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LEIBNIZ. LA RÉUNION DES EGLISES


En principe, les vérités qui sont nécessaires d’une nécessité logique ou métaphysique, c’est-à-dire dont l’opposé implique contradiction, ne peuvent jamais être contraires à la révélation. Mais la question est de savoir quelles vérités portent ce caractère, et à ce sujet Leibniz recommande de s’en tenir à cette règle que « toutes les fois que la nécessité logique n’est point démontrée, on ne peut présumer dans une proposition qu’une nécessité physique ». Nouv. essais, t. IV, c. 18, § 9.

Le problème devient plus délicat dès que, dans l’interprétation de l’Écriture, le sens littéral d’un texte semble être en conflit avec « une grande apparence d’une impossibilité logique ou du moins une impossibilité physique reconnue ». En théorie on peut dire que là où le sens littéral « n’a rien qui attribue à Dieu quelque imperfection ou entraîne quelque danger dans la pratique de la piété, il est plus sûr et même plus raisonnable de le suivre. » Ibid.

.Mais, pratiquement, il n’est pas toujours facile de prendre une décision, et Leibniz a lui-même hésité dans l’interprétation de la Genèse. « Je n’ose point déterminer, dit-il, si les jours du Hexameron sont des années ou des périodes bien plus grandes. Je ne m’éloignerais point du sentiment de ceux qui ne rapportent la Genèse qu’à la formation du globe de la terre et entendent la production des astres de leur apparition à notre égard, si on pouvait le faire sans s’éloigner de la propriété des paroles. Mais c’est ce que je laisse décider aux théologiens et en attendant je me contente d’expliquer les choses suivant la raison d’une manière qui ne contredise point la sainte Écriture. » Lettre à Burnet, dans Gerhardt, t. iii, p. 221.

Cette attitude réservée n’a cependant pas empêché notre philosophe de se prononcer en des termes assez sévères sur la condamnation de Galilée. « Il importe à l’Église catholique, dit-il, qu’on laisse aux philosophes la liberté raisonnable qui leur appartient. » Il parle du tort que la censure de Copernic avait produit et fait allusion à des passages de saint Augustin où celui-ci aurait fait voir que « c’est prostituer la sainte Écriture et l’Église que d’abuser de leur autorité, pour prévenir les gens sur des vérités de philosophie ». Lettre au landgrave de Hessen-Rheinfels (1668) dans Rommel, t. ii, p. 200 sq., reproduite dans Baruzi, p. 202 sq.

C’est ainsi que Leibniz a tracé les grandes lignes de la critique historique appliquée au christianisme, dont on commençait à faire les premiers essais à son époque. Au fond c’est le rationalisme de Spinoza réintégre dans une théologie chrétienne.

Les Églises et la vraie Église.

Leibniz a donc

reconnu une raison d’être à l’Église chrétienne. Seulement, ce qui devait aller contre les principes de l’harmonie universelle. c’était la division profonde qui, depuis la Réforme, partageait la chrétienté en deux camps opposés. Il déplore profondément les guerres religieuses dont l’Allemagne venait d’être le théâtre et salue les efforts faits pour ramener la paix. Toute personne bien intentionnée demeurera sans doute d’accord, dit-il dans une relation destinée à la cour Impériale, qu’il n’y a rien de plus important pour la gloire de Dieu et pour le bien des hommes, pour la Chrétienté et pour la patrie que le rétablissement de l’unité de l’Église et la réconciliation des protestants ou l’Empire est Intéressé particulièrement

