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JÉRÔME (SAINT). L’INERRANCE BIBLIQUE

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un refuge digne d’eux et de leurs rêves, In Ezech. (en 410-415), xwui. 23 sq., t. xxv, col. 323.

De tout ce qui précède il résulte que, si Jérôme n’a pas toujours apprécié de même façon la version des Septante, il n’a pourtant point varié par inconstance ou légèreté : son attitude primitive, celle qu’il tenait de son éducation, était toute de respect, elle reposait sur la croyance à l’inspiration, nous le savons par son propre témoignage. Il ne l’a modifiée et abandonnée que peu à peu, contraint par la vérité qui se dégageait de ses constatations quotidiennes : encore a-t-il tenu compte peut-être, dans la manifestation de sa pensée définitive, des circonstances de temps et de lieu, et surtout de la nécessité de ménager la transition pour ne point heurter inutilement certaines susceptibilités traditionnelles. Bref, loin de lui faire un grief de ce changement, il y a lieu, de l’en féliciter comme d’un progrès et d’un acte de noble franchise. C’est grâce à ce progrès qu’il a pu sagement forum 1er, le premier, le principe de la préférence à accorder généralement, dans l’étude de la Bible, au texte original sur les versions.

Véracité parfaite des livres inspirés.

1. Affirmalion

générale de cette doctrine. — Une des conséquences nécessaires de l’inspiration, comme aussi une de ses garanties, est l’absence complète d’erreurs dans ce qui en est le produit. Que cette conséquence n’ait pas échappé à l’attention de saint Jérôme, c’est ce dont nous ne saurions douter, quand nous considérons l’insistance avec laquelle il nous présente la Bible comme l’œuvre de Dieu et comme revêtant dans tous ses détails, du fait de son origine, l’autorité de Dieu même. Cf. ci-dessus Fait de l’inspiration et étendue de l’inspiration. On aura déjà remarqué, là où nous avons traité de Y Inspiration verbale, ces paroles concernant Matth., xxvii, 9 : « A Dieu ne plaise que nous traitions ainsi (de faussaire) un fidèle disciple du Christ, qui s’est attaché dans sa relation aux pensées et aux doctrines plus qu’aux syllabes et aux mots. » Nous avons également enregistré cette déclaration d’une lettre à Marcella, que i prétendre corriger quoi que ce soit dans les parole du Seigneur serait un trait de folie ou d’ignorance crasse. » Ailleurs, Epist., lvii, 11, t. xxii, 575, nous lisons que ce serait le fait d’un impie. Jérôme, en effet, après avoir signalé les variantes de deux oracles rapportés Matth., i etn : Ecce Virgo… El lii, Bethlehem terra Juda…, ajoute : Hœc replico (c’est-à-dire : je relève ces détails), non ut evangelislas arguam falsitalis, hoc quippe impiorum est Celsi, Porphyrii, Juliani, sed ut reprehensores meos arguam imperilise.

La parole du Seigneur est toujours et nécessairement vraie. C’est pourquoi, partout où l’on se heurte à d’apparentes contradictions, on est en droit, bien plus, c’est un devoir de chercher à les concilier. La lettre xxvii, ad Damasum, 10, 11, t. xxii, col. 456, 157, en énumère un grand nombre et résume la solution de toutes dans ce principe : Cum videatur Scriptura inlcrse esse contraria, ulrumque verum est, cum diversum sil. C’est celui que nous retrouvons, ainsi formulé Epist., xlvi, ad Marcellam, 11, t. xxii, col. 486, IS7 : l’rimum le scire volumus, omnem sanctam Scripturam non possc sibi esse conlrariam, et maxime unum adversum se non discrepare librum, et, ut plus adjiciamus, eumdem ejusdemque libri locum. Il est vrai qu’en tête de cette lettre figurent les noms de Paula et d’Eustochium et que ce sont ces deux nobles dames qui, deJcur retraite de Bethléem, l’adressent à Marcella ; mais l’on ne saurait douter que les pensées ne soient celles de Jérôme, qui a certainement approuvé et peut-être revu la rédaction, si même il n’a tenu la plume. In Nahum, i, 9, t xxv, col. 1238. la promesse divine cii mchâtier les coupables qu’une fois est rappelée pliquée ; puis le commentateur continue : S’ils

