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LÉON I « . SAINT LÉON ÉVÊQUE DE ROME

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trompant les simples par la persuasion pestiférée de certains, a suggéré que le jour du 25 décembre était honoré, non pas tant pour la naissance du Christ, que pour le lever du nouveau soleil, de novi ut dicunt solis ortu honorabilis. Léon condamne cette opinion qu’il qualifie de ténébreuse. Les gens qui l’acceptent sont, dit-il, entraînés encore par les très sottes erreurs de la gentilité, et ils vénèrent d’un honneur divin les astres du monde qui ne sont que des serviteurs. Serm., xxii, 6. On voit, en elïet, dans le calendrier profane du Chrona graphe romain de 354, portée au 25 décembre la fête du Natalis inuicti, et Yinvictus est le soleil, dont la naissance coïncide avec le solstice d’hiver, c’est-à-dire avec le 25 décembre. Mgr Duchesne a pu dire : « Le culte mithriaque et, d’une manière plus générale, le culte du soleil, eut beaucoup de relief et de popularité au nie siècle et au ive siècle. On peut être porté à croire que l’Église romaine choisit le 25 décembre pour faire concurrence au mithriacisme. » Origines du culte, 1898, p. 250. Voir l’excursus Sol inviclus dans mon livre La paix constantinienne et le catholicisme, 1914, p. 69-75.

Sans remonter si haut, on sait que l’astrologie était une superstition fort répandue encore au temps de saint Léon, comme au temps de la jeunesse de saint Augustin. Confess., iv, 3. Le pape dénonce ces hommes qui lotam humanæ vitæ conditionem de stellarum pendere effectibus mentiuntur, et quod est aut divinie voluntatis aut nostrse indeclinabilium dicunt esse fatorum. Serm., xxvii, 3. Rapprocher Serm., xliii, 2 ; lvii, 5 ; Epist., xv, prol. et 10. Cf. Riess, art. Astrologie, p. 18251827, de la Realencyclopâdie de Pauly-Wissowa.

Saint Léon se préoccupe des hérétiques : Pastoralis officii est ne dominico gregi hæretica malignitas noceal prouidere. Il a été informé que des gens d’Egypte, des marchands principalement, sont arrivés à Rome et ont eu le front de prendre fait et cause pour « les abominations commises à Alexandrie par les hérétiques », c’est-à-dire, selon toute vraisemblance, la consécration d’un intrus, Timothée ^Elure (16 mars 457) et le massacre de l’évêque légitime, Protérios (28 mars), Ces gens d’Egypte débarqués à Rome professaient que le Christ n’a qu’une nature, la nature divine, et qu’en lui la chair qu’il tenait de la vierge Marie n’avait aucune « vérité ». Ils abandonnent ainsi l’Évangile, poursuit Léon, et embrassent les mensonges du diable : « repoussez donc tous rapports avec ces ennemis de la foi catholique, ces ennemis de l’Église, ces négateurs de l’incarnation dominicale, ces démolisseurs du symbole institué par les saints apôtres. » Serm., xcvi, 1. Exécrez-les, fuyez-les, et refusez de leur parler, si, repris par vous, ils ont refusé de se corriger. Léon pense à la condamnation d’Eutychès, il entend préserver ses ouailles romaines des Eutychianse impietatis conlagia, et il les félicite d’avoir jusqu’ici par la protection de Dieu été exemplairement attachées à la foi catholique. Ibid., 3. On trouvera des déclarations semblables dans Serm., lxxii, 5 et 7 : la fête de la Résurrection n’est pas pour les hérétiques qui pensent incorrectement de l’incarnation, aut minuendo quod est deitatis, aut evacuando quod est carnis. Ceux qui limitent la part de la divinité sont les adeptes de Nestorius qui est comparé d’ailleurs à Photin, Serm.. xevi, 2, ceux qui évacuent l’humanité sont les monophysites. Les uns et les autres ab Euangelio dissentiu.nl et sijmbolo conlradicunt.

Saint Léon connaît d’autres hérétiques : Basilide, Marcion, Sabellius, Photin, Anus, Eunomius. Serm., xvi, 3. Ailleurs, il énumère Arius, Macédonius, Sabellius, Apollinaire. Serm., xxiv, 5. Ailleurs Photin et Apollinaire. Serm. xevi, 2 ; Epist., lix, 5. Ailleurs les patripassiens, Epf’sf., xv, 1, Paul de Samosate, ibid., 3, Cerdon et Marcion, ibid., 4, Valentin, Epist., xxxv, 1.