L’unification religieuse répondait du reste aux aspii il mus de ton Bossuel avait fuit paraître sou Exposition rlr In foi tir l’Église catholique, qui fut comme le lignai d’un mouvement de pacification religion i I H

négociations furent ouvertes qui eurent pour rentre la

bout de i lanovre. Rojas de Spinola du côté des r ; it bo-Uques, l’abbé Molanus de Loccum do coti des pro testants, en furent les principaux ouvriers. Dès la première heure, Leibniz s’y intéressa très vivement ; peu à peu il devait supplanter Molanus. Seulement il n’avait pas grande confiance en ces perpétuelles conférences et discussions. Il était profondément convaincu que, sur les questions essentielles, l’unité subsistait ou du moins pouvait facilement être réalisée grâce à un bon usage de la raison. On peut découvrir chez les controversistes et polémistes théologiens de tout temps, de Celse jusqu’aux sociniens, des pensées sublimes, en lesquelles ils sont d’accord avec la tradition de « l’Église catholique » c’est-à-dire de cette Église universelle, idéale qui s’identifie avec la Cité de Dieu. Voir Lettre à Arnauld (nov. 1671), dans Gerhardt, 1. 1. p. 76 sq. « L’essence de la catholicité, écrit-il à M me de Brinon, n’est pas de communier extérieurement avec Rome… La communion vraie et essentielle qui fait que nous sommes du corps de Jésus-Christ, est la charité. » Foucher de Careil, 1. 1, p. 163 sq. C’était donc pour Leibniz une chose entendue qu’on peut faire son salut hors de toute Église particulière, pourvu qu’on ait un véritable amour de Dieu. Et il se plaît à constater que c’est là un enseignement qu’on rencontre chez plusieurs grands théologiens de l’Église romaine. La foi salvifique des protestants, « cette confiance filiale que les fidèles ont à l’égard de Dieu, n’est autre chose que l’état d’amitié entre Dieu et ses enfants et enferme l’amour et la charité, et justifie par conséquent selon les principes des uns et des autres » (c’est-à-dire des catholiques et des luthériens). Fragment inédit reproduit par Baruzi, p. 205.

Aussi a-t-il pu dire : « Lorsqu’on aura fait tous les protestants catholiques, on trouvera que les catholiques seront devenus protestants. » Lettre à Mme de Brinon (1693 -), dans Foucher de Careil, 1. 1, p. 435.

C’est donc en ramenant les discussions sur le terrain de la raison que Leibniz espérait pouvoir y mettre une fin. Et cet espoir était fondé sur les principes de son système selon lequel la raison avait pour rôle principal de contribuer à la réalisation de l’harmonie universelle.

La méthode préconisée par Leibniz en vue de l’unification religieuse consiste donc à fournir une démonstration rationnelle de la vérité chrétienne. Et c’est ici sa philosophie tout entière qui devient pour ainsi dire une apologétique chrétienne. Selon le plan qu’il exposa au duc Jean-Frédéric de Hanovre, l’ouvrage qu’il avait projeté devait comprendre trois parties. ♦ Une première, devait contenir des démonstrations de l’existence de Dieu, de l’immortalité de l’âme et de toute la théologie naturelle… La deuxième partie devait être de la religion chrétienne ou théologie révélée, où je voulais démontrer la possibilité de nos mystères et satisfaire à toutes les difficultés de ceux qui prétendent montrer des absurdités et contradictions dans la Trinité, dans l’Incarnation, dans l’Eucharistie et datis la résurrection des corps… La troisième traitait de l’Église où j’avais des preuves très convainquantes que l’hiérarchie de l’Église est de droit divin… » « Mais afin de jeter les fondements de ces grandes démonstrations j’avais dessein de les faire précéder par les éléments démontrés de la vraie philosophie pour servir à l’intelligence de l’ouvrage principal. Car il faut une nouvelle logique pour connaître les degrés « le la probabilité, puisque cela est nécessaire pour juger îles preuves en matière de f ; iit et de morale, où il y a ordinairement de bonnes raison ! de pari et d’autre et il ne s’agit que île savoir de quel côté doit

pencher la balance… !

°II faut aussi pousser la métaphysique bien plus avant qu’on n’a fait jusqu’ici pour avoir les véritables

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