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ISA 11’LE SERVITEUR DE.1 ll É

dire que c’est partout le peuple d’Israël qui est visé.

I.a preuve tirée du contexte a paru si forte à de nombreux partisans du sens individuel qu’ils n’ont pas hésite à sacrifier l’authenticité des chants du serviteur, et à les considérer comme des interpolations dans les chapitres i.-i v d’Isaïe. Ewald avait ouvert la voie en 1841, en émettant l’idée que i.ii. 13-i.m célébrait primitivement la mort d’un martyr éminent de l’époque de Manassé. Le second [sale aurait inséré cette page dans son œuvre en l’appliquant à l’Israël spirituel. Duhm étendit cette thèse aux quatre chants du m r iteur. D’après lui, ces morceaux, qui tracent le portrait d’un personnage individuel, proviennent d’un écrit particulier, indépendant du second Isaïe. niais repris cl retravaillé par lui. Sellin défend une théorie semblable. mais plus favorable à l’authenticité, en ce sens qu’il admet l’unité d’auteur pour les chants du serviteur et les autres discours du DeutéroIsaïe. Dos Ilatsel des Deuterojesajanischen Bûches, Leipzig, 1908, p. 120. Einleïtang in du* Alte Testament, Leipzig, 1914. p. 88. A son jugement, les chants du serviteur faisaient primitivement partie d’un cycle de poésies composées par le DeutéroIsaïe en l’honneur de Joïakhin, déporté à Babylone en 597, mais réhabilité par Amel-Marduk (Evil-Merodach ) en 561. l’ius tard, en 539, le même prophète a compose de nouveaux discours pour chanter la délivrance, et il a reporté sur Israël les titres de gloire qu’il avait autrefois décernés à Joïakhin. Il emprunta aussi aux hymnes messianiques qu’il avait chantés naguère à la louange du roi. des fragments qu’il inséra en différents endroits de ses exhortations et félicitations à l’adresse d’Israël : ce sont les quatre morceaux actuels concernant le serviteur de Jahvé.

Nous croyons qu’il est possible de défendre l’interprétation individualiste des chants du serviteur dans le contexte actuel de la seconde partie d’Isaïe. Avec les partisans du sens collectif, nous admettons donc l’authenticité de ces chants, et avec les partisans du sens individuel, nous soutenons qu’ils visent un personnage concret, bien déterminé.

a. Des quatre chants du serviteur, trois se trouvent rassemblés dans la deuxième section, xlix-lv, de la seconde partie d’Isaïe. où jamais le peuple d’Israël n’est explicitement désigné sous le nom de serviteur ; un seul, xlii. 1-7, se rencontre dans la première section, xl-xi. viii, dans un contexte où Israël-Jacob est nommé serviteur, xi.i, 8-10 ; xlii, 19-20. Nous avons dit, col. 22, qu’il y avait de bonnes raisons pour justifier la transposition de xlii, 1-7 dans la deuxième section, et ce simple déplacement supprime la principale difficulté tirée du contexte contre l’interprétation individualiste du serviteur. En effet, la situation est alors la suivante : une première série de poèmes où le peuple d’Israël est appelé serviteur de Jahvé, décrit la vocation et l’œuvre de Lyrus ; une seconde série, étroitement apparentée à la première et cependant distincte, oii jamais le peuple n’est appelé serviteur, décrit la vocation et l’œuvre d’un personnage autre que Cyrus, désigné par le titre de serviteur de Jahvé, en faveur d’Israël et des nations. Quelle incohérence y at-il dans une semblable disposition ?

Il nous paraît, en tout cas, plus naturel et plus simple d’admettre que, dans deux séries de poèmes parallèles, le serviteur de Jahvé ait deux significations bien distinctes, dans la première celle d’une collectivité, dans la seconde celle d’un individu, que de soutenir que le titre est partout donné au peuple d’Israël, envisagé sous différents aspects qui ne s’harmonisent d’ailleurs pas avec le rôle assigné au serviteur. Il n’est pas étonnant que le serviteur ait deux ou trois acceptions différentes dans la seconde partie d’Isaïe. le passage de l’une à l’autre s’explique facilement. Israël et les Israélites sont toujours appelés serviteurs de Jahvé

parée que Jahvé est le maître, parce qu’il a droil service et au culte de son peuple. Les prophètes sont appelés serviteurs de Jahvé parce qu’ils servent sa cause en promouvant son culte. Qu’est-ce qui empêche de donner aussi le titre de serviteur, d’une façon éminente, à celui qui, dans les vues de l’écrivain, est des tiné à être le grand défenseur de la cause de Jahvé, a donner à son culte un éclat que le passé n’a jamais connu ?

