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LEONCE DE BYZANCE. C II R ISTOLOGIE
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cette hypostase, l’âme est substance parfaite TeXeta, le corps est substance parfait c. Si on peut les dire imparfaits àxeX ?), c’est seulement en les rapportant au tout, c’est-à-dire à l’homme dont ils sont les parties. Il en est ainsi de l’union christologique. Le Christ est un composé dont le Verbe et l’humanité sont les parties, parties complètes, distinctes, parfaites dont le résultat est une seule hypostase, et non point une nouvelle substance. Ni d’un côté, ni de l’autre, les propriétés respectives des composants n’ont subi de détriment. Le Verbe est à son humanité ce que l’âme est au corps. De même que l’âme demeure invisible et immortelle dans son union au corps visible et mortel, de même le Verbe en s’unissant à son humanité. Et de même que l’àme, quoique étant substance parfaite, n’est pas à elle seule l’homme parfait, ainsi le Verbe, quoique parfait, n’est pas à lui seul, le Christ parfait. Col. 1280-1281. Le Christ, c’est les deux natures, divinité et humanité, comme l’homme, c’est les deux natures, âme et corps.

Les sévériens prétendaient épuiser la comparaison : puisqu’on dit de l’homme qu’il est une nature, bien qu’il ait deux natures, ainsi doit-on dire du Christ qu’il est une nature. Si on ne veut pas dire que le Christ est une nature, alois ce n’est pas deux, mais trois natures qu’il faut enseigner dans le Christ. le Verbe, l’âme et le corps. — Si l’on peut appeler l’homme une nature, répond d’abord Léonce, ce n’est pas en regardant sa constitution intrinsèque, mais en considérant le type spécifique unique identique en tous les hommes et réalisé intégralement en chacun d’eux. Et comme il n’y a pas d’espèce christique (XpiaTÔTrjç), on ne peut dire du Christ qu’il est une nature. Cette argumentation se trouve aussi chez plusieurs Pères postérieurs, notamment chez saint Jean Damascène. Voir ci-dessur, t. viii, col. 732-733. Mais qui ne voit que le fait pour le composé humain d’appartenir à une collectivité d’êtres semblables ne constitue en vérité, qu’une différence accidentelle avec le composé christologique et n’affaiblit en rien le fond de la comparaison ? Quant à l’autre membre de l’objection, qui concerne les trois natures, Léonce le repousse en disant que l’âme et le corps ne sont pas des parties du Christ, mais les parties d’une partie à savoir de la nature humaine qu’il sufïit de nommer elle seule pour désigner en même temps tout ce qu’elle contient. Diviser et subdiviser les parties est contraire à la brièveté dogmatique, vain et ridicule. Col. 1289-1297. La ressemblance des deux compositions, anthropologique et christologique, se poursuit dans les rapports qui naissent respectivement de l’une et de l’autre. Comparez l’âme à une autre âme, l’âme à son corps et l’homme au corps et à l’âme. L’âme comparée à une autre âme lui est unie par l’identité d’essence, et en est distincte par la raison d’hypostase ; comparée à son corps, elle en est séparée par la différence de nature, et lui est unie par l’identité d’hypostase ; l’homme, comparé à un corps sans âme, ou à une âme sans corps, est tout entier complètement séparé d’eux, mais rapporté à l’âme et au corps, ses propres parties, il fait avec eux quelque chose de commun. Ainsi le Verbe, comparé au Père, lui est uni par l’identité de nature et en est distinct par la raison d’hypostase ; comparé à la chair, il en est distinct par la diversité de nature et lui est uni par l’identité d’hypostase ; et le Christ comparé au Verbe et à nous, comme un tout composé de parties, tient le milieu entre ces deux termes, tout entier hypostase vis-à-vis de son Père avec son humanité à cause de sa divinité, tout entier hypostase vis-à-vis de nous avec sa divinité à cause de son humanité, ayant en lui-même des rapports inverses de ceux qui le relient au Père et à nous, puisque, vis-à-vis du Père

et de nous, il est uni par la nature et divisé par l’hypostase, et qu’en lui-même, il est un quant à l’hypostase et divisé quant à la nature. Col. 1288-1289.

