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tions du sacerdoce ; ils n’approcheront point de toutes mes choses saintes dans les lieux saints ; ils porteront leur opprobre etla peine des abominations qu’ils ont commises. Je les chargerai du service de la maison, pour tout son ouvrage et pour toute œuvre qu’il faudra y faire. » Ces prêtres destitués de leurs fonctions sacerdotales, mis au rang de portiers, de desservants de la maison, sont très probablement ces prêtres des hauts-lieux que Josias avait réunis à Jérusalem de toutes les villes de Juda, IV Reg., xxiii, 8-9. Faut-il conclure de ce texte, qu’avant Ézéchiel, tous les lévites étaient prêtres, et que désormais ceux d’entre eux qui avaient servi devant les idoles infâmes, seraient réduits à un service subalterne et constitueraient une nouvelle catégorie de ministres sacrés d’un rang inférieur ? Pas nécessairement. Dire que les prêtres infidèles seront déchus de leur dignité et de leurs fonctions pour devenir de simples lévites, desservants de « la maison », ne contredit pas l’existence de cette catégorie de serviteurs subalternes antérieurement au châtiment dont il est parlé ; l’organisation même du service du temple devait certainement comporter une telle catégorie de ministres du culte ; n’est-ce pas ce que le prophète indique lui-même au c. xl, 45, lorsqu’il mentionne à côté des fils de Sadoc, chargés du service de l’autel, un. autre groupement de ministres, employés aux offices plus bas. Mais s’il en est ainsi, si Ézéchiel connaît déjà l’organisation de la tribu lévitique en deux classes, comment se fait-il que dans son système de restauration du culte, les lévites soient uniquement les anciens prêtres idolâtres, destitués de leurs fonctions sacerdotales ? Ez., XLvni, Il et xliv, 10-14. C’est ici qu’il y a lieu de remarquer l’élément symbolique du programme de restauration religieuse entrevu par le prophète et décrit à l’aide de traits historiques. Cf. la description du temple. Ez., xl-xlii. Tradition historique, législation existante servent à Ézéchiel dé matériaux pour l’élaboration de son tableau idéal du nouveau royaume de Dieu. « Dans le culte réformé dont le prophète nous trace le tableau grandiose et mystérieux, la répartition des fonctions sacrées aura une signification morale ; c’est la dignité, le mérite, la sainteté des ministres qui servira de base à l’organisation hiérarchique. Le souvenir des infidélités d’un grand nombre de prêtres était encore présent à toutes les mémoires ; les bâmôth avaient vu les membres de la tribu de Lévi offrir aux faux dieux un encens idolâtre. Ces défections fournissent à Ézéchiel un trait important, sur lequel il revient avec plus ou moins d’insistance à plusieurs reprises de son rituel idéalisé ; les prêtres appelés à s’approcher de l’autel seront ceux qui restèrent fidèles au milieu de l’apostasie de la maison d’Israël et qui sont désignés comme fils de Sadoq ; les ministres d’ordre inférieur seront ces prêtres, ces lévites, qui ont prêté aux Israélites coupables le concours sacrilège de leur ministère. La vocation au service de l’autel, l’obligation de rester au service de « la maison », deviennent une récompense et un châtiment de signification morale, indépendamment de tout titre généalogique. » A. van lloonacker, Les prêtres et les lévites dans le livre d’Ézéchiel, dans la Revue biblique, 1899, p. 186.

Du silence d’Ézéchiel sur le grand prêtre, on a conclu qu’il ignorait totalement son existence et que l’institution d’un pontificat suprême était une création artificielle du Code Sacerdotal. Maints passages pourtant des livres de Samuel et des Rois font mention de personnages, qui, soit par leur rôle ou leurs fonctions, soit par leur titre, apparaissent, sinon identiques au grand prêtre dont le Lévitique décrit la consécration et les fonctions en la personne d’Aaron, du moins comme jouissant d’une situation privilégiée qui les

met au-dessus des simples prêtres. Amos, vii, 10 ; I Reg., xxi, 1, 2 ; xxiii, 9 ; II Reg., viii, 17 ; xv, 27, 35 ; III Reg., i, 7, 8 ; IV Reg., xi, 10, 15 ; xii, 10 ; xvi, 10, 11, 15, 10 ; xxii, 4, 8, 10 ; xxiii, 4. Cf. Lesêtre, art. Grand prêtre dans Vigouroux, Dictionnaire de la Bible, t. iii, col. 295-308.

