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écrit, c’estjaussi un effet de la motion inspiratrice. Autrement, les Écritures ne seraient pas en toute vérité l’œuvre de Dieu, et même on comprendrait moins que ce soit lui qui nous les ait données à lire, legendas dédit. In Is., xxii, 4-6, t. xxiv, col. 278. Moïse, après avoir déjà raconté la création de l’homme, est encore divinement sollicité et amené à expliquer la nature humaine : Qui ergo in Gencsi scripsit de Iwminum conditione, ipse et nunc inducitur a Spiritu Sanclo dispulare quid sit homo. Tract, de Ps. LXXXIX, 1, Anecd. Mareds., t. iii, part. 2, p. 107. Nous savons que la Loi a été écrite par Moïse sur l’ordre de Dieu : on nous dit également qu’elle a « été écrite par le doigt de Dieu. » Cette seconde expression implique plus qu’une motion extérieure et initiale, elle n’est exacte que si la volonté de l’écrivain reste sous l’influence divine pendant toute la durée du travail à accomplir. Ainsi seulement aurons-nous la certitude que l’hagiographe a écrit précisément et exclusivement ce qui lui a été communiqué par la lumière inspiratrice, et ainsi sera-t-on fondé à dire avec saint Jérôme, In Mien., vu. 5-7, P. L., t. xxv, col. 1222. que l’Écriture à été rédigée et publiée par l’Esprit saint : a Spiritu Sancto conscriplæ sunt et éditas.

Il est à peine besoin d’ajouter, après tout ce que nous avons dit, que l’auteur humain obéit librement à la motion divine. Celle-ci laisse place non seulement au libre jeu de la volonté et des préférences ou tendances personnelles, mais aux multiples influences ambiantes. Si saint Luc n’a pas mentionné YHosannah de l’entrée triomphale à Jérusalem, c’est qu’il ne pouvait le traduire exactement dans sa langue et qu’il n’a point voulu mettre le lecteur en présence d’une difficulté. Epist., xx, t. xxii, col. 378. Saint Jean n’a entrepris la rédaction de son évangile qu’à la prière de presque tous les évêques d’Asie, qui désiraient et lui demandaient un ample exposé de la doctrine sur la, divinité du Christ. Prol. in Maith., t. xxvi, col. 18 sq.

Étendue de l’inspiration.

Nous n’avons pas à

nous occuper ici du nombre et des noms des livres inspirés. Ce point a été traité à l’art. Canon, t. ii, col. 1577, 1578, et 1591, 1592. Rappelons seulement que trop confiant dans la valeur absolue du canon palestinien, Jérôme a relégué tous les deutérocanoniques de l’Ancien Testament parmi les apocryphes, ne leur reconnaissant point d’autorité scripturaire ; en quoi il était manifestement en contradiction avec l’usage courant de l’Église. Sur li s deutérocanoniques du Nouveau Testament, ses idées sont beaucoup moins arrêtées, et pour son compte personnel, il ne semble pas mettre de différence entre protocanoniques et deutérocanoniques. Mais il s’agit présentement de ce à quoi, dans us livres reconnus comme inspirés, s’applique le privilège de l’inspiration. Or, il s’applique à tout le contenu de ces livres, sans qu’on puisse en excepter les choses en apparence les plus banales, les détails les plus vulgaires et les plus insignifiants. Telle est la doctrine île saint Jérôme, et il déclare sans ambages que penser le contraire serait le fait d’un sot ou d’un ignorant. EpisL, xxvii, t. xxii, 431.

1. L’épilre ù Philéinon lui fournit l’occasion d’insister sur cette vérité, de la mettre en une vive lumière. Ceux, dit-il, qui refusent d’admettre l’origine et l’autorité divines de cette petite épître prétendent que l’Apôtre n’a pas toujours parlé comme organe du Christ a’n semper u/ ostolum. rtec omnia Christ" in se loquenie dixissc. L’infirmité humaine, d’après eux, n’aurait pu soutenir (jette Influence continuelle de i i sprit saint, unum tenorem Sancti Spiritus. Pourquoi faire Intervenir la suprême majesté du Seigneur à proi des nécessités les plus infimes de notre pauvre corps, telles que le manger, le boire, etc. : relut onere prandium, ctbum capere, esurire, satwari,

