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JÉSI S-CHRIST. LA RÉVÉLATION 1)1 » FILS DE DIEU


J. Lebreton. Les origines du dogme de la Trinité. p. 297-298.

b. En revendiquant pour lui les attributs divins, Jésus, marque qu’il est Dieu comme le Pure. — a) Jésus en premier lieu, s’arroge /<’pouvoir divin de remettre les pèches. Deux fois au moins, explicitement, il absout les pécheurs, le paralytique de Capharnaûm, Matth., i. 2-8 ; Mare., u..">. I2j Lue., v. 20-26 ; la pécheresse publique chez Simon te pharisien. Luc, vii, 36-50. Dans le second cas, le sens du texte sacré est peut-être un peu plus expressif pour marquer que Jésus remet, par un pouvoir qui lui est propre, les péchés. Les scribes, toutefois, ne s’étaient pas trompés sur la portée des paroles de Jésus au paralytique : « Celui-là blasphème ; qui peut remettre les péchés, sinon Dieu seul ? » Marc. u. 7. Il est vrai que dans la Bible, la rémission des péchés est toujours regardée comme une prérogative divine. Cf. Is.. xuu. 25 ; xuv, 22. etc. Aucune formule d’absolution n’existe dans le judaïsme, qui ne reconnaît à aucun homme, si saint et si grand soit-il, le pouvoir de purifier les âmes coupables. Et Jésus, pour prouver qu’il ne s’arrogeait pas mensongèrement le pouvoir sur les péchés, accomplit un miracle de guérison qui marque la véracité de son affirmation.

P) En second lieu, Xotre-Seigneur, qui parle en maître sur la Loi et sur le sabbat, voir col. 1201, à certains moments accentue cette autorité au point de se substituer à Dieu, comme fin dernière et raison suprême de lu moralité humaine. « Chez lui. dans l’intérieur des autres, il réclame tout pour lui, sachant que tout lui est dû : i Quiconque aime son père et sa mère plus que moi, n’est pas digne de moi. » Matth., x, 37. C’est Jésus qui, au jour du jugement, ne connaît pas ceux qui font l’iniquité. Matth., vii, 23. Cette « substitution s de Jésus à Dieu dans l’ordre de la moralité apparaît surtout dans la scène du pardon accordé à la pécheresse. Luc, vii, 3.’-.")0. Dans le texte évangélique, cette pécheresse, parce qu’elle a péché, se trouve être la débitrice de Jésus et son amour pour lui est le motif et à la fois l’effet de son pardon. Or le péché est essentiellement une dette envers Dieu : les pécheurs sont les débiteurs de Dieu, Matth., vi, 12 ; Luc, xiii, 4, qui n’obtiendront miséricorde que dans la mesure où ils pardonneront eux-mêmes. Matth., xviii, 23-35. Ces habitudes de parole et de pensée rendent plus manifeste le rôle que le Christ prend ici : c’est bien celui que, dans tout l’Évangile, il donne à Dieu : en péchant, on s’est rendu son débiteur ; mais aussi, en l’aimant, on attire son pardon. On reconnaît, dans ce dernier trait, une conception fondamentale de l’Évangile, et qui éclaire puissamment le problème du Christ : C’est de ses relations avec le Christ que dépend la valeur religieuse de tout homme ; c’est par elles que la pécheresse est sauvée ; c’est sur elles…. que tous les hommes seront jugés au dernier jour : « Venez, les bénis de mon Père, … car j’avais faim et vous m’avez donné à manger, i Matth., xviii, 23-35. Les considérants de la sentence de damnation sont exactement parallèles ; de part et d’autre, une seule question est posée : Qu’est-ce que l’homme a fait pour le Christ ? Comme la pécheresse, il était son débiteur ; l’a-t-il aimé comme la pécheresse. » J. Lebreton, op. cit., p. 270. Remarquons le, il n’y a pas ici une simplerègle abstraite de morale comme l’affirment certains exégètes libéraux. Cf. IL J. Iloltzmann, l.ehrbuch der neutestamentlichen Théologie, t. i, p. 320. Ce qui, dans l’enseignement de Jésus, fait l’objet de la vie chrétienne, ce n’est pas i l’idée pure du bien >, c’est sa personne même que l’on doit suivre et servir.

y) fin troisième lieu, Jésus s’attribue la qualité de juge du monde à la fin des temps. Or, ce jugement, dans toute la tradition juive, es1 réservé à Dieu seul. Mais le Christ, dans les évangiles synoptiques, affirme

explicitement qu’il exercera ce jugement, non pas

parce qu’il sera témoin au jugement de Dieu, mais parce qu’il rendra lui-même la sentence en qualité de juge. Marc, xiii, 34-37 ; Matth.. xiii, 37-42 ; xxiv. 18-51 ; Luc, xii, 36-38 ; 45-48 ; xxi. 31-30 et surtout Matth.. vu. 22-23 ; xvi.27 ; XXTV, 30-31, el XXV, 31-46. Cf. C. V. Wotaw, art. Sermon on the Mount, dans le Dictionanj of the Bible de I Listings, t. v, p. 436, n. 3, contre les exégètes qui, s’appuyant sur Marc, viii, 3s. veulent faire de Jésus un simple témoin privilégié. Holtzmann, op. cit., t. i. p. 319 et Das messianische Bewusstsein Jesu, i. 84-85 ; Loisy, Les Évangiles synoptiques, 1. 1, p. 890 ; t. u. p. 26.

