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MARIAGE. I. RÉFORME GRÉGORIENNE


une Influence considérable sur le clergé de l’Italie centrale et méridionale : douze recueils, au moins, en Bont dérivés. I*. Fournier, Un groupe de recueil » canoniques italiens des X* et XIe siècles, dans Mém. de l’Acad. tics Inscriptions, t. XL, 1915, [>. 95-212. Le t. V, qui, dans le ms. du Vatican, a 231 chapitres, est consacré au mariage. M. P. Fournier en a donne le sommaire, loc. cit., p. 166, el la préface en a été publiée par Theiner, Disquisitiones, p. 271 s<|. L’auteur de la Collection en cinq livres semble avoir mis en circula tion un certain nombre de textes patristiques importants, relatifs au mariage. Il fait à saint Augustin de emprunts probablement directs. Le Dr adulterinis conjugiis et le De bono conjugali ont fourni chacun une trentaine de fragments. Une série importante a pour titre : Expositio Hieronymi presbyteri, I. V, c. 153, 159, 162, etc. : les premiers textes, au moins, paraissent provenir des Commentaires de saint Jérôme sur Matth., xix, 5 et Eph., v, 31. Bon nombre de textes déjà utilisés par les canonistes ont, en outre, été déformés par l’auteur de notre collection. I'. Fournier, loc. cit., p. 175-182. L’origine, enfin, de certains fragments, est douteuse : partisan de l’indissolubilité de l’union conjugale, le compilateur insère, à partir du c. 149, des décisions placées sous le nom de Jolumnes Constantinopolilanus episcopus, qui pourraient être apocryphes. Très défavorable aux secondes noces, il place sous le titre de canon de Laodicée une décision sévère à l'égard des conjoints binubes ou trinubes, t. V, c. 31, § 2, moins sévère, cependant, que la décision qu’il pouvait lire dans sa principale source, la Collection en neuf livres du Yaticanus 1349, t. IX, c. 29, qui dirime les secondes noces, stupra et adulteria. Cette réaction italienne contre les seconds mariages s’explique sans doute par une influence byzantine el par le principe de Vunitas carnis. P. Fournier, loc. rit.. p. 153. Dans la plupart des douze recueils issus de la Collection en cinq livres, des emprunts importants au t. V, ont été relevés.

Si menus que soient, en apparence, les renseignements fournis par les collections canoniques de la première moitié du xi c siècle, ils ne manquent cependant point de portée. Ils témoignent d’abord de l’insécurité des règles sur la formation et la dissolution du lien matrimonial, d’une tendance à l’ascétisme qui se manifeste en France dans l'œuvre du moine Abbon et en Italie par la réaction contre les secondes noces. enfin d’un premier effort pour l’enrichissement du dossier patristique, en vue, précisément, d’assurer l’honnêteté, l’indissolubilité du mariage.

2. La renaissance de l’hérésie.

Tandis que l’attention des canonistes italiens s’arrêtait sur le mariage, il se produisait en France un événement dont on ne put immédiatement apprécier l’importance, précurseur, lui aussi, de grandes actions : le réveil de l’hérésie. Le manichéisme reparaissait, avec sa conception méprisante du mariage, état inférieur qui rabaisse l’homme, que les hérétiques autorisent dans certains cas, sans jamais permettre au prêtre de le bénir, el dont est interdite, absolument, la réitération.

La lutte contre l’hérésie fut inaugurée en 1025. au concile d’Arras, où Gerhard, évêque de Cambrai condamne les opinions des nouveaux hérétiques sur le mariage dans le canon 10 qui est une longue justification du mariage chrétien, appuyée sur une série de textes de saint Paul. Mansi, Conc.il., t. xix, col. 449 sq. ; Hefele-Leclercq. Histoire des conciles, t. iv b, p. 940 et sq.

Pourtant, au milieu du xie siècle, la doctrine du mariage n’est point de celles qui occupent particulièrement les esprits. La centralisation de l'Église, la répression de la simonie et du nicolaïsme sollicitent, avant tout, les grégoriens. A. Fliche, La Réforme

grégorienne, I. i, 1921, et I. ir. 1925. Le mariage ne tiendra qu’une place restreinte dans les œuvres de la Réforme. Nous relèverons successivement les textes qui le concernent dan, les collections grégorienne-, chez les théologiens, enfin dans les lettres des papes.

