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LAUNOY (JEAN DE)

nibus cuique volumini affixis, indicibus locupletissimis aucta et illustrata. Accedit Tractatus de varia Launoii librorum fortuna. D’ailleurs, Launoy lui-même avait dressé le catalogue de ses écrits dans son Regii Navarræ gymnasii Parisiensis historia, t. ii, p. 852 sq.

Les œuvres de Launoy sont particulièrement intéressantes au point de vue historique et critique ; cependant la théologie positive et la théologie dogmatique et morale y occupent une place notable. Nous nous contenterons d’indiquer les principaux travaux de Launoy à ce sujet, en suivant de préférence l’ordre chronologique, car presque tous ces écrits furent composés à l’occasion de polémiques et inspirés par des circonstances du moment.

Le premier opuscule de Launoy étudie une question de philosophie et de théologie : Syllabus rationum quibus causa Durandi, de modo conjunctionis concursuum Dei et creaturæ defenditur et inofficiosa quorumdam recentiorum censura refellitur, in-8o, Paris, 1636. D’accord avec Durand de Saint-Pourçain, Launoy soutient que Dieu ne concourt pas immédiatement aux actions mauvaises des créatures libres. A la fin de son traité, Launoy pose un cas de conscience, qui évidemment faisait allusion à des controverses contemporaines.

« Le jugement rendu à Rome contre le

sentiment de Galilée qui n’a point encore été envoyé et notifié à l’Université de Paris, oblige-t-il les professeurs de cette Faculté, plus que le jugement porté par le concile de Paris et le pape Grégoire IX contre certains livres d’Aristote ? »

Dès 1641, Launoy inaugura les critiques qui lui ont valu la réputation de « dénicheur de saints et de destructeur des privilèges monastiques ». Il intervint dans la question soulevée par le P. Sirmond dans ses Concilia antiqua Galliæ (1639) : Denys l’Aréopagite n’est pas l’apôtre de Paris ; en faveur de cette thèse, Launoy publia quatre dissertations. Launoy attaqua également la tradition provençale de la venue et du séjour dans le midi de la France de Lazare, Maximin, Marthe et Madeleine ; il contesta et discuta vivement l’authenticité des bulles de Jean XXII et d’Alexandre V sur les privilèges du scapulaire après la vision de saint Simon Stock ; il combattit certaines traditions des chartreux relatives à la vie de saint Bruno ; il fit une critique très sévère des privilèges monastiques des religieux de Saint-Germain-des-Prés, de Saint-Médard de Soissons, des prémontrés ; enfin il composa trois dissertations pour montrer que la Gaule n’avait été évangélisée que dans la seconde moitié du iie siècle. Cette œuvre critique de Launoy a été diversement jugée. Les Remarques sur le dictionnaire de Bayle disent que Launoy « écrivait beaucoup et ne pensait pas assez…, ses ouvrages sont difficiles à lire, remplis d’érudition et de citations très longues. » Dans les Mélanges d’histoire et de littérature, recueillis par Vigneul Marville, 2 vol. in-12, Rouen, 1700, on dit que « Launoy soutenait les plus mauvaises causes avec opiniâtreté. » Par contre, le Journal des savants du 13 juin 1701, p. 265, dit : » Son caractère particulier était d’aimer la vérité sur toutes choses, de la chercher sans prévention, de la découvrir librement, quand il l’avait trouvée : vixit amans veri, falsi osor, certus et judex. »

Au point de vue théologique proprement dit, Launoy a étudié en particulier l’autorité et l’infaillibilité du pape, l’Immaculée Conception et l’Assomption de la sainte Vierge et surtout les sacrements.

