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LÉON VI LE SAGE. SA POLITIQUE ECCLÉSIASTIQUE


blante mise en scène, en demandant à neuf des anciens familiers d’Andronic Doukas d’attester publiquement la trahison du prélat. La colère de Léon était telle, que les métropolites présents crurent devoir solliciter sa clémence en lui représentant que le bannissement d’un patriarche était une peine suffisante. Vita Euthym., xiii, 19-21.

De telles révélations décidèrent bien vite le synode à accorder la dispense matrimoniale. Cinq jours ne s’étaient pas écoulés, précise la Vita Euthymii, xiii, 22, que le basileus invita Nicolas à se démettre de sa charge. Celui-ci refusa une première fois. Ibid., 23. Mais l’empereur lui envoya une seconde sommation, par Samonas et les métropolites. Et le prélat donna sa démission par écrit, après avoir lu une lettre de Léon le menaçant d’un procès de haute trahison. Ibid., xiv, 1-7 ; cf. Sp. P. Lambros, Die Abdankungsurkunde des Palriarchen Nikolaos Mystikos, dans Byzantinische Zeitschrift, 1892, t. i, p. 551-554. Peu de temps après, de son propre mouvement, Nicolas, qui ne se sentait pas la conscience tranquille, fit connaître de nouveau par écrit à l’empereur qu’il abandonnait son siège à qui pourrait rétablir la paix de l’Église. Vita Euthym., xiv, 8.

Le choix du successeur fut vite fait. D’un commun accord, les métropolites réclamèrent le moine Euthyme. Celui-ci s’était tenu à l’écart depuis la mort de Baïané-Eudocie, la troisième épouse de l’empereur (Pâques, 900). Après l’attentat de Saint-Mokios (902 ou 903), le basileus s’était réconcilié avec son père spirituel. Euthyme avait même dû alors quitter son couvent d’Agathos et venir passer trois jours au palais. Vita Euthymii, xi, 7. On a vii, par ailleurs, qu’il avait consenti à être parrain du jeune Constantin Porphyrogénète ; mais à cause de ses infirmités, il s’était fait remplacer par Samonas. Lorsque les évêques vinrent au monastère de Psamathia, Euthyme répondit d’abord par un non catégorique. Les prélats insistèrent : lui seul, déclarèrent-ils, était capable de ramener la paix et la concorde dans l’Église. Ils le mirent au courant des actes successifs de démission écrite présentés par Nicolas. Euthyme persista néanmoins dans son refus, xiv, 11-18. Il fallut que l’empereur vînt lui-même à Psamathia. « Euthyme ne se rendit qu’après avoir acquis la certitude que Nicolas avait réellement démissionné et avoir pris connaissance des lettres du pape et des patriarches orientaux autorisant Léon à contracter un quatrième mariage. » De son côté, Léon menaçait de se livrer aux pires excès, y compris l’hérésie, si l’élu s’obstinait à repousser la demande de tous. xv, 1-14. Cédant à ces instances (des légats romains et des représentants des patriarches) et à ces menaces, Euthyme accepta donc le lourd fardeau qu’on lui imposait. Aussitôt l’éclat de ses vertus brilla aux yeux de tous. Sa bonté, sa douceur, sa patience furent au-dessus de tout éloge. Elles désarmèrent des oppositions qui semblaient irréductibles, l’n des plus intrépides adversaires des quatrièmes noces. Arétbas de Césarée, fit sa soumission au nouveau patriarche, subjugué par l’ascendant de sa vertu, et lui voua un attachement inaltérable. * Un certain N’icétas, dit le Philosophe, originaire de l’aphlagonie, qui avait écrit des pamphlets injurieux contre le basileus et contre Euthyme, dut à l’héroïque intervention de celni-ci d’échapper à un châtiment exemplaire, xvi. Dans la question « le la tétragamie. Euthyme, en conformité avec la décision du pape et dis antres patriarches, adopta le parti le plus sage et le plus équitable, Celui que conseillaient le milieu et les circonstances. Il ratifia le quatrième mariage fie Léon ; mais il fut entendu que c’était là une dispense qui ne supprimait en rien la discipline en vigueur dans l’Eglise d’Orient. Pour bien montrer qu’il en était ainsi, il mrefusa absolument à inscrire