ingesta digerere, exhausta complere ? Quelle pourrait être, d’ailleurs, la part de Dieu dans une parole comme celleci, Il Tim., vx, 13 : Penulam quam reliqui Troade apud Carpum, veniens lecum afler ? ou dans cette autre, Gal., v, 12 : Ulinam et abscindantur qui vos conlurbant ? ou encore dans la demande adressée ici même, ꝟ. 22, à Philémon : Simul autem et prsepara mini hospitium ? Et des minuties semblables, ajoute-t-on, se rencontrent chez les prophètes, comme chez les apôtres. « Ce n’est pas ici le lieu, reprend Jérôme, de répondre à toutes les difficultés ; je n’ai du reste pas relevé toutes celles qu’on produit ordinairement. Mais si l’on ne veut pas que les petites choses aient même cause que les grandes, il faudra soutenir, avec Valentin, Marcion et Apelles, qu’autre est le créateur de la fourmi, du ver de terre, des moucherons, des sauterelles, et autre celui du ciel, de la terre, de la mer et des anges. Ne doit-on pas plutôt reconnaître dans de moindres effets le même pouvoir et la même intelligence qui se manifestent dans de plus grandioses ? Au demeurant, ceux qui font à cette épître un grief de sa simplicité me paraissent trahir leur ignorance, puisqu’ils ne comprennent pas ce que chaque expression, ce que chaquedétail renferme de puissance et de sagesse. » In Philem., prolog., t. xxvi, col. 599 sq.

Très suggestive aussi, au point de vue de l’étendue de l’inspiration, la façon dont Jérôme, envisage la sortie véhémente de Paul : Utinam et abscindantur qui vos conlurbant. In Gal., v, 12, t. XXVI, col. 405. Il propose, pouf l’expliquer ou la disculper aux yeux des païens, diverses considérations, dont nous avons reproduit une partie plus haut, en traitant du côté humain tics livres inspirés ; cf. col. 931. Mais il ne lui vient pas à l’idée de recourir au moyen radical et simple que lui eût fourni une exception à l’inspiration. Loin de là, il argumente de ce passage pour démontrer contre certains gnostiques l’inspiration des livres de l’Ancien Testament, ce qui aurait été impossible, absurde, si le passage n’était pas lui-même inspiré. « Tirons parti de ceci contre Marcion, Valentin et tous ceux qui décrient l’Ancien Testament. Eux qui se disent révoltés de l’idée d’un Créateur sanguinaire, dur, fauteur de guerres, justicier rigoureux, comment parviendront-ils à excuser ce trait d’un apôtre du Dieu bon ? Pourrait-on montrer dans la Loi mosaïque une maxime aussi brutale, aussi cruelle, que celle-ci’.' Certes, je ne le pense pas. Et l’on ne saurait voir une pure manifestation d’amour dans ce qui se révèle, par la rudesse même des termes, comme l’explosion d’un cœur gonflé d’indignation. En conséquence, tout ce qu’on alléguera pour justifier l’Apôtre, nous le ferons valoir, nous, en laveur de l’Ancienne Loi. »

Le principe si clairement expose, si vigoureusement défendu, dans les deux commentaires est répété et appliqué partout où l’occasion s’en présente. Ainsi In Eph., i, 9, P. L., t. xxvi, col. 452, nous lisons que « Dieu, par ses Écritures, nous a fait connaître toutes sortes de mystères, » tant terrestres que célestes, tant naturels que surnaturels ; non seulement la manière dont le monde, avec tout ce qu’il contient, a été créé et celle dont nos premiers parents ont été formés, mais aussi les détails de l’ordre mondial : comment les oiseaux sont suspendus dans l’air, comment les poissons nagent dans l’eau, comment l’homme marche sur la terre. Dans le Prologue à son commentaire d’Isaïc, t. xxiv, col. 18, 19, Jérôme signale l’extraordinaire abondance de doctrine dont nous sommes redevables au prophète ; grâce à lui, dit-il, nous connaissons la naissance et la vie merveilleuses de l’Emmanuel, sa mort, sa résurrection, son œuvre de rédemption

universelle l sans parler des sciences physique, éthique

et logique. Tout ce qui relève des saintes Ecritures, tout ce qu’une langue humaine peut exprimer, une