Launoy n’a composé aucun traité sur l’infaillibilité pontificale ; mais dans sa volumineuse correspondance, il en parle souvent et il proteste énergiquement contre cette infaillibilité ; il soutient la supériorité du concile, attaque avec violence les adversaires de sa thèse, spécialement Cajétan, et surtout Bellarmin. Ces lettres se trouvent presque toutes au t. v des Opera omnia et ont été éditées sous le titre : Epistolæ omnes, octo partibus comprehensæ, 8 vol. in-8o, Paris, 1664-1073, rééditées en 1689, en un volume in-fol. à Cambridge, cum præfatione apologetica pro reformatione Ecclesiæ anglicanæ. La Bibliothèque universelle et historique de l’année 1690, p. 237-287, donne une analyse détaillée des 82 lettres qui combattent l’autorité des papes au nom de l’histoire, discutent les thèses de Bellarmin et les passages de l’Écriture sur lesquels on prétend appuyer l’infaillibilité du pape.

Dans ses Præscriptiones de conceptu B. Virginis, in-12, Paris, 1676 et 1677, Launoy expose diverses opinions touchant l’Immaculée Conception, qui n’est point un dogme de foi et qui paraît même contraire aux paroles de l’Écriture et aux sentiments de plusieurs théologiens. En 1709, parut un vol. in-4o ayant pour titre : Réfutation d’un libelle imprimé en 1676 qui a pour titre : Prescription touchant la conception de Notre Dame. L’auteur n’entreprend point de prouver la vérité de la Conception immaculée qui, dit-il, est un mystère, mais il veut montrer que Launoy s’est très certainement trompé, et, pour le prouver, il réédite le traité de Launoy avec la réfutation. Journal des savants, du 10 juin 1709, p. 353-357.

En 1668, le chapitre de Notre-Dame décida d’insérer de nouveau au martyrologe de Paris le texte du martyrologe d’Usuard qui s’y trouvait jusqu’au xvie siècle, au sujet de la Dormition de la sainte Vierge. Usuard dit que le corps de la sainte Vierge ne se trouve pas sur la terre, mais l’Église, dans sa sagesse, a déclaré qu’elle ignore où se trouve son corps. Launoy justifia la décision du chapitre dans sa Controversia super conscribendo Parisiensi Martyrologio exorta, ubi de Dormitione et Assumptione Virginis agitur, in-8o, Laon, 1670, et 1671. Launoy fait remarquer que le mot Assomption peut se rapporter à l’âme aussi bien qu’au corps. La thèse du critique fut attaquée par Jacques Gaudin, docteur de Sorbonne, dans Assumptio Mariæ virginis vindicata, in-12, 1672, et par Nicolas Ladvocat Billiad dans Vindiciæ Parthenicæ, in-12, 1670 ; tandis que Claude Joly, chantre de Notre-Dame, répondait au premier : Traditio antiqua Ecclesiarum Franciæ de verbis Vsuardi ad festum Assumptionis B. M. B. vindicata adversus Jacobum Gaudinum, in-12, Sens, 1672 ; Launoy réfutait le second : Diversi generis erratorum quæ in Parthenicis Nicolai Advocati Billiadi Vindiciis exstant specimen, in-8o, Paris, 1671.

Enfin Launoy a étudié les sacrements au point de vue historique. Il ne parle que très incidemment du baptême dans son ouvrage intitulé : De vera notione plenarii apud Augustinum concilii in causa rebaptizantium dissertatio, in-8o, Paris, 1644, 2e édit., 1662, 3e édit., 1666, et dans les diverses Dissertationes qu’il composa pour défendre ses positions attaquées par le dominicain Nicolaï et Jean David, abbé commendataire des Bons-Hommes-lez-Angers.

Launoy s’est occupé du sacrement de pénitence dans son travail : De mente concilii Tridentini circa satisfactionem in sacramento pænitentiæ dissertatio, in-8o, Paris, 1644. L’auteur prouve, contre les thèses jansénistes, que, d’après le concile de Trente et la pratique de l’Église, l’absolution dans le sacrement de pénitence peut précéder la satisfaction, laquelle n’est pas obligatoire avant l’absolution. L’ouvrage semble avoir fort embarrassé les jansénistes et G. Hermant. dans ses Mémoires, édit. Gazier, t. i, p. 300, dit simplement : « Cet écrit ne parut pas assez important pour y répondre et on le négligea comme plusieurs autres. » Launoy compléta d’ailleurs sa thèse antijanséniste