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MAISTRE JOSEPH DE

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mesurée du pouvoir spirituel suprême, n’avait rien de choquant », conclut de Maistre, et il ajoute « je ne vois pas que les temps modernes aient imaginé rien de meilleur ni même d’aussi bien ». C. x. « Une fièvre constitutionnelle s’est emparée de toutes les têtes, et l’on ne sait encore ce qu’elle produira… Qu’est-ce donc que les souverains ont gagné à ces lumières tant vantées et toutes dirigées contre eux ? J’aime mieux le pape. » C. xi.

Le livre III traite Du pape dans ses rapports avec la civilisation et le bonheur des peuples. Tout bienfait du christianisme est un bienfait du pape. « Sans le pape, l’institution divine perd sa puissance et sa force convertissante ; sans le pape, ce n’est plus qu’un système, une croyance humaine, incapable d’entrer dans les cœurs et de les modifier. » Résumé et conclusion. Aux papes revient l’honneur de la civilisation universelle : « A peine le Saint-Siège est affermi que la sollicitude universelle transporte les souverains pontifes, et les missions se multiplient efficacement », c. i ; l’honneur aussi d’avoir éteint la servitude, c. m (cf. Quatre chapitres sur la Russie, c. i. De la liberté, t. viii, p. 279-297) ; l’honneur d’avoir grandi l’humanité par l’institution du sacerdoce, c. ni et surtout d’avoir créé « ce miracle », la monarchie européenne. C.iv.

Le livre IV, Du pape dans son rapport avec les Églises nommées schismaliques, expose combien la suprématie du pape manque à l'église gréco-russe qu’il appelle photienne. Elle mérite de porter ce nom, puisque Photius l’a séparée de Rome « comme celle de Genève est calviniste, celle de Wittenberg est luthérienne » et, on le sait, toute religion qui porte le nom d’un homme ou d’un peuple est nécessairement fausse. C. iv. Les motifs que cette Église ou plutôt ces Églises invoquent pour justifier leur sécession d’avec Rome, cachent mal les mobiles qui les ont poussées. C. iv-xi. Et, parce qu’elles sont en insurrection contre l’unité souveraine, et séparées de celui à qui « appartiennent les promesses, » « elles sont stériles, » et elles sont protestantes. Il y a entre elles et les formes diverses du potestantisme une sympathie qui s’explique par la haine du pape ; mais elles connaîtront aussi « toutes les phases de dissolution que le protestantisme luthérien et calviniste a déjà mises sous nos yeux. » Qu’elles soient encore « comme des cadavres gelés dont le temps a conservé les formes, » c’est possible, mais « le vent de la science qui est chaud va souffler sur elles : il arrivera ce qui doit arriver selon les lois de la nature. » « Aucune religion, excepté une, ne peut supporter l'épreuve de la science. » C. v et n.

La conclusion de l’ouvrage est d’abord un pressant appel à l’unité adressé aux protestants « qui ont parcouru le cercle entier de l’erreur, » et plus encore aux anglicans : ceux-ci semblent destinés en effet « à donner le branle au grand mouvement religieux qui se prépare. » § 4. Que les Français, « qui ont sans doute de grands préjugés à vaincre, » ne laissent pas échapper cette occasion « de s’employer efficacement et en première ligne à la reconstruction du saint édifice. » Qu’ils cessent d'être gallicans : le gallicanisme est une espèce de protestantisme, § 11, de ce protestantisme qui a préparé les philosophes du xviiie siècle et par eux la Révolution. § 13 et 14. Que tous les ennemis du Saint-Siège, qui avaient annoncé sa chute définitive, en voyant lî pape, « chassé, exilé, privé de ses États par une puissance prépondérante et presque surnaturelle devant qui la terre se taisait, » contemplent aujourd’hui sa résurrection. La main de Dieu n’est-elle pas là? § 1C et 17. Puis, il termine par un acte de foi et d’amour, inspiré de Rossuet et de Fénelon en « la sainte Eglise romaine ».

