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JE W DE I. CROIX (SAINT). DOCTR [NE

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cité plus haut : pourquoi Dieu n’introduit pas dans la

Nuit de l’esprit lotis ceux qui s’exercent à la vie spirituelle.)

La strophe III découvre les attributs divins révélés a l’âme dans l’union d’amour et qui sont aidant de

lampes de feu. Ces ! la plus haute connaissance de Dieu possible en cette vie. L’âme purifiée complètement éprouve la soif Insatiable de l’union ; mais Dieu la fait attendre encore : état douloureux s’il en fût, où lame souffre d’une privation infinie, où son amour ne soulage nullement sa peine, car elle ne possède Dieu que par grâce, et pas encore par union : par la grâce il j a amour réciproque, comme entre iiancés, qui tout en s’aimanl, ne se possèdent mutuellement qu’en désir et en promesse, se font des cadeaux et des visites : ce sont les préparatifs ; mais dans l’union il y a l’amour comblé, satisfait, complété par la communication et la possession réciproque ; c’est le mariage spirituel. L’âme n’en est encore qu’au désir, disposition préalable à l’union, § m. Le saint docteur revient ici avec complaisance sur sa matière préférée : la direction spirituelle des âmes contemplatives, § iv-.wi. Que l’âme marche par le chemin de la foi, où Dieu seul est un guide sûr, et qu’elle ne se confie pas a la dire lion des, trois aveugles », le maître spirituel incompétent, le démon et elle-même. L’auteur répète les signes de l’état contemplatif, et les justifie longuement, il décrit la notion générale et amoureuse de Dieu < reçue passivement dans l’âme selon le mode surnaturel de Dieu, et non selon le mode naturel de l’âme, g vi, ses rapports avec les actes spécifiés, l’altitude opportune de l’âme, le rôle du directeur spirituel, les maux que peut engendrer son ignorance, et leur cause. Le style est ici singulièrement combatif ; on devine au mot alumbramienlo « illuminisme i l’adversaire que le grand mystique a en vue. Les j vi-mii i appellent avec fermeté les devoirs du diiecteiir spirituel. Puis vient l’élude des ruses et des efforts du démon, celle enfin des erreurs possibles de l’âme elle-même. Le S xvii et les suivants continuent le commentaire interrompu. En parlant de l’élimination de lai. petit naturel, â propos du vs. 1, saint Jean montre que le désir même de Dieu peut n’avoir aucune valeur surnaturelle. Les cavernes du sens » étant toutes baignées et imprégnées de la lumière des « lampes de feu », elles rendent au Bien-Aimé tout ce qu’elles ont reçu de Lui. Il semble difficile de pénétrer plus au Tond dans le mystère de notre vie divine. « Par le moyen de cette transformation substantielle, l’âme est comme l’ombre de Dieu et elle « agit » en Dieu et pour Dieu ce qu’il « agil » en elle pour soi-même et à sa manière, car les deux volontés n’en font qu’une. » C’est la possession en commun de la divine essence. La doctrine développée ici est un Mai commentaire de saint Thomas : Caritas estamicilia quædam hominis ad Deum, fundata super communicationem beatiludinis teternæ, II’, III 1, q. wi, a.2 ; le docteur mystique approfondit toutes les excellences’et merveilles de l’amitié entre Dieu et l’âme. La quati lème strophe met le comble à cette sublime doct rine, en celé branl les i réveils let l’aspiration de Dieu habitant en

secret dans l’âme c< ne dans sa propre maison, et ne

se découvrant qu’à elle. Quant à i l’aspiration », saint Jean renonce à en parler tant elle est inexprimable.

