Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 8.1.djvu/376

Cette page n’a pas encore été corrigée

JEAN DAMASCÈNE (SAINT). D0CTK1NK

734

vraie réponse est celle-ci : « Sans doute, l’âme et le corps diffèrent par leur essence et constituent deux natures distinctes, qu’il est impossible de confondre. On dit cependant une seule nature humaine », en tant que l’humanité constitue une espèce unique, qui est réalisée en plusieurs individus. S’il y avait plusieurs Christs, plusieurs individus possédant à la fois la nature divine et la nature humaine, on pourrait imaginer l’espèce qui s’appellerait Yj>iaTOT7)ç, réalisée dans chaque Christ. On aurait alors une seule nature composée a la fois de la divinité et de l’humanité ; et dans cette hypothèse, les hérétiques auraient le droit dédire

une seule nature du Christ, (xia ç’iaiç », comme on dit : une seule nature de l’homme. Mais il n’y a qu’un seul Christ, et la yziizô—^q, est une pure fiction. Il faut donc dire i Deux natures du Clirist », et non :

une seule ou trois De fide orth., t. III, 3, 16, col. 992993, 1064-1008 ; Contra jacobitas, 54-57, col. 14641 168 ; De nulura compos., 7, t. xcv. col. 120-121.

Tout en voyant dans l’union de l’âme et du corps une sorte d’union hypostatique, notre docteur n’ignore pas qu’il y a de sensibles différences entre cette union hypostatique et l’union hypostatique de l’incarnation ; car la nature divine reste absolument immuable et impassible dans l’union : ce qu’on ne saurait affirmer de l’âme humaine unie à son corps. Contra jacobitas, 57, col. 1465 cd.

Après l’incarnation, l’hypostase du Verbe est dite composée, û-oaTotm^ cùvÔetoç, non évidemment en elle-même, puisqu’elle est absolument simple ; mais parce qu’elle subsiste dans une nouvelle nature, et joue désormais comme un double rôle, supportant dans l’être la nature humaine prise de la Vierge. De fide orth.. 1. III. 3, col. 993 b c ; De nat. compos., 9, t. xcv. col. 124. Par l’union hypostatique, le Verbe acquiert le nom de Christ. Ce nom indique l’hypostase du Verbe en tant qu’il possède les deux natures. Le Verbe s’est oint lui-même, et l’onction de l’humanité c’est la divinité. De fide orth., t. III, 3, t. IV, 15, col.989, 1111-1112.

Aux hérétiques qui demandent si la personne du Christ est créée ou incréée Jean répond : « L’unique hypostase du Verbe incarné est incréée en raison de la divinité et créée en raison de l’humanité, car nous sommes forcés d’éviter deux écueils : diviser l’unique Christ ou nier la différence des natures. » Ibid., t. IV, 5, col. 1109-1112.

3. Résultats de l’union hypostatique.

Une première conséquence de l’union hypostatique est que Jésus-Christ est vraiment Dieu, et que Marie, sa mère, est vraiment Mère de Dieu, Œotôxo ;. Jean démontre la divinité de Jésus contre les nestoriens par l’Écriture sainte et le concile de Nicée. Advcrsus neslorianos, tout le traité. Il consacre deux chapitres de la Foi orthodoxe. t. III, 12 et t. IV, 7, à expliquer la maternité divine de Marie contre les mêmes hérétiques. Le mot de fboroxoç, à lui seul, établit et fait connaître tout le mystère de l’incarnation, col. 1029 c. La génération. yéwTjOTÇ, se rapporte à la personne et non à la nature, (-’est l’hypostase qui est engendrée, col. 1113 cd.

Si Jésus-Christ est Dieu, on ne peut l’appeler serviteur. SoûXov. Ce mot porte sur la personne. La nature humaine elle-même, considérée comme unie au Verbe, ne saurait être dite servante, SoûÀv). Si Jésus est quelquefois appelé serviteur, c’est par pure dénomination extrinsèque, 7cpocri]Y P uc <^i parce qu’il a pris la forme du serviteur. Op. cit., 1. III. 21, col. 1085.

Si Jésus-Christ a prié, ce n’est point qu’il eût besoin de le faire pour lui-même, car le Christ est un ; mais en prenant extérieurement l’attitude de forant, il a voulu nous donner l’exemple, il s’est mis a notre place et a joué notre rôle. Il voulait aussi par là honorer le

Père comme son principe, et montrer qu’il ne se posait pas en rival de Dieu. Ibid., 1. 111, 21, col. 1089-1093. Homil. in Transftg., 10. t. xevi, col. 561.