Il n’est pas difficile, d’ailleurs, de démontrer que, selon la théologie juive au temps de Notre-Seigueur, le jugement du monde est réservé à Dieu seul. Assumplio Moi/sis, x, 7 : » Il se lève le Dieu suprême, seul éternel, et il se manifestera pour punir les nations. > Cf. Testamentum Levi, v, 2 ; Testamentum Juda, xxii, 2 : Henoch slav., xxxiii, 1 ; lviii, 1. Le jugement est « le jour du Seigneur », dans Baruch sur., XLvm, 17 : « le jour du Tout-Puissant », id., LV, 6 ; « le grand jour du Seigneur », Henoch slav., xviii, 0 ; « le jour de la Visitation du Seigneur », Testamentum Ascr, vii, 3 : Ps. Sal., x, 5 ; xv, 13-11. Dieu se réserve le droit de juger. De même que toutes choses ont été faites par moi et non par un autre : ainsi la fin de toutes choses sera par moi et non par un autre, » IV Esdras, v, 56 ; vi, G ; cf. ix, 2 ; v, 40 ; vii, 33 ; Ps. Sal., xv, 9, 13-14 ; Henoch, i, 3-9 ; xlviii, 3 ; xc, 20 sq. ; xcr, 15 ; c, 4 ; Or. Sibijl., iii, 91 ; iv, 40 sq. ; Baruch stjr., xx, 2-4 ; Lxxxiu, 2 ; Assumptio Moi/sis, x, 7 ; Jubil., v, 13 ; Testamentum Levi, iii, 2 ; iv, 2. Le Messie n’apparaît jamais comme juge, sauf dans le livre des Paraboles d’Henoch, lxi, 5, où encore il n’a pas à exercer seul le jugement universel. Cf. P. Volz, Judische Eschatologie von Daniel bis Akiba, Tubingue, 1903, p. 259, En regard de ces textes qui établissent solidement la vérité de notre première assertion, les textes du Nouveau Testament montrent non moins clairement que le jour du jugement sera le jour du Christ, et que le jugement est réservé à Jésus. Jugement et parousie (advenlus), sont absolument synonymes dans le Nouveau Testament. Cf. I Cor., iv, 3. Or, la parousie est l’avènement du Fils de l’Homme, c’est-à-dire du Christ, Matth., xxiv, 27, 37, 39 ; elle est « le jour du Christ », Luc, xvii, 24 ; le « jour où le Fils de l’Homme sera révélé. » Luc, xvii, 30. On trouve plus fréquemment encore chez saint Paul l’expression jour du Christ : IThess., v, 2 ; II Thés., ii, 2 ; I Cor., i, 8 ; v, 5 ; II Cor., i, 14 ; Phil., i, 6, 10 ; cꝟ. 1 1 Pet., iii, 10 ; ou encore l’expression paroui if (adventus) de Notre-Seigneur Jésus-Christ, I Thess., iii, 13 ; iv, 15 ; v, 23 ; II Thess., ii, 1, 8 ; I Cor., xv, 23 ; cf. Jac, v, 7 ; II Pet., ni, 4. Quelques textes cependant, dans le Nouveau Testament, attribuent la jugement à Dieu, soit que Dieu le Père dans le jugement, joue le rôle de rémunérateur ou de vengeur, Matth., vi, 4, G, 14, 15, 18 ; x, 28-33 ; xviii, 35 Luc, xii, 8-9, tout en laissant au Fils le rôle de juge, cf. Luc, xii, 15-48 ; xxi, 34-36, et rapprocher Joa., v, 22-27 ; soit que Dieu joue lui-même le r /le de juge, Apoc, xx, 11-15, et que le jugement soit le « jour du Seigneur —, dies Domini, sans autre spécification. Apoc, vi, 17 ; XVI, 1 1 ; I Pet., u, 12 ; il Pc t., iii, 13 ; Kom., ii, 5. Mais ces affirmations ne font que corr bôrer notre raisonnement. Dieu est le juge ; mais il a donné au Fils le pouvoir de juger. Joa., v, 26. Et cela, précisément parce que le Fils est Dieu et lient ce pouvoir divin en vertu même di relation d’origine vis-à-vis du l’ère. « Ainsi, pouvons-nous conclure avec le I’. Lebreton, dans la doc t ri ne des fins dernières ou, pour parler plUS exactement, dans loul(s les doctrines du salut.

le Christ a tout transformé, <" revendiquant pour lui-