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JÉSUITES. TIIKULOGIL MORALE. TENDANCES


jours, Monum. hist., Polanci complemenla, t. n. [>. 582, tantôt un jour sur deux, Monurn. Iiisl., Epistolæ P. H. Nadal, t. i v, p. 520, définitivement, aux ternies du Ratio, une ou deux fois par semaine. Ratio de 1586, Pachtler, t. n. p. 122-123 ; Ratio de 1599. ReguUv provincialis, n. 13-15 ; Regulie prefessoris casuum, n. 7-10, Pachtler, t. ii, p. 240, 320 ; Instit., t. a, p. 193. Elle consiste dans la discussion rationnelle de quelques espèces concrètes, que présentent deux ou trois membres de la communauté désignés d’avance, sous la direction d’un préfel spécialement compétent. Avec un peu de suite dans le choix du sujet, elle permet une révision méthodique et continue des questions qui se présentent le plus fréquemment au confessionnal. Aussi son utilité est-elle jugée considérable. On n’en dispense que les professeurs de théologie et de philosophie, et toute négligence à cet égard est sévèrement réprimée. Congreg. IX (1650), d. 8, Instit., t. i, p. 626. — Nous avons dit que cet exercice était présidé par un membre de la communauté d’une particulière compétence. Dans les collèges, c’est naturellement le professeur de théologie morale. Dans les autres maisons, le provincial doit faire en sorte qu’il y ait toujours quelqu’un qui in casibus conscientix bene versatus sit, ut difficullatibus domi et foris occurrentibus satisfacerc possit. Reg. prsepositi provincialis, n. 57, /ns/17., t.n, p. 83. Comme on a en pays protestant des spécialistes de la controverse, ainsi veut-on avoir partout un casuiste spécialisé capable de trancher les difficultés embarrassantes, devant lesquelles quiconque n’est pas du métier, eût-il d’ailleurs la science d’un Bellarmin (voir Le Bachelet, Bellarmin avant son cardinalat, p. 90), se reconnaît impuissant. Ce souci est tout à fait caractéristique.

L’enseignement de la morale au dehors.

On sait

à quel état de déchéance en étaient arrivés le clergé et les ordres religieux à l’époque de la crise protestante. La disparition des écoles épiscopales et abbatiales obligeant les évoques à ordonner des sujets médiocres, souvent illettrés, fatalement grandissait à peu près partout le nombre des prêtres incapables d’administrer les sacrements. Beaucoup, surtout en Allemagne et en Italie, ne connaissaient pas plus la formule de l’absolution que les cérémonies de la messe. J. Janssen. L’Allemagne et la Réforme, trad. fr., t. iv, Paris, 1895. p. 102-107, 112-114, 118 ; liraunsberger. Beat’Pet -i Cani. iii epistolæ et aeta Fribourg-en-B., t.i, 1896, p. 421, 442, 48 1, 491, 526, 630, etc. P. Tacchi-Venturi, Storia délia Compania di Gesù in Italia, 1. 1, p. 27 sq. Dans le diocèse de Milan, les préoccupations de ces malheureux étaient si éloignées des devoirs de leur état, qu’on disait par manière de proverbe : Se vuoi andare ail’inferno, fatti prête. Giussano, Vita di San Carlo Borromeo, t. II, c. i. En France la situation n’était guère meilleure. P. Imbart de la Tour, Les origines de la Réforme, t. ii, Paris, 1909, p. 287-305. Tandis que renseignement théologique clés universités, dès longtemps miné par le terminisme, achevait de se consumer en discussions verbales, l’ignorance du clergé alarmait les plus clairvoyants, i De ceulx qui viennent aux ordres y trouvons fort petite science et moult elère semée, écrivait en 1515 l’évéquc de Toul, Hugues des Hazards. Car de dix a grand peine en trouve-t-on ung qui sçache ce qu’il est tenu de sçavbir, ne grammaire, ne aultres sciences ; par quov ils n’entendent rien (eliam littéralement) de ce qu’ils lisent : qu’est une grande malédiction, i Dans E, Martin. Histoire de l’Université de Pont-à-Mousson, Paris-Nancy. 1891, p..". sq. L’Espagne semblait mieux partagée. Mais si une renaissance tics forte du thomisme permettait

a L’élite de recevoir dans les universités une bonne formation théologique, ce relèvement des hautes études n’ai teignait ni les desservants des paroisses rurale-, m la masse imposante des réguliers, et. va

l’aversion des prêtres instruits pour le confessionnal, servait peu la cause de l’indispensable réforme. Ideo populus Dei infirmus est, imbecillis. perterrilus ac perditus, quoniam in Israël medicus non invenitur, qui medelam applicare non ignoret. Telle était encore en 1580 la plainte de B. de Médina, Inslrucl. confessariorum, Prolog.