La composition christologique que présente Léonce apparaît donc comme calquée sur la composition anthropologique. Ce n’est pas qu’il n’y ait entre elles quelque différence. Tout d’abord, le Verbe est de tout point parfait et source de perfection, l’âme ne l’est qu’au sen., de substance complète. Col. 1281 CD. De plus, le Verbe a piéexisté à l’humanité ; Léonce ne dit pas clairement si dans l’homme, une partie préexiste à l’autre, mais il exclut formellement cette circonstance de la comparaison. Col. 1280 D. Enfin, parce que le Verbe est essentiellement impassible, il demeure étranger aux passions de l’humanité ; tandis que l’âme, parce qu’elle est déjà passible en elle-même, ressent en outre les passions corporelles. Mais ces différences, qui tiennent uniquement à la condition des parties, accompagnent seulement l’union hypostatique, et sont en dehors de son essence. Le seul détail qui établirait une différence intrinsèque entre les deux compositions, est celui-ci, que l’hypostase humaine est accomplie par la vie mutuelle de l’âme et du corps, rçv t àXKrko~jyoç, Çayi) àTtexéXeae. Mais Léonce ne fait que le signaler en passant, sans songer à le relever, plus occupé à justifier l’emploi de la comparaison anthropologique qu’à en indiquer les limites. Notons, pour finir, que si notre auteur a pu pousser si loin cette comparaison, c’est à sa conception toute platonicienne du composé humain qu’il le doit. Quand, plus tard, au temps d’Anastase le Sinaïte, l’anthropologie aristotélicienne aura prévalu chez les théologiens orthodoxes, l’analogie de l’âme et du corps n’aura plus auprès d’eux la même faveur.

3. Effets et conséquences de l’union christologique. — a) La communication des idiomes (àvTÎSoaiç tûv tSito(i.aTCOv). — La communication des idiomes consiste, selon Léonce, dans l’appellation, la désignation du tout par l’une de ses parties, et réciproquement dans la désignation des parties par le tout. « Selon les Écritures et les pensées des Pères, souvent nous appelons le tout par la partie et les parties par le nom du tout, comme par exemple en nommant le Verbe (qui est une partie, au lieu du Christ qui est le tout) Fils de l’homme, et en confessant que le Seigneur de gloire a été crucifié. Mais cependant nous ne supprimons point par cette communication des idiomes l’essence propre de la propriété de chaque partie dans l’identité. Car cela nous est connu par la propriété des noms, puisque, tandis que c’est dans l’hypostase que nous contemplons cette communication des idiomes, c’est dans la différence des natures que nous reconnaissons la propriété, ISiorrçç, que chaque partie a dans la communauté. » Col. 1285 C. Léonce nous montre le fondement de cette communication dans l’hypostase qui est unique et non dans la nature qui demeure diverse. Il y a, nous dit-il, cette différence entre les propriétés de la nature et celles de l’hypostase, « qu’aux premières participent proprement les choses de même substance, tandis qu’aux autres participent même des choses d’essence différente, une fois qu’elles sont unies dans la communauté d’être. Cela a lieu dans l’Emmanuel. Comme il n’y a en lui qu’une seule hypostase de la divinité et de l’humanité, ce qui est dit appartenir à l’hypostase est commun à toutes deux ; mais comme il n’y a pas en lui qu’une seule nature, ces propriétés ne lui appartiennent pas comme propriétés de nature : car, bien que tout soit dit appartenir au même comme à un seul, cependant ce n’est pas sous le même rapport ni comme au sujet d’une seule nature. Ainsi, le même est visible et indivisible, mortel et immortel, palpable et impalpable, non pas sous le même rap-