dans les diptyques et à proclamer à l’église, selon l’usage, le nom de l’impératrice Zoé. Celle-ci eut beau recourir à la menace, déclarer au patriarche qu’il était sa créature, Euthyme lui répondit fièrement qu’il ne tenait sa charge que de Dieu, et rappela à la parvenue l’humilité de son origine. C’est en vain aussi que Zoé demanda une absolution pour le prêtre Thomas, qui avait béni son union avec Léon et avait été pour ce motif excommunié par le patriarche Nicolas, xvii. » Jugie, op. cit., p. 472-473, résumant les chapitres xivxvii de la Vita Euthymii. Euthyme consentit cependant à couronner solennellement à Sainte-Sophie, le jour de la Pentecôte, 9 juin 911, le jeune Constantin Porphyrogénète, qui n’avait pas six ans. Léo Gramm., P. G., t. cviii, col. 1110 CD ; Syméon Magister, t. cix, col. 773 B, etc. Cet événement pouvait faire croire à Léon VI qu’il était arrivé à ses fins. En réalité, la solution donnée à l’affaire de la tétragamie venait d’ouvrir un schisme dans l’Église byzantine. Clergé et fidèles se divisèrent en partisans d’Euthyme et partisans de Nicolas. Léon dut exiler des évêques et opérer des incarcérations qui contribuèrent encore davantage à envelopper dans une commune réprobation l’empereur, l’Augusta Zoé et le patriarche Euthyme. Vita Euthym., xv, 17. Celui-ci, malgré sa conduite irréprochable et sa douceur, ne parvint pas à se concilier tous les nicolaïtes. Au risque d’augmenter les divisions et au mépris d’une démission plusieurs fois réitérée, l’exilé de Galacrènes n’attendait qu’une occasion propice pour reprendre le siège patriarcal.

4. Les affaires ecclésiastiques après ta mort de Léon. La rupture avec Rome. — La santé de Léon VI allait s’affaiblissant. Au commencement du carême de l’an 912, il ne put pas ou ne put que très difficilement prononcer à la Magnaure l’homélie accoutumée. Léo Gramm., P. G., t. cviii, col. 1117 C ; Georg. Mon., t. ex, col. 1124 A. Il mourut le Il mai de la même année, après avoir recommandé à son frère Alexandre son jeune fils Constantin. Sans doute, Constantin fut proclamé empereur. Mais Alexandre était son associé et tuteur, et les premiers actes de celui-ci furent de chasser Zoé du palais, d’exiler Euthyme au couvent d’Agathos et de rappeler Nicolas au patriarcat. Ces mesures étaient inspirées à Alexandre par ses vieilles rancunes contre la branche aînée de la dynastie, branche qui était, à ses yeux, entachée de bâtardise à tous les degrés. Son « frère » Léon ne s’était procuré, par tous les moyens licites et illicites une descendance mâle que pour le déshériter lui, Alexandre, même après sa mort ! et le patriarche Euthyme avait ratifié ce quatrième mariage et reconnu la légitimité du bâtard Constantin. De là la haine d’Alexandre contre Euthyme, contre Zoé et contre l’enfant que Léon VI mourant lui avait recommandé et que lui, au contraire, par vengeance, voulait faire eunuque. Voir Rambaud. op. cit., p. 8, avec références aux documents.

Quant à Nicolas, son retour d’exil avait attisé sa passion de représailles. « Le vénérable EùthymiOb, fut le premier frappé. Cité à comparaître devant une assemblée tenue au palais de la Magnaure, non seulement il fut déposé et anathématisé. mais Nicolas S’oublia jusqu’à l’injurier bassement, et les serviteurs du patriarche, se jetant sur l’infortuné, déchirèrent ses vêtements sacerdotaux, le renversèrent sur le sol, lui arrachèrent la barbe, lui brisèrent les dents

et finalement le battirent si fort à coups de pied et à

coups de poing, qu’il resta évanoui sur la place et

n’échappa qu’à grand’peine à la moi t. Dlehl, op. cit., p. 209, résumant la Vita Euthymii, xviii, 5-18 ; ix. 1-4.

Après cet exploit, Nicolas alla t riompbaleinent celc brer les saints mystères à Sainte Sophie, emmenant

avec lui la populace, non sans avoir auparavant < les prêtres d’Euthyme, re n v er sé leur sacrifice,