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LAYMANN — LAZARISTES (CONGRÉGATION DES)

de pair et que Scheeben (Katholik, 1807, p. 163) pour la profondeur de l’érudition, et nous pourrions ajouter pour la rigueur de la méthode, ne trouvait à comparer qu’aux Controverses de Bellarmin. L’ouvrage parut en cinq volumes in-4°, sous ce titre qui en résume bien l’esprit. Theologia moralis in quinque libros partita, quibus materiæ omnes practicæ, cum ad externum Ecclesiasticum, tum internum conscientiæ forum spectantes, nova methodo explicantur, Munich, 1625. Dans la manière d’envisager et de poser les questions, de dégager le point précis de la difficulté, plus encore dans le contrôle, le groupement, la discussion lucide et serrée des textes, le grand moraliste faisait œuvre non seulement d’érudition, mais de vraie science, et établissait plus solidement qu’on ne l’avait fait avant lui la morale sur ses bases naturelles. Le succès fut prodigieux. Les éditions de Munich, Paris, Venise, Anvers, Douai, Lyon, Mayence, Bamberg, etc., se succédèrent rapidement. Les meilleures sont celles qui reproduisent la troisième édition de Munich, 1630, revue par l’auteur. Ce grand ouvrage était pour les maîtres. Un Compendium theologiæ moralis, Lyon, 1631, rédigé en partie par l’auteur, en partie par le théologien Antoine Goffar, vulgarisa parmi les étudiants des Universités la doctrine de P. Laymann.

Les mêmes qualités de science, de profondeur, de clarté, d’impeccable méthode, se retrouvent dans son Jus canonicum sive commentaria in libros Decretalium, Dillingen, 1666. Cet ouvrage, en trois volumes, publié après la mort de l’auteur, est malheureusement incomplet, les manuscrits qui auraient fourni la matière des t. iv et v ayant disparu, consumés vraisemblablement dans une incendie. On trouvera dans Sommervogel la liste complète des traités et opuscules de Laymann sur les sujets les plus divers de philosophie et de théologie morale. Notons que la brochure : Processus judiciarius contra sagas, parue à Cologne en 1629, n’est pas de lui. Dans sa Théologie morale, Laymann s’efforce, après Tanner, d’adoucir ce qu’il y avait d’inhumain dans les procédés judiciaires dont on usait alors contre les sorciers et les jeteurs de sort ; il était loin d’incliner aux fureurs barbares.

Ame candide, s’il en fut, pieuse et bonne, éprise uniquement de science théologique et des choses du ciel, le P. Laymann, après une vie d’infatigable labeur, mourut à Constance, atteint de la peste, le 13 novembre 1625.

Sommervogel, Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, t. iv, col. 1582-1594 ; Hurter, Nomenclator, 3e édit., t. iii, col. 884-886 ; articles du P. Duhr dans Zeitschrift für katholische Theologie, t. xxiii, p. 733-743 ; t. xxiv, p. 585-592 ; t. xxv, p. 166-168.

P. Bernard.

LAZARE, moine grec et controversiste de la fin du xiiie siècle. — A. Ehrhard dans K. Krumbacher, Geschichte der byzantinischen Litteratur, 2e édit., Munich, 1897, p. 114, fait de Lazare un évêque dont il place l’existence dans la première moitié du xve siècle. C’est une double erreur. C. Simonidès affirme, il est vrai, que Lazare devint évêque, mais ceux qui connaissent les audaces de l’impudent faussaire savent quel cas il convient de faire de ses affirmations. Que notre polémiste ait vécu sous le règne de Michel VIII Paléologue (1261-1282), ses écrits mêmes le prouvent. Ils contiennent à chaque page des allusions transparentes au maître du jour, allié de l’Italien maudit, persécuteur de la foi orthodoxe, parvenu au pouvoir par le meurtre du souverain légitime, et ne s’y maintenant qu’en opposant un patriarche à l’autre pour mieux soutenir l’hérésie des Francs. Tous ces traits conviennent fort bien à Michel Paléologue et ne peuvent dans leur ensemble ne s’appliquer qu’à lui, comme l’a fort bien prouvé Ch. I. Papaioannou, l’éditeur des œuvres de Lazare, dans l’Ἐκκλησιαστικὸς Κῆρυξ, t. i, (1911), p. 344-348. A une objection soulevée par l’archimandrite Ézéchiel Bélanidiotes, ibid., p. 419-420, au sujet du métropolite Jean de Naupacte, destinataire de deux lettres de Lazare, et d’après laquelle il faudrait reporter la composition de ces lettres avant l’année 1232, Ch. Papaioannou, tout en maintenant ses premières affirmations, n’a su que répondre, ibid., 449-452, ne connaissant aucun prélat du nom de Jean qui ait occupé le siège de Naupacte sous Michel Paléologue. Nous sommes en mesure de tirer d’embarras le sympathique éditeur en lui signalant qu’effectivement vivait à Naupacte en 1272, c’est-à-dire à l’époque voulue, un évêque du nom de Jean. Voir Fr. Miklosich et Jos. Muller, Acta et diplomata græca medii ævi, t. iv, Vienne, 1871, p. 379. Par suite l’objection de l’archimandrite Ézéchiel tombe d’elle-même.

