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JEAN DAMASCÈNE SAINT). DOCTRINE


Sur l’ordre de la création, Jean adopte l’opinion de Grégoire de Nazianze : Dieu a d’abord créé les anges puis le monde des corps, enfin l’homme, car il convenait que la nature spirituelle.Tjjvvoepàv oùatav, fut créée la première, ensuite la sensible, enfin l’homme, composé <l « s deux, i Op. cit., t. II, 3, col. 873 ; 1. IV. 13, col. 11311.

, Dans le Dialogue cnlre un chrétien et un Sarrasin, le Damascène développe cette idée, qu’après la première semaine. Dieu a cessé de créer, et que les êtres vivants, y compris l’homme, subsistent et se multiplient suivant les lois posées à l’origine. Cette doctrine, telle qu’elle est présentée dans ce dialogue, laisse planer l’obscurité sur l’origine de l'âme humaine et ferait penser au traducianisme. Disp. Saraccni cum christ., t. xevi, col. 1337-1340.

8° Angélologie. — L’angélologie de Jean s’inspire de celle de Grégoire de Nazianze et du pseudo-Denys.

L’ange est une substance intelligente, toujours en mouvement, libre, incorporelle, ayant reçu dans sa nature, le don de l’immortalité. Dieu seul, du reste, connaît sa vraie définition. L’ange n’est pas immuable de sa nature, et peut changer par l’usage de la liberté. Il est incapable de pénitence, parce qu’il est incorporel. C’est à cause de la faiblesse de son corps, que l’homme est susceptible de pénitence. Après leur premier choix, les bons anges ont été fixés immuablement dans. le bien, et les mauvais anges dans le mal.

L’ange est immortel non strictement en vertu de sa nature, car tout ce qui commence a naturellement une fin, mais par un bienfait du créateur, qui seul possède par nature la vie éternelle. De fuie orth., t. II, 3, col. 865 sq.

Les anges sont circonscrits, bien qu’ils ne le soient pas à la manière des corps. Lorsqu’ils sont au ciel, ils ne sont pas sur la terre. Ils sont dans des lieux spirituels, èv voyjtoîç "càizoïç, c’est-à-dire, qu’ils sont là où ils agissent. De fuie orth., t. I, 13, col. 852. Dieu seul est incirconscrit. On peut dire que les anges sont sans contours précis, àépiaToi, en ce sens qu’ils apparaissent aux hommes sous une forme étrangère. Dieu seul est vraiment àôpiGToç.

A propos de la nature des anges, le Damascène avait d’abord dit qu’ils étaient tous de même nature, ol &yyeloi [xicc cpôcnç eîoî. Instit. eleni.. 1, t. xcv, col. 100 c. Dans le De fuie orlh., t. II, 3, col. 869 c, il est plus réservé, et déclare que nous ignorons si les anges sont égaux ou diffèrent entre eux dans leur essence. C’est le secret de Dieu. Les bons anges différent entre eux pail’illumination et le rang, Twepc>ma(Acû xal t^j <xrâaei. Ils sont rangés, d’après l’Aréopagite, en trois ordres, dont chacun comprend trois classes, sic ~peï< ; àcpopî^ei. rpiaSixàç 81axoa[r/)aei.ç. Ibid., col. 872-873.

Tous ceux qui attribuent aux anges le pouvoir de créer une essence quelconque parlent au nom du diable. Ibid., col. 873 a.

Les bons anges tirent leur sainteté non de leur nature, mais du Saint-Esprit, ce qui équivaut à dire qu’ils ont été élevés à l'état surnaturel, lis sont maintenant confirmés dans le bien par un bienfait divin, et parce qu’ils sont attachés au bien souverain. Ils sont au ciel, OÙ leur unique occupation es ! de contempler et de louer Dieu, et de faire sa volonté. Ils sont préposes par le Créateur a la garde de la terre. îles nations, des divers lieux. Ils s’occupent aussi de nos affaires, et nous viennent en aide, xal xà xa8'7)u.â< ; otxovojj.o ; 3vTei ; xal. (bor ; 60ôvTE< ; 7)[mv. Ibid., col. 872. Jean ne dit pas expressément que chaque homme a son gardien. Les anges supérieurs - - que cette supériorité vienne du rang ou de la nature illuminent 'teneurs. Tour se communiquer leurs pensées et leiu volontés, ils n’ont besoin ni île langue, ni d’o reilles. Ibid., col. 868-809. Les anges ne raisonnent pas, à proprement parler, mais comprennent par simple intuition, à.nXji 7Tpoa(30Xyj vooôvtwv. Insl. clem., 8, t. xcv, col. 109 b.

