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LOCKE — LŒ

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Tolérance de l’État à l’égard des Églises, des Églises entre elles et des membres d’une Église envers leurs coreligionnaires, voilà donc la liberté individuelle assurée, du moins en principe.

Mais l’application de la tolérance dans la vie pratique impose cependant certaines restrictions. Il importe de distinguer le domaine des rites et celui de la doctrine. Pour les rites, l’État n’a aucun droit de les commander ni de les interdire. Quant aux doctrines en tant qu’elles sont d’ordre spéculatif, l’État n’a pas à s’en mêler ; mais, en tant qu’elles regardent la morale, elles intéressent l’État et l’Église tout à la fois. Ici l’autorité civile peut tracer des limites à la tolérance. N’ont, pour Locke, aucun droit à être tolérés ni ceux qui menacent les bases morales de la société et, partant, la paix publique, ni une Église vouée, comme l’Église catholique, à la protection et au service d’un prince étranger, ni ceux enfin qui nient l’existence de Dieu parce que les promesses, contrats et serments, qui sont les liens de la société humaine, n’ont pas de prise sur un athée. C’est ainsi que Locke réalise ce paradoxe de sauver, sous le pavillon de la religion naturelle, toutes les religions sauf la religion catholique et de fonder sur la tolérance sa propre intolérance vis-à-vis de cette dernière.

Conclusion. — Dans l’ensemble, la pensée de Locke offre bien des points de contact avec le déisme qui remplissait alors l’atmosphère intellectuelle de l’Angleterre. Mais le ranger purement et simplement dans cette école nous est déjà interdit par le fait qu’il a trouvé des disciples et des admirateurs parmi les adversaires du déisme.

C’est qu’au fond il poursuivait un tout autre but. Alors que le déisme s’attachait à établir l’inutilité d’une révélation surnaturelle et à combattre la religion officielle, Locke croyait apporter à celle-ci l’appui le plus efficace. D’une part, il a assuré les bases philosophiques du déisme en rendant exclusivement rationnelle la connaissance de Dieu, et en soumettant pratiquement la révélation au contrôle suprême de la raison, ce que le déisme après lui n’a pas manqué de souligner. D’autre part, tout en accordant qu’une religion naturelle peut suffire à ceux qui ne connaissent pas le Christ, il insiste néanmoins sur la nécessité de la mission du Christ, qui a d’abord réalisé dans sa plénitude la religion naturelle, et en outre élevé la morale naturelle à une perfection où elle ne serait jamais arrivée sans le christianisme.

Au total, si Locke diffère du déisme classique par une attitude moins hostile à l’égard du christianisme, il n’en a pas moins contribué à accréditer, surtout parmi les théologiens, la supériorité de la raison sur les révélations positives, et par là c’est dans le sens général du déisme que son influence s’est exercée. Voir Déisme, t. iv, col. 532-2-13 et Christianisme rationnel, t. ii, col. 2415-2417.

I. Éditions.

Les œuvres complètes de Locke ont été éditées à Londres en 1714, puis en 1722 en trois volumes, ensuite en 1777 en quatre volumes par l’évêque Edm. Law ; d’autres éditions ont suivi en 1801, 1812, 1823, etc. Malgré ses lacunes, cette dernière édition reste toujours la meilleure. — Une autre édition en neuf volumes a paru à Londres en 1853. — Les œuvres philosophiques ont paru dans une édition annotée par St. John en deux volumes, Londres, 1854. — En outre il existe de nombreuses éditions des divers traités. L’ouvrage principal, An essai) concerning human Underslanding, en quatre livres, parut d’abord à Londres en 1690, puis en 1694, 1697, 1700, etc. L’édition de Campbell Fraser, deux volumes, Oxford, 1894, donne seule les variantes et additions successives des quatre premières éditions. — Coste a traduit l’Essai en français d’après la quatrième édition et sous la direction de l’auteur, Amsterdam, 1700, 1729, etc. — The Rcasonableness of Christianity as delivcred in the Scriptures, édité en 1695 ; une traduction française a paru à Amsterdam en 1691 et a été rééditée

depuis à plusieurs reprises. Voir aussi Thurot, Œuvres phi losophiques de Locke, 7 tomes, Paris, 1821-1825. — Some thoughts concerning éducation, Londres, 1693, etc. ; traduction française par Coste, Amsterdam, 1705. — La première des Epistolie de tolerantia parut à Gouda (Hollande) en 1689, en latin ; la deuxième en 1690, la troisième en 1692. La quatrième, rédigée en 1704, a été publiée en 1700 dans les (Euvres posthumes.