'.', . Les canonistes réformateurs.- Les canonistes grégoriens se sont principalement occupés de la réforme de l'Église et des clercs : entepri-c fort vaste et la plus urgente. P. Fournier, Les collections canoniques niinaines tic l'époque de Grégoire Vil. dans Mémoires de l’Académie des Inscriptions, t. xi.i. Paris, 1918.

La Collation en 74 Litres ne contient sur la formation du lien matrimonial qu’un texte du pseudoÉvariste (c. 2, Hinschius, p. 87). Cf. P. Fournier, Le premier manuel canonique de la Réforme du XIe siècle, dans Mélanges d’archéologie et d’histoire de l'École française de Rome, t. xiv, 1891. p. 183. — Anselme de Lucques indique dans les deux premiers sommaires de son livre X. consacré au mariage et que nous connaissons seulement parla transcription de Aligne, son opinion sur la formation du lien : c’est le pacte conjugal qui fait le mariage et pour qu’il y ait mariage légitime, il faut que la femme ait été demandée, puis qu’il y ait eu desponsatio et bénédiction nuptiale. P. L. t. cxi.ix, col. 523. Anselme paraît favorable à l’indis solubilité absolue, peu favorable aux troisièmes mariages. Quod tertia uxor superfl.ua est, écrit-il en son c. 1. Des quatre collections grégoriennes, celle d’Anselme est la plus riche de textes relatifs au mariage. — - Le plan du Capitulare d’Atton et celui de fis Collection de Deusdedit excluent les développements sur le mariage. On ne trouvera dans le Capitulare que de rares textes sur ce sujet, parmi les fragments de saint Grégoire le Grand.

4. Les théologiens.

Sur le chapitre du mariage, la seule question qui préoccupe les canonistes de la Réforme, c’est le rétablissement du célibat ecclésias tique. Il faut faire la même remarque pour les publicistes, ('.. Mirbt, Die Publizistik im Leilalter Gregors VII, p. 239-371 el pour les théologiens. Dans l'œuvre du cardinal Humbert, le mariage des laïques n’est l’objet d’aucun développement. Et c’est en marge des traités réformateurs qu’il faut placer un précieux opuscule qui nous fera connaître la pensée de Pierre Damien sur la formation du lien matrimonial.

Cet opuscule a été écrit au cours de la controverse sur la validité des mariages contractés en temps prohibé. Certains canonistes considéraient comme valides ces mariages, pourvu que la consommation fui différée jusqu’au terme du lempus clausum. C'était insinuer que le sacrement se forme par la copula. Pour combattre cette opinion, Pierre Damien rédigea son traité De lempore celebrandi nuptias. P. L., t. cxlv. col. 659-665. Ses arguments, il les cherche d’abord dans une interprétation raisonnable et non dépourvue d’ironie des textes canoniques. Par exemple, si les nuptiæ consistent dans le concubilus, la publicité qu’exigent les canons n’irait point sans quelque scandale. Conséquence plus inattendue encore : tout péché de la chair emporterait mariage. (On se rappelle que, pour Hincmar, il emporte parenté.) C’est démontrer par l’absurde que concubilus… non nuptiæ sed res est potius nuptiarum, col. 601. — L’objection fondamentale à la théorie d’après laquelle le mariage aurait son principe dans l’union charnelle. Pierre Damien la tire de l’exemple offert par Joseph et.Marie : (Maria) non nupsil et tamen juxta Scripturæ sententiam absque dubio nuptias relebravil ; quomodo dicitur, ubi concubilus defuit, nuptias dici non posse ? Nos auteme diverso libère profitemur, et conçu bitum posse sin nuptiis fieri et sine concubilu rate nuptias appellari. Col. 662 II y a des nuptiæ virginales, cœlibes, comme celles de saint Jean. Et elles sont recommandées par l’Apôtre. — Mais s i