étaient punis une seconde fois, l’Écriture mentirait, ce qu’il n’est pas permis de supposer : Scriplura mentitur, quod dicere nefas est. In Jerem., xxxi, 35 sq.. t. xxiv, col. 885, la formule, est à peu près identique : Scriptura menliri non potest. De là, pour désigner l’Évangile ou la Bible en général ces expressions courantes : veritas Evangelii, verbum veritalis, aposlolica veritas. Ainsi, In /s., viii, 20, t xxiv, col. 122, la parole toujours véridique du vrai Dieu est opposée aux oracles trompeurs des idoles et de leurs devins ou pythonisses, et la conclusion est que, * pour résoudre les questions douteuses, il faut s’en rapporter à la loi et aux témoignages scripturaires. » Les apôtres, parce qu’ils sont infaillibles, se différencient essentiellement des autres écrivains, qui ne le sont pas : Scio aliter habere Aposlolum, aliter reliquos Iractatores ; illos semper vera dicere, istos in quibusdam, ut homines, aberrare. Epist., lxxxii, t. xxii, col. 740.

2. Réponse aux difficultés.

Le principe absolu de l’inerrance scripturaire devait mettre fréquemment son défenseur dans l’embarras. Des difficultés de toutes sortes se présentaient sans cesse au traducteur et au commentateur ; des questions lui étaient posées à ce sujet par ses disciples, ses amis, des fidèles ou des évêques des contrées les plus éloignées ; enfin, il n’ignorait pas et il ne pouvait laisser sans réponse les objections de Celse, de Porphyre, de Julien l’Apostat. Toujours pourtant il maintient invariables son affirmation et son attitude, en proposant un éclaircissement à tous les doutes, en essayant de résoudre tous les problèmes. Les solutions sont très diverses, suivant les cas ; elles ne sont pas toutes également heureuses ni péremptoires. Beaucoup, la plupart peut-être, sont fondées sur la multiplicité des sens d’un même mot, sur la différence des temps, des milieux, des personnes visées, des points de vue des hagiographes. Ainsi s’harmonisent parfaitement en se complétant, cesdeux maximes, en apparence contradictoires, juxtaposées dans le même contexte, Prov., xxvi, 5, (i : A Te respondeas stullo juxla stultitiam suam, ne efficiaris ei similis : — responde stullo juxla slullitiam suam, ne sibi sapiens esse videatur. In Ezech., i, 13, 1-1, t. xxv, 26. Assez souvent, par exemple pour comprendre comment dans Marc, i, 1, une citation empruntée à Malachie et à Isaïe est simplement attribuée au second, ou pour concilier les récits de saint Luc et de saint Paul sur les déplacements ou voyages de celui-ci après sa conversion, il y a lieu d’hésiter entre deux ou trois hypothèses, et l’auteur revient à plusieurs reprises sur la même question, dans l’espoir de l’éclaircir davantage. Cꝟ. 7/i Matth.. iii, 3, t. xxvi, col. 29 ; Tract, in Marc i, 1-12, Aneeil. Mareds.. t. iii, part. 2, p. 319 sq. In Gal., i, 17, P. L., t. xxvi, col. 327, 328. Plus d’une fois, l’exégète ne fait nul mystère de ses perplexités en présence d’un problème ardu au point de lui avoir paru, à première vue, insoluble. Epist., xxxvi, t. xxii, col. 456. A défaut d’autre expédient, on doit supposer une erreur de transmission textuelle, une erreur de copiste ; et les fautes de ce genre sont spécialement fréquentes dans les noms de nombres et la transcription des noms propres. Epist. lxxii, t. xxii, col. 676. On peut aussi, bien que plus rarement, soupçonner une négligence ou une inexactitude de traduction de la part des Septante : El si quidem in historiis aliter haberent Scptuaginta interprètes, aliter hebraica veritas, con/ugere poteramus ad solita præsidia et arcem lingua tenerc vcrnacuhv, Epist., i.xxii, 2, t. xxii, col. 673 ; toutefois ce moyen n’est guère indiqué que vers les dernières années de Jérôme, alors qu’il avait renoncé définitivement à tenir la version grecque pour une œuvre inspirée.

Si des textes pris dans le sens littéral ne paraissent pas susceptibles d’harmonisation entre eux ou d’une