Il nous reste de Lazare cinq lettres et le début d’un ouvrage de controverse, qui dut avoir, à en juger par ce qui nous en reste, d’assez vastes proportions. La première lettre, adressée à l’évêque de Larissa, avait déjà été publiée par C. Simonidès dans son édition de Nicolas de Méthone, Londres, 1858, 2e édit., ibid., 1865, p. 215-218. C’est la seule que signale A. Ehrhard dans l’ouvrage cité plus haut. La seconde a pour destinataire le métropolitain de Thessalonique : la troisième, le moine Arsène, du monastère d’Acapniou, également à Thessalonique. Les deux autres sont adressées à Jean Xéros, métropolitain de Naupacte. Dans un dernier traité, dont le début seul subsiste, l’auteur essaie de montrer que les Latins étant hérétiques, on ne saurait entrer en communion avec eux sans trahir la vraie foi. Là comme dans ses lettres il s’élève avec vigueur contre l’union conclue au concile de Lyon. Tous ces opuscules ont été publiés par Ch. I. Papaioannou, d’après le ms. 34, fol. 45-61, de l’archevêché de Chypre, dans l’Ἐκκλησιαστικὸς Κῆρυξ, t. cit., p. 413-419, 443-449.

L. Petit.

LAZARISTES (CONGRÉGATION DES). —

La congrégation de la Mission, dite des Lazaristes à cause du prieuré de Saint-Lazare, où elle établit sa maison mèredèsl632, s’honore d’avoir pour fondateur saint Vincent de Paul. Bien que ce grand saint soit surtout connu par ses institutions charitables et qu’il n’ait laissé d’autre écrit théologique qu’un petit traité manuscrit sur la grâce, il a sa part, et une part considérable, dans l’œuvre de la conservation et de la diffusion de la foi. Par son action personnelle contre les hérésies de son temps, protestantisme et jansénisme, par son rôle au Conseil de Conscience, par la fondation de ses deux Instituts, missionnaires et Filles de la Charité, par ses entretiens aux prêtres de la Conférence des mardis, qui formaient l’élite du clergé de Paris, par l’institution des séminaires, il a préparé les uns à bien donner les enseignements de l’Église et disposé les autres à les bien recevoir.

Quoi qu’on en ait dit dans les milieux jansénistes, saint Vincent avait en haute estime la science et les savants ; n’avait-il pas lui-même passé à l’Université de Toulouse les examens du baccalauréat en théologie, qui lui donnaient le droit d’enseigner le Maître des Sentences, et à l’Université de Paris la licence en droit canon ? Ses conseillers les plus écoutés n’étaient-ils pas d’éminents docteurs de Sorbonne ? Ce qui a pu donner le change sur ses vrais sentiments, c’est qu’il met toujours la vertu au premier rang et qu’il considère la science sans la vertu comme pratiquement stérile et même dangereuse. « Il faut de la science, disait-il aux siens, et malheur à ceux qui n’emploient pas bien leur temps ! Mais craignons, craignons, et, si j’ose dire, tremblons et tremblons mille fois plus que je ne saurais dire ; car ceux qui ont de l’esprit ont bien à