L’étude enfin des redevances dues aux prêtres et aux lévites montrerait également que tout ce qu’on trouve à ce sujet dans le Lévitique n’est point le fait d’innovation récente.

2. Le rituel des sacrifices.

Si livres historiques et anciens documents du Pentateuque connaissent les sacrifices, on n’y voit nulle part observer le rituel minutieux du Lévitique ; ni le choix des victimes, ni le mode de leur immolation, ni le but de leur offrande n’y apparaissent avec l’importance que leur donne le Code Sacerdotal. Bien plus, la façon même dont les prophètes antérieurs à l’exil, Amos surtout et Jérémie, parlent du formalisme de leurs contemporains dénote, à l’endroit des prescriptions rituelles, une indépendance qui n’est guère compatible avec l’existence de la législation rigoureuse des premiers chapitres du Lévitique. Cette parole de Jahvé, rapportée par le prophète Osée : « J’aime la piété et non les sacrifices ». vi, 6, résume bien l’attitude du prophétisme, ignorant une telle législation, œuvre d’époque tardive, non seulement dans sa rédaction, mais encore dans son esprit et dans l’institution d’un certain nombre de ses rites les plus importants.

Notons d’abord que l’attitude des prophètes, hostiles à des manifestations d’une piété purement extérieure et nullement sincère, n’est point la condamnation d’un culte extérieur jugé inutile et même nuisible, et ne contredit pas par conséquent l’existence, à leur époque, d’une législation des sacrifices. Ne pourrait-on d’ailleurs, avec autant de raison, faire remarquer que ces protestations énergiques contre un formalisme excessif sont « une preuve péremptoire que les rites existaient, puisque les prêtres et le peuple y attachaient plus d’importance qu’aux dispositions intérieures ». E. Mangenot, L’authenticité mosaïque du Pentateuque, Paris, 1907, p. 257. Le fait que dans Amos, v, 21. 22 les différentes espèces de sacrifices ou offrandes sont nommées suivant l’ordre où elles se présentent dans le dispositif du Lévitique, i-hi, souligne encore la portée de cette remarque. A. van Hoonacker, Les douze petits prophètes, Paris, 1908, p. 248-249.

Quant aux innovations de la Thora des sacrifices, qui la première, mais bien tardivement, distinguerait quatre espèces de sacrifices : holocauste, sacrifice pacifique, sacrifice pour le péché et sacrifice pour le délit, il faut tout d’abord observer d’une manière générale que, si les textes législatifs du Lévitique sont les seuls à traiter longuement de certains rites et sacrifices, il ne s’ensuit pas nécessairement que les rédacteurs de ces textes, dans l’hypothèse même où ils seraient de basse époque, aient imaginé de toutes pièces les institutions qu’ils décrivent. De nombreuses allusions aux différentes espèces de sacrifices, aussi bien dans les livres historiques que prophétiques, l’établissent nettement.

Non seulement l’holocauste est le sacrifice le plus ancien, en usage dans l’antique Israël, Gen., xxii 13, et aux jours de Moïse, dans le pays de Madian et celui de Moab, comme on le voit par l’histoire de Jéthro et celle de Balaam, Exod., xviii, 12 ; Num., xxiii, 1, 13, mais certains détails mêmes de son cérémonial, Lev., i, 11, porteraient la marque d’une très lointaine origine : » La coutume d’immoler en dirigeant vers le Sud la tête de l’animal, remonte à la plus haute époque, si l’on en juge par les pratiques arabes. Les nomades immolent, en général, devant la porte