b. Les chants du serviteur ne brisent pas le contexte de la seconde section. Rien ne prouve qu’ils aient été empruntés à une composition différente, et insérés dans un contexte qui ne les renfermait pas d’abord. D’après l’analyse que nous en avons donnée, la seconde section s’ouvre par deux morceaux concernant le serviteur, xlix. 1-7 L. 4-9 ; vient ensuite une description du salut, de la délivrance des captifs et du rétablissement de Sion, xlix, 8-lii, 12 ; puis les deux autres chants du serviteur, xlii, 1-7+lii 13-liij ; enfin le tableau de la gloire de la nouvelle Jérusalem — a) Les passages, où apparaît le serviteur constituent un élément important de cette section. Us forment deux groupes qui se répondent, le premier où le serviteur parle, le second où Jahvé parle du serviteur. Il n’est pas prouvé que ces quatre morceaux aient d’abord été réunis, puis disloqués pour être enchâssés dans le contexte actuel. — P) Les peintures du salut qui font suite à l’exposé de la mission du serviteur s’y rattachent comme le fruit à l’arbre qui le produit. — y) On y rencontre certaines expressions caractéristiques qui reviennent aussi dans les chants, et qui prouvent en faveur d’une composition unique. Qu’on compare xlix, 2 et li, 16. Le parallélisme est si frappant que Van Hoonacker rattache li, 16 aux passages concernant le serviteur, et le situe après xlix, 3. A comparer encore L, 9 et li, 6, 8 (les vêtements qui tombent en lambeaux, dévorés par la teigne) ; xlii, 1-4 et li, 4-5 ; les versets 8-9 du chapitre xlix ne se comprennent qu’après un morceau concernant le serviteur ; il en est de même de L, 10 : Qui de vous craint Jahvé, qu’il entende la voix de son serviteur. — S) Si l’on étend le premier chant du serviteur jusque xlix, 9, et le second jusque l, 10, on obtient un développement intercalaire, xlix, 10-lii, 12, entre les deux groupes de chants, qui forme un ensemble, un tableau de la délivrance, intelligible en lui-même, qu’on pourrait concevoir indépendamment des chants du serviteur, comme c’est le cas aussi pour les chapitres i.iv-lv, etc. Il serait donc possible que ces chants, composés d’abord, primitivement juxtaposés, aient été insérés dans le contexte actuel par l’auteur de ce contexte, qui serait d’ailleurs aussi l’auteur des chants. Mais en définitive, cette solution plus compliquée ne paraît ni imposée, ni nécessaire, et l’on ne voit pas pourquoi l’auteur de la seconde partie d’Isaïe n’aurait pu, pour décrire la mission du serviteur et ses résultats, composer d’une seule venue les morceaux nommes chants du serviteur, et les développements qui les accompagnent.

c) Le serviteur de Jahvé désigne le Messie. — Les exégètes catholiques ne sont pas seuls à reconnaître que le portrait du serviteur de Jahvé s’est trouvé reproduit dans la vie de Jésus de Nazareth, telle qu’elle nous est racontée par les Évangiles. Beaucoup de cri tiques, partisans du sens collectif, avouent aussi que la prophétie s’est, en fait, beaucoup mieux accomplie eu Jésus qu’en Israël ; seulement, d’après eux, l’écrivain n’aurait pas pense au Messie (Dillmann, Davidson, Driver, Adam Smith, Skinner, Kautzsch. Mena i, (’lier. Monnier, et d’autres). Le sens imlivid’I c prouvé, il n’est ]>as difficile d’établir qui l’éc sacre n’a pas eu en vue d’autre personnage que’sic futur, en d’autres ternies, que le 5ell’aeS ! est le sens littéral des passages relatif ! B StST 111