1 t’antique spirituel. — Nous ne pouvons faire

ici une étude approfondie de la valeur des deux séries de mss déjà signalées, qui nous transmettent le cantique spirituel, n faudrait vérifier de pies les conclusions du P. Gerardo dans son édition critique, où U donne en entier les deux rédactions. La seconde (ms. de Jaën), placée en tête, contient de nombreuses additions attribuées au aint. notamment, au début, un argumenta, qui Bynthétise les strophes d’après la

division traditionnelle des trois voies purgative, illuminative et unitive. Cet « argumento » n’existe pas dans le ms. de Sanlùcar de Barrameda (première rédaction), ms. que l’auteur a pourtant revu, ainsi qu’en font foi les nombreuses notes écrites de sa main, et cette mention suivie de sa propre signature : Ceci est le brouillon qui a été mis au net depuis. » Este libro es ri borrador de que ya se saco en limpio. (r. Ju" de

— Il n’existe pas davantage dans la traduction française de René Gaultier. 1622, traduction faite d’après un ms. que possédait la vénérable Mère Anne de Jésus. Voir plus haut, col. 771. Or en comparant Vargumer.to a ec le prologo identique dans les deux rédactions, on peut se demander dans quel sens la division d s trois voies est applicable au Cantique spirituel. D’après ce prologue il s’agit d’un tableau à décrire, d’un étal d’âme à manifester par un dialogue I entre l’âme et l’Époux, dans une forme visiblement i inspirée du Cantique des cantiques. Saint Jean essaye’de révéler ce que l’Esprit Saint fait comprendre i aux âmes amoureuses où Il habite ; leurs sublimes sentiments et leurs aspirations. Ses commentaires, | dit-il, ne sont que l’accessoire des strophes, ils n’en épuiseront pas le sens, et l’on n’est pas tenu de s’y attacher exclusivement ; chacun pourra trouver dans le Cantique lui-même la nourriture appropriée à ses capacités et à ses dispositions ; s’il fallait confiner l’interprétation dans les limites de concepts déterminés, cela ne serait pas du goût de tout le monde, ni conforme à la sagesse mystique, qui provoque l’amour à la manière de la foi, sans connaissance distincte. Cependant, chemin faisant, selon que l’exigera la matière, il touchera brièvement certains points relatifs a l’oraison : non les plus communs, mais les plus extraordinaires. « Ce ne sera pas en vain, que j’aurai traité un peu de la théologie scolastique qui concerne le commerce intérieur entre Dieu et l’âme ; bien que Votre Révérence (la Vén. Anne de Jésus) n’ait pas la pratique de cette théologie grâce à laquelle on pénètre les vérités divines, vous possédez cependant l’exercice de la théologie mystique, qui s’acquiert par l’amour ; et en lui, non seulement on comprend, mais de plus on goûte. » — Il faudrait examiner du même point de vue 1’ « anotaciôn » qui ouvre le commentaire de la seconde rédaction ; elle semble s’inspirer du même esprit que I’i argumento ». — Ajoutons encore une donnée à l’exposé de la question. La « Declaraciôn » de la i Canciôn I » dit expressément : « L’âme énamourée du Verbe Fils de Dieu, son Époux, désirant s’unir â Lui dans la claire vision de son essence, exprime des anxiétés d’amour, et se plaint de son absence, d’autant plus que l’Époux l’a blessée de cet amour gin’l’a fait sortir de toutes les créatures et d’elle-même… » L’auteur suppose évidemment que la purification initiale est un fait accompli au moment où l’âme commence à chanter le Cantique. Celui-ci dépeindrait donc des états mystiques. Il faudra donc s’assurer du texte. et serrer de près la doctrine avant de risquer un jugement, l.es idées théologiques et philosophiques des autres traités se retrouvent dans le Cantique. Jean a utilisé [ci en vrai maître la forme lyrique. - Constatons aussi que la mystique spéculative y intervient à peine, et laisse dominer la mystique expérimentale. L’intérêt spécial du Cantique est la. I loor nært, op. cit., I. i v, p. xir. I" Appréciation générale. — Durant sa vie. saint Jean fut persécuté a cause de sa doctrine et déféré plusieurs lois â l’Inquisition ; une nouvelle tempête se déchaîna lors de la publication de ses œuvres ; mais il lui brillamment défendu et avec succès. Voir la bibliographie. L’Église s’est prononcée elle aussi : Apostolicæ Sedis fudicio divtniius instructus, libros de mystica theologia cœlesli sapientia referlos conscrtpsit,