Ce n’est pas seulement en priant quc Jésus-Christ a revêtu notre personnage ; c’est aussi en d’autres circonstances ; car il faut distinguer une double appropriation, olxsttoaiç, à savoir une appropriation physique et substantielle, par laquelle il s’est approprié tout ce qui constitue notre nature ; et une appropriation extérieure et relative, prosopique, olxEÊwaiç 7cpoaco7UXT) xod o-)(stixy), par laquelle il agissait parfois en notre nom, et se mettait à notre place, pour nous instruire et nous donner l’exemple. De fide orth., t. III, 25, col. 1093. Beaucoup de paroles que le Sauveur a prononcées dans l’Évangile doivent s’entendre de cette appropriation prosopique. Voir des exemples. De fide orth., t. III, 24, col. 1092-1093 ; t. IV, 18, col. 1185-1189. Ainsi le Deus meus, quare dereliquisli mefrentre dans la catégorie des olxeitôoeiç 7tpo<Koroxal. Par le fait de l’union hypostatique, la nature humaine a été en quelque sorte déifiée, non qu’elle ait perdu son essence propre ou ses propriétés pour être transformée en la divinité, mais en ce sens qu’elle est devenue l’instrument d’opérations divines, toû A6you oYaÙTÎjç -r/)v otxetav ÈvSEixvii|i.Évoi> èvÉpYswcv ; comme le fer rougi au feu brûle non par sa nature propre mais en vertu de son union avec le feu. Op. cit., t. III, 17, col. 1068-1072.

Unie à la personne du Verbe, l’humanité participe à l’adoration dont le Verbe est l’objet. Nous ne l’adorons pas en elle-même et séparément, mais à cause du Verbe et en lui, Si’aùrôv xod. sv aÙTw TcpoaxuveÏToa. Ce n’est pas la chair que nous adorons, mais la chair de Dieu. Ibid., t. III, 8 ; t. IV, 2, col. 1013 c, 1033. Cf. De imag., i, 4, col. 1236 c.

L’union hypostatique, par définition même, laisse subsister dans leur intégrité avec toutes leurs propriétés respectives, les natures unies. C’est pour cela que le monénergisme et le monothélisme sont des hérésies réfutées par le bon sens et la plus simple philosophie. Si nous posons deux natures distinctes, nous devons admettre aussi deux séries d’opérations distinctes, deux volontés physiques (facultés et actes) distinctes ; car l’opération, la volonté, sont choses de la nature, non de la personne. En Dieu même, nous voyons l’opération et la volonté suivre l’unité de la nature et ne pas se multiplier suivant les hypostases. Jean Damascène, après saint Maxime, démontre cela tout au long dans le De fide orth., t. III, 13-18, et dans le traité De duabus voluntatibus. Il s’attache spécialement a prouver l’existence de la liberté humaine du Christ, De fide orth., t. III, 18, col. 1071-1078, et pénètre fort avant dans ce qu’on peut appeler la psychologie de l’Homme-Dieu. Pour saisir le développement de sa pensée, il faut se reporter à ce que nous avons dit plus haut, col. 713, sur sa terminologie de l’opération et du vouloir. Jean refuse à la nature et à la volonté humaine du Christ tous les termes strictement personnels. La volonté humaine de Jésus, tout en étant très libre, tout en obéissant très librement a la volonté divine. n’avait pas par elle-même et sans la permission du Verbe, la détermination, l’approbation et le choix de la chose voulue, tô tiô ; OsLew, to Oz’kqxo. yvcoivixciv, to Uï/r/j.7. TcpooapETix.ôv. Il n’y a qu’un seul voulant, ô GÉXcov, qui veut par ses deux volontés et librement. Mais il va sans dire que la volonté divine prime la volonté humaine sans l’annihiler ni la violenter ; c’est à elle que Viffeu.ovla appartient, otï |ièv -af-ay/ijpEÎTai

i-’j toû xpetTTOvoç, rjjv otxelav ô voue, roû XpiaTOÛ iye[xovtav èvSeîxviirai.’ExvixâTai 8è, xal s~e-v. rep xpeiftv

P., xetl ~y. r j--j. êvepyeï, S r, 9ela poûXerat ^ooXiqoiç. De joliorth., I. III, (i, col. 1005 b. « Par un mouvement libre, l’âme du Seigneur voulait librement ce que sa