxviii ; Dialogus contra hæreses. c. cclxxv, P. G., t. clv, col. 180, 504 ; dans le Traité des sacrements de Gabriel Sévère, Chrysanthe de Jérusalem. Συντααγμάτιον, Tergovist, 1715, p. ριθʹ : dans la Première réponse, c. vii, de Jérémie II aux protestants. Ainsi la question posée par saint Thomas. IA, q. XCVIII, a. 2, n’était pas, on le voit, de simple curiosité.

II. Le caractère sacramentel du mariage chrétien.

Dès le XIIIe siècle au moins, nous voyons les Gréco-Russes accepter sans difficulté le dogme du septénaire sacramentel. Michel Paléologue y souscrit au concile de Lyon, en 1274, puis en 1277. Le mariage fait toujours partie de ce septenaire. Au XVIIe siècle, lorsque les protestants l’attaquent, au XVIIe, lorsque Cyrille Lucar fait passer leurs négations dans sa Confession de foi, Grecs et Russes s’entendent pour repousser l’hérésie en plusieurs conciles et dans leurs deux principales confessions de foi celle de Pierre Moghila, dite Confession orthodoxe de l’Église orientale, et celle de Dosithée, rédigée au concile de Jérusalem, en 1672. La même doctrine continue à être enseignée de nos jours dans les manuels de théologie et les catéchismes. Cependant qui le croirait ? —— en 1903 paraissait à Pétersbourg une brochure d’un hiéromoine nommé Taraise, brochure dûment approuvée par la censure synodale et publiée au nom de la Rédaction de la Revue des missions, Missionerskoe obozrënie, dans laquelle le septenaire sacramentel est ouvertement attaqué comme une importation latine et scolastique acceptée trop facilement par les théologiens de la Petite-Russie, aux xvie et xviie siècles. Le mariage, en particulier, y est traité de manifestation étrangère à la religion et se trouvant dans des sociétés fermées aux préoccupations religieuses. La cérémonie des funérailles ou celle de la prise d’habit monastique mériteraient, bien plus que le mariage, d’être rangées au nombre des sacrements. Il est vrai que saint Paul appelle le mariage un sacrement : mais il parle de n’importe quel mariage et non pas seulement du mariage chrétien : La théologie des Grands-Russiens et des Petits-Russiens aux xvie-xviie siècles, Saint-Pétersbourg, 1903, p. 119-