On pouvait craindre qu’une situation aussi universelle n’entraînât avec elle dans le peuple chrétien un abandon complet des sacrements et en particulier du sacrement de pénitence. C’est pour parer selon leurs moyens à ce grave danger, que, dès la création de leurs premiers collèges, les jésuites inscrivirent au programme un cours public de cas de conscience. Voici, à titre d’exemple, ce que portait à ce sujet le prospectus du collège de Messine, second en date des collèges de la Compagnie (1548). Une autre leçon se fera sur l’Éthique d’Aristole… Une autre encore sur quelque Somiw de cas de conscience, pour apprendre à bien recevoir et administrer le sacrement de Pénitence. Monum. pœdag., p. 616. Une lettre de Nadal, titulaire précisément de ce cours en même temps que recteur du collège, Monum. hist., Vita S. Ignatii par Polanco, 1. 1, p. 283, renseigne sur les résultats obtenus en 1551. Monum. hist., Epistolæ P. H. Nadal, t. i, p. 120. En cette même année un plan d’études rédigé sous les yeux de saint Ignace pour le collège de Vienne, prévoyait l’ouverture d’un cours de cas de conscience, que les circonstances devaient retarder quelque temps, Monum. hist., Monum. Ignatiana, ser. I, t. iii, p. 605 ; mais à Ingolstadt, en revanche, la leçon de morale obtenait plein succès. Monum. hist., Liiterse. quadrimestres, t. i, p. 284. En 1553, à Lisbonne, quatre cents auditeurs suivaient un cours similaire du P. François Bodriguez, l’archevêque obligeait tous les ecclésiastiques de la ville à y assister, et l’afïluencc croissante allait exiger l’aménagement d’une plus vaste salle. Monum. hist., Vita S. Ignatii par Polanco, t. m. p. 403-404. Au Collège romain, où les cours supérieurs s’inauguraient en octobre 1553, la chaire de cas de conscience du P. Quentin Charlart ne groupait pas un pareil public ; on voit néanmoins dans un document de 1563, que le nombre des auditeurs eût alors dépassé deux cents, si le local l’avait permis. Monum. hist., Vita S. Ignatii par Polanco, t. iii, p. 8 ; Polanci com plemenla, t. i, p. 422, 520.

Bref, à la mort de saint Ignace, l’enseignement public des cas de conscience se faisait dans presque tous les collèges. C’est ce qu’attestent les Lilleræ quadrimestres de 1556, t. v, p. 995 (dans les Monum. hist.). Moins de dix ans après, une formula acceptandorum collegiorum établie par Lainez stipulait que toutes les fondations d’établissements comprenant au moins la rhétorique eussent à entretenir un professeur de cas de conscience : ut unus lectionem casuum conscienliie possit profiteri, ul sacerdoles illius regionis, qui parum erunt in iis versati, hac in parle quæ eis necessaria est, fuocwi possint, quo ipsi melius o/Jicium suum faciant ad divinam gloriam. Dans Pachtler, t. i, p. 336.

4° Influence sur le développement de la théologie morale. — Pareille impulsion donnée à la fréquentation du sacrement de pénitence et à l’étude de la morale devait faire auxjésuites une réputation durable de confesseurs et de moralistes, réputation consacrée en quelque sorte par saint Pie V, lorsqu’on 1570 il confiait ; ’» la Compagnie l’important collège des Pénitenciers de Saint Pierre. Sacchini, Hist. Soc. Jesu, p. III. t. VI, n. 1-8. Mais de plus, c’est là en grande partie qu’il faut voir la raison du développement pris alors par la théologie morale. On sait comment saint Charles Borromée, qui employait d’ailleurs les jésuites de Milan ad dijudicandas conscientlæ obscuriores causas, Sacchini, lue. cil., I. I, u. 70, (voir la note de