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MARIAGE DANS L'ÉCRITURE. DROITS ET DKYOIKS

2076 « Celui qui marie sa fille lait bien, >..M. Il tl’j a qu’un

eas où le mariage est interdit, c’est lorsqu’on s’est engagé a ne pas se mai ici ; la veuve, qui a pris rang parmi les personnes consacrées à Dieu, n’a plus le droit de contracter mariage, sinon elle s’attire le reproche d’avoir répudié la loi donnée. I 'Jim., v, 12.

b) Règles de prudence qui s’imposent. -- C’est pourquoi la plus grande prudence s’impose axant de s’engager définitivement dans un état pénible à la nature. Le lot commun, c’est que « chaque homme ail sa femme et chaque femme son mari ». I Cor., vii, 2. Et on ne peut prétendre à sortir de la règle commune sans une grâce spéciale de Dieu : « chacun a reçu de Dieu son don particulier, l’un d’une manière, l’autre d’une autre. » 7. On ne s’engagera donc dans le célibat qu’après mûre réllexion, après avoir examiné l’appel de Dieu et consulté ses forces ; et si on ne se sent pas assuré de persévérer dans la continence, « qu’on se marie ; mieux vaut se marier que de se consumer [de convoitise |. » 9.

De tels conseils où la prudence s’allie aux appels ardents vers le renoncement et la chasteté, où l’idéal proposé à certaines âmes est déclaré impraticable au grand nombre, donnent la plus haute idée de l’esprit de mesure qui caractérise la spiritualité de saint Paul. En tout cas, c’est n’avoir rien compris à sa pensée que de vouloir faire du grand apôtre un des adversaires du mariage. Si, comme o.i 1 i verra, les encratites prétendirent s’appuyer sur son enseignement pour condamner le mariage comme un péché, c’est pour n’avoir retenu qu’une partie de ses paroles et avoir volontairement fermé les yeux sur les correctifs formels qu’il y apporte. « Les textes de saint Paul sont fort clairs. Sa distinction expressive entre le xocAôv et le xpsrr-rov, I Cor., vii, 8, 9, fut comprise de la plupart des interprètes et n'échappa qu'à ceux qui, comme Tertullien, s’attardaient à des préjugés rigoristes. » Moulard, Saint Jean Chrysostome, le défenseur du mariage et l’apôtre de la virginité, Paris, 1923, p. 138, note 94. Et M. Moulard cite, de saint Jean Chrysostome, celui des Pères qui a sans doute le plus aimé et le mieux compris saint Paul, le passage suivant qui résume admirablement la doctrine de l’Apôtre : « (Paul) n’interdit point le mariage, de peur de surcharger les faibles ; il n’en fait point non plus une obligation, afin de ne point priver de leurs futures couronnes ceux qui préfèrent garder leur virginité ; mais d’un côté il établit que le mariage est une bonne chose, et de l’autre il fait voir que la virginité est préférable. » De libello repudii, ii, 4, P. G., t. ii, col. 223.

IV. DROITS ET DEVOIRS JïfX’IPROQVES DES ÉPOUX.

— Il n’est pas sans intérêt, à la fin de cette étude, de déterminer, d’après les épîtres de saint Paul, la situation réciproque où le mariage place l’homme et la femme, et les devoirs qu’il impose à l’un et à l’autre. On jugera par là de l’immense progrès que la religion chrétienne a fait faire à la famille, en libérant la femme de la condition humiliée et dépendante où la tenaient souvent les civilisations païennes ; on se convaincra de l’absolue vérité de l’affirmation d’un commentateur de saint Paul : « Le chef-d'œuvre moral du christianisme est d’avoir sanctifié le mariage. » Prat, La théologie de saint Paul, t. ri, p. 401.

On peut résumer la pensée de saint Paul sur ce point en deux mots : égalité des droits, hiérarchie des rôles.

Egalité des droits.

 La femme n’est plus la

chose de l’homme, son esclave, mais sa compagne : elle lui est égale dans tous les droits essentiels, il a envers elle les mêmes devoirs qu’elle a envers lui, et cela en vertu de la donation irrévocable qui les unit l’un à l’autre. Chacun d’eux ne s’appartient plus

à lui-même, il appartient a celui : qui il s’est donné.