2. De l'Église gallicane dans son rapport avec le souverain pontife, pour servir de suite à l’ouvrage

intitulé Du pape, par l’auteur des Considérations sur la France. Dès son apparition le livre Du pape avait été attaqué par des ultramontains qui lui reprochaient la manière dont il envisageait l’infaillibilité : Préface de la 2e édition. Cf. Études du 5 octobre 1897, p.."3-.J2, Arnica collatio ou échange d’observations sur le livre français intitulé : Du pape, manuscrit de J. de Maistre, publié par le P. de Maistre ; Goyau toc. cit., ii, p. 618. Il avait été attaqué aussi par les gallicans, Préface. Et à ce sujet, de Maistre disait dans cette même préface, datée du 30 juillet 1820 : « l’auteur avoue n’avoir pas un fort grand respect pour les maximes gallicanes. » Il les avait même attaquées de front dans un Ve livre de son ouvrage, intitulé : Du pape dans son rapport avec l'Église gallicane ; mais il a supprimé ce Ve livre, parce qu’il se trouvait hors de proportion avec les autres, et encore « parce qu’il avait une couleur polémique, peu en harmonie avec le reste de l’ouvrage ». La préface de l'Église gallicane rappelait ces indications.

Cet ouvrage qui comprend 2 livres : I. De l’esprit d’opposition nourri en France contre le Saint-Siège et de ses causes ; IL Système gallican, Déclaration de 1682, est une charge contre le gallicanisme, ses inspirateurs et défenseurs. De Maistre avait dit dans le Pape, c. iv : « Toute religion qui porte le nom d’un peuple est nécessairement fausse, » et la première phrase de son Église gallicane est celle-ci : « Pourquoi dit-on l'Église gallicane comme on dit l'Église anglicane ? et pourquoi ne dit-on pas l'Église espagnole…? » Il conclut de là et de cette parole de Gibbon : « L'Église gallicane, placée entre les ultramontains et les protestants reçoit les coups des deux partis, « non pas qu’elle soit sortie de l’unité en dehors de laquelle on n’est plus dans la vérité, mais elle a eu l’air « en se contemplant trop de ne pas se rappeler assez qu’elle n'était qu’une province de l’empire catholique. » L. I er, c. i.

A qui doit-on la malheureuse opposition à Rome « qui causa tant de maux au christianisme » ? A l'Église gallicane seule ? Non. Que l’on considère « les difficultés que l’on éleva en France contre l’admission pure et simple du concile de Trente » ! Aux États généraux de 1615, le clergé la voulait, mais l’esprit calviniste survivait dans le tiers-état et plus encore dans le parlement, et les prélats sont obligés de céder. « Protestant dans le xve siècle, frondeur et janséniste dans le xviie, philosophe enfin et républicain dans les dernières années de sa vie, » le parlement de Paris a pour trait distinctif « son opposition constante au Saint-Siège ». Le mal fut grand, surtout à partir du jour où l’esprit janséniste se répandit dans toute la magistrature. « Alors le parlement devint en totalité anticatholique, et tel que, sans l’instinct royal de la maison de Rourbon et sans l’influence aristocratique du clergé, la France eût été conduite infailliblement à un schisme absolu. » Ibid., c. u.

Mais l’animosité de l’auteur s’affirme surtout contre le jansénisme, « une secte, ennemie, comme sa mère, de toute hiérarchie, de toute subordination, » contre « ses dogmes atroces, son caractère odieux, sa filiation et sa paternité également déshonorantes, ses menées, ses intrigues et son insolente obstination, » c. xii ; cf. c. m-v, contre Port Royal qui l’incarna. L’influence de Port-Royal a été funeste. « Port-Royal divisa l'Église ; il créa un foyer de discorde, de défiance et d’opposition au Saint-Siège ; il aigrit les esprits et les accoutuma à la résistance… » C. v. On peut vanter « la piété, les mœurs, la vie austère, des gens de ce parti. Tout ce rigosrisme ne peut être en général qu’une mascarade de l’orgueil. » C. vi. « La réputation littéraire d Port-Royal » elle-même est usurpée. C. vi-vm. » Pascal est le seul écrivain de génie qu’ait, je ne dis pas produit, mais logé pendant quelques moments la