Les Poslhumous Works, Londres, 1706, contiennent entre autres : A discourse of miracles, An examination of Malebranclie’s opinion of seeing ail things in God, The conduct of the Underslanding, some familiar lelters belween Mr Locke and several of his friends.

Il faut compléter les Œuvres par les fragments et les lettres publiés par King, Life and Lelters of John Locke, Londres, 1829 et 1830 ; Fox Bourne, Life of John Locke, Londres, 1876 ; enfin la Collection of several pièces of J. Locke éditée par Desmaizeaux, Londres, 1720 ; Thom. Forster, Original letters of Locke, Sidney and Shaftesburꝟ. 2’édit., Londres, 1847 ; Lettres inédites de John Locke à ses amis N. Thoynard, Ph. van Limborch et Edw. Clarke, publiées par H. Ollion, avec la collaboration du Dr. F. de Boer, La Haye, 1912.

On trouvera la liste complète des ouvrages de Locke dans H. Marion, J. Locke, sa vie et son œuvre, Paris, 1878, et dans Ed. Fechtner, John Locke, Stuttgart, 1898.

IL Études. — On consultera : 1° pour les diverses interprétations du système de Locke : V. Cousin, La philosophie de Locke, 4e édit., Paris, 1861 ; de Rémusat, Histoire de la philosophie en Angleterre depuis Bacon jusqu’à Locke, Paris, 1875, voir t. n ; Kuno Fischer, Bacon und seine Nachfolger, 2e édit., Leipzig, 1875 ; Leslies Stephen, History of the english Thoughl in the XVIII cent., Londres, 1876, voir t. i ; A. Riehl, Der philosophische Kriticismus undseine Bedeutung fiir die positive Wissenschaft, Leipzig, 1876, voir surtout t. i ; E. Lyon, L’idéalisme en Angleterre, Paris, 1888 ; du même, Enseignement et religion, Paris, 1907 ; G. v. Hertling, Locke und die Scliule von Cambridge, Fribourg, 1892 ; V. Kuppers, John Locke und die Scholaslik, Berlin, 1895 ; E. Krakowski, Les sources médiévales de la philosophie de Locke, thèse, Paris, 1915.

2° Parmi les études analytiques : E. Worcester, The religious opinions of Locke, Leipzig, 1800 ; K. Fischer Die Religionsphilosophie des John Locke, Berlin, 1893 ; H. Ollion, La philosophie générale de John Locke, Paris, 1908 ; E. Crous, Die religionsphilosophischen Lehren Lockes und ihre Stellung zu dem Deismus seiner Zeil, Halle, 1910, dans Abhandlungen zur Philosophie und ihre Geschichte, t. xxxiv.

A. Bœhm.

LŒ (Godefroid de), dans le monde Godefroid Matthieu, théologien carme du xve siècle, fut nommé de Loe ou de Loo, parce qu’il naquit à Tessenderloo, village du Limbourg belge. Un fait d’histoire, qu’il s’agit d’éclaircir, exige la liste complète des dates qui vont suivre.

En 1412, Godefroid prit l’habit de carme au couvent de Malines, le XVIe dimanche après la Trinité (18 sept.) ; l’année suivante, il prononça ses vœux et fit ses études à Malines, à Bruxelles et à Cologne ; en 1422, IVe dimanche après Pâques, le chapitre provincial l’élut maître des étudiants à Cologne, où il devint, en 1423, sous-prieur et maître des novices ; ensuite, il fut lecteur des Sentences au couvent de Trêves en 1424 et 1425 et au couvent de Boppard (Hunsrùck) en 1426 ; en 1427, il devint prieur du couvent de Malines et, en 1428, lecteur de théologie à Cologne En 1430, il occupe la chaire d’Écriture sainte à l’université de Cologne et est promu au baccalauréat biblique. En 1432, il est élu second définiteur provincial de la province de l’Allemagne inférieure (qui comprenait les couvents rhénans, belges et hollandais) ; en 1433, il devint premier lecteur de théologe au couvent de Kreuznach (Hunsrùck) ; l’année suivante (1434), il revint à Malines en qualité de prieur et de régent, puis alla se présenter à l’université de Cologne pour les grades de licencié et de docteur en théologie qu’il obtint au cours de cette même année de 1434. Au chapitre provincial, tenu à Cologne le 1 er mai 1435, il est