Sur les mauvais anges, l’enseignement de notre docteur peut se résumer ainsi : Les mauvais anges, dont le nombre est incalculable, 7rXr, 60ç oc71eipov, appartiennent tous à l’ordre terrestre, chargé de garder la terre. Le chef de cet ordre se révolta le premier par un libre choix de sa volonté, et devint ainsi mauvais, de bon qu’il était. Un grand nombre de ses subordonnés le suivirent. Depuis leur chute, ils sont irrémédiablement fixés dans le mal, « car ce qu’est la mort aux hommes, la chute l’est aux anges ». De fuie orth., t. II, 4, col. 873-877. Si le diable voulait se convertir, Dieu lui pardonnerait ; mais il ne le veut pas. Dieu, cependant, continue à lui faire du bien, en lui conservant l'être, et il supporte sa démence. Contra manichseos, 32-35, 71. col. 1510-1511, 1569. On peut dire que son châtiment vient de lui-même et non de Dieu. « Ce châtiment n’est autre chose que le feu du désir du mal et l’incendie du désir insassouvi. Il ne désire pas Dieu, mais rien que le mal, <poqi.év. cm Y) xôXuoiç èxelv ?) oùSsv ëxepov èanv, zi [17] 7t5p È7u6j[i. ! aç ttjç xaxiaç xal àp.apT(ai ;, xal Trùp àaTOj(îaç -rr^ È7u6uu.(a-… 'ErciOu(jLOuvteç, xal ii, 7] ! J.£T£Xovt£< ; twv t ? ( ç è : rt.Go[iiaç, ruupôç Six-rçv Û7TÔ t^ç èmOujjuaç xaTacpXéyovTai. Ibid., 36, col. 1541 c. Saint Jean semble bien enseigner ici que le feu qui dévore les démons est purement métaphorique. Voir, plus loin, son enseignement sur les fins dernières.

Les démons ne peuvent rien que par la permission de Dieu. Ils peuvent prédire l’avenir, le connaissant parfois parleur perspicacité ou par conjecture ; mais ils mentent souvent. Ils peuvent suggérer le mal à l’homme mais ne peuvent jamais violenter sa volonté. Dieu permet ces suggestions pour l’exercice des bons et l’augmentation de leurs mérites. Il faut voir l’influence du diable dans les hérésies et. dans toutes les erreurs qui ont égaré les hommes. De fi.de orlh.. loc. cit. ; De imag., i, col. 1285. 1288.

9° L’homme. Sa nature. État primitif. Péché originel. — L’homme, dernière créature de Dieu, composé d’esprit et de matière, résume en lui toute la création. C’est un vrai petit monde. [i.'.xpôxocru.oç. Notre docteur développe très bien cette idée. De fuie orth., t. II, 12, col. 925-928 ; De duabus volunt, 15, t. xcv, col. 114 b c.

Le corps de l’homme est composé des quatre éléments. De fuie orlh.. t. II, 12, col. 925. Son âme est une substance vivante, simple et incorporelle, invisible par sa nature aux yeux du corps, immortelle, raisonnable et intelligente, sans forme.se servant d’un corps organique, auquel elle donne la vie. l’accroissement, la sensation et la puissance génératrice : elle n’a pas un autre esprit distinct d’elle-même, mais l’esprit, vouç, est sa partie la plus pure ; ce que l'œil est dans le corps, l’esprit l’est dans l'âme : elle est douée de liberté, de volonté et d’activité ; elle a une volonté changeante, parce qu’elle est créée. Tout cela, elle l’a reçu selon sa nature par le bienfait du Créateur, duquel aussi elle a reçu l'être et une telle nature. Ibid. Voir aussi De duabus volunt., lô-lS. t. xcv, col. 111-1 18, OÙ l’auteur donne un résume de sa psychologie.

Dans le second livre de la Foi orthodoxe, notre docteur fait déjà ce que fera plus tard saint Thomas : il liasse en revue les diverses facultés de l’homme, cap. 1228. Il s’inspire spécialement, dans cet exposé, de l’ouvrage de Némésius d’Emèse, De hominis natura, P. G., t. xi., col. 504-817, et emprunte aussi beaucoup à saint Maxime pour ce qui regarde la volonté. Il s'étend particulièrement sur la liberté, dont il démontre l’existence par plusieurs arguments, et définit la nature et les limites, c. 25-28 ; cf. aussi 1, II. 7,