Il parle durement d’Origène, Epist., xxxv, 3. Nous verrons dans une lettre qu’il adresse à l’évêque d’Aquilée, saint Léon prendre des mesures énergiques contre des hérétiques, vivants ceux-là, et qui cherchent à se dissimuler dans le clergé : ce sont des tenants de la Pelagiana sive Cselestiana hxresis, des pélagiens attardés. Epist., i. On signale des novatiens et des donatistes en Afrique, Epist., xii, 6 ; des priscillianistes en Espagne. Epist., xv, prol.

Il y a longtemps que l’on rencontre des manichéens à Rome : au temps du pape Damase, en dépit des lois impériales qui les visent, ils ne paraissent nullement inquiétés, et par saint Augustin, qui est alors des leurs, nous savons qu’ils possèdent à Rome une communauté importante. Confess., v, 19. Cf. Duchesne, Lib. pontif., t. i, p. 169, note 3. Au temps de saint Léon, leur condition est devenue plus difficile : ils sont une secte secrète et se dissimulent dans les rangs mêmes des fidèles. Léon exhorte ses fidèles à les dénoncr aux prêtres : Manichseos ubicumque latentes veslris presbyteris publicetis. Serm., ix, 4. Souligner latentes, ils se cachent ; presbyteris, on devra les dénoncer aux prêtres des paroisses ou titres. On ne peut tolérer ces gens qui rejettent la loi de Moïse, qui rejettent les prophètes, qui critiquent les psaumes de David, qui nient la naissance du Seigneur selon la chair, qui tiennent pour apparente sa passion, sa résurrection, qui dépouillent le baptême de toute vertu régéntrarante. Ibid. Léon y revient dans le Sermo xvi. Il voit dans le manichéisme la sentine de toutes les erreurs et de toutes les abominations. Il parle de l’enquête (inquisito) qu’il vient d’instituer : il a réuni les évêques présents à Rome, les prêtres du clergé romain, et avec eux des chrétiens de qualité : il a fait comparaître devant le tribunal qu’il présidait ceux des manichéens qui avaient été arrêtés et qui étaient des principaux de la secte. Les prévenus ont parlé, ils ont révélé la perversité de leur doctrine et les pratiques abominables de leur culte, ils ont révélé notamment un infandum facinus dont a été victime une enfant de dix ans et auquel a présidé l’évêque manichéen. Léon ne veut pas insister en chaire sur un sujet qui offense toute pudeur, gestorum documenta sufjlciunt, les procèsverbaux de l’enquête sont là. Serm., xvi, 4. Ces gens exécrables, qu’ont amenés à Rome en plus grand nombre les troubles des autres régions (l’Afrique sans doute en premier), il faut n’avoir aucun commerce avec eux. Si vous savez où ils habitent, où ils enseignent, qui ils fréquentent, vous devez nous le faire connaître. La vigilance nous est un commun devoir. Ibid., 5. Ce qui a été fait ne suffit pas.eadem inquisitio perseveret. Ibid., 6. On pourra comparer une action pareille menée à Carthage contre des manichéens que l’on y a découverts, et signalée en 428 par saint Augustin. De hæresibus, 46.

Les manichéens reparaissent maintes fois dans les sermons de saint Léon. Serm., xxii. G ; xxiv, 4-5 ; xxxiv, 4-5 ; xlvii, 2. Voyez surtout lxxvt, 6. Léon connaît leurs Écritures : ils rejettent l’ancien Testament et ont un Nouveau Testament de leur façon : Ipsas evangelicas et apostolicas paginas quædam auferendo et quædam inserendo violaverunt, confmgentes sibi sub aposlolorum nominibus et sub uerbis ipsius Salvatoris multa volumina /alsilatis qui bus erroris sui commenta munirent. Srrm.. xxxiv. 1. Léon sait qu’ils pratiquent des abstinences d’aliments, vraies caricatures de nos jeûnes : Vie illorum dogmati, apud quod etiam jejunando peccatur. Serm.. xi.u. 1. En l’honneur du soleil et de la lune, ils jeûnent le dimanche et le lundi. Ibid., 5. Pour se mieux dissimuler, ils prennent part aux assemblées chrétiennes, ils vont jusqu’à communier, in sacramentorum communione se tempérant, recevant indignement le corps du Christ, mais