Ce principe est affirmé par l’Apôtre à propos des

rapports conjugaux. Les deux époux ont les mêmes

droits d’en user ou de les demander, les mêmes devoirs de ne pas les refuser, a tel point que l’un d’entre eux ne peut même alléguer un motif religieux pour s’en dispenser, sans le consentement de son conjoint. A ce point de vue déjà, la plus parfaite égalité règne entre les époux. » I.e mari doit rendre a sa femme ce qu’il lui doit : la femme de même : i son mari. La femme n’est pas la maîtresse de son corps : il est a son mari. I.e mari, pas davantage, n’est le maître de son corps : il appartient à sa femme. Ne vous refusez donc pas l’un à l’autre, sauf tout au plus d’un commun accord, pour un temps et en vue de vous livrer à la prière. » I Cor.. vn, 3-5.

A plus forte raison la femme est-elle l'égale de l’homme pour tout ce qui touche à l’unité et à l’indissolubilité du mariage. L’homme se contentera de sa femme, comme la femme de son mari, puisque ni l’un ni l’autre ne s’appartiennent plus, mais se sont donnés ; et c’est la loi de la fidélité mutuelle qui s’impose à tous deux. 1-21 pareillement, la donation étant irrévocable de part et d’autre, ils perdent tous deux le droit de se reprendre, et le mari n’a pas plus le droit de répudTer sa femme que celle-ci ne peut rompre le lien qui l’unit à son mari : « Quant aux gens mariés, voici ce que je leur commande ou plutôt ce que le Seigneur lui-même leur commande. La femme ne doit pas se séparer de son mari. Si cependant elle s’en trouve séparée, qu’elle vive dans le célibat ou bien qu’elle se réconcilie avec son mari. Le mari non plus ne doit pas répudier sa femme. » I Cor., vii, 10, 11. Bien plus, l'égalité est telle que, quand saint Paul fait à la loi de l’indissolubilité cette unique exception que l’on appelle le privilège paulin, i ! la fait en faveur de l'époux chrétien sans distinction, que ce soit l’homme ou la femme. Ibid., 12, 16.

Hiérarchie des rôles.

Toutefois égalité ne veut

pas dire anarchie ; la famille est une société où chacun a son rôle et sa place. La place de l’homme est la première et son rôle celui de chef ; la femme doit lui être subordonnée comme le corps obéit à la direction de la tête, comme l'Église obéit aux impulsions du Christ. Eph., v, 22-33.

Saint Paul justifie par des arguments scripturaires cette place qu’il assigne à la femme. C’est d’abord l’histoire de la création de la femme qui la montre inférieure à l’homme puisqu’elle est faite de lui et pour lui : « L’homme… est l’image et la gloire de Dieu ; la femme, c’est de l’homme qu’elle est la gloire. L’homme, en effet, n’a pas été tiré de la femme, mais la femme de l’homme. Ce n’est pas l’homme qui a été créé pour la femme, mais bien la femme pour l’homme. » I Cor., xi. 7-9. Et c’est aussi l’histoire de la chute de nos premiers parents : la femme s'étant laissé séduire et ayant entraîné l’homme dans sa faute expie sa faiblesse par la subordination qu’elle doit accepter. I Tim., u. 13, 14.

De cette inégalité dans la famille naissent des devoirs nouveaux, différents pour l’homme et pour la femme. L’homme, en tant que chef, dirige et commande ; mais ses ordres seront tempérés par l’amour et le respect. L’amour, c’est le grand devoir du mari envers sa femme : et il était d’autant plus nécessaire de le lui rappeler que, avant le christianisme, l’homme était trop uniquement le maître. C’est pourquoi dans le beau passage de l'Épître aux Éphésiens que nous avons commenté, v, 22, 23, saint Paul revient avec tant d’insistance sur ce devoir : « Maris, aimez vos femmes comme le Christ a aimé son Église… Ainsi les hommes doivent aimer leurs femmes comme leur propre corps. En aimant sa