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I EÀN XIX — JEAN XX I

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titre d’oecuménique dont aspirait toujours à se parer le patriarche de la nouvelle. Il n’aurait épargné pour cela, dit Glaber. ni flatteries, ni présents. L’entourage pontifical, le pape lui-même, auraient été vite gagnés ; on aurait tenté de réfiler la chose dans le plus grand secret, a lin. sans doute, d'éviter des protestations. Mais la renommée en courut bientôt toute l’Italie ; la France s'émut. Les clunisiens surtout, dont l’influence commençait à grandir, se mirent aussitôt en mouvement ; les évêques suivirent. Des lettres pressantes, des légations même arrivèrent à Rome suppliant le pape de ne pas se prêter à une telle capitulation. Glaber a conservé la lettre, tout spécialement importante, de Guillaume abbé de Dijon. Devant ces instances le pape aurait fini par résister aux demandes du basileus. D’ailleurs il ne garda pas rancune aux clunisiens. comme en témoignent les nombreux privilèges qu’il accorda au fameux monastère et à son abbé Oddon. dallé, n. 1065, 4079-4082, 4095. Par là tout au moins Jean XIX aura quelque peu contribué à la réforme de l'Église.

A partir de 1027 le pape, qui continuait à gouverner la ville de Rome, ne sera plus que l’instrument du nouvel empereur Conrad IL sacré par lui le 26 mars, en présence de Rodolphe, roi de Bourgogne et de Canut, roi de Danemark et d’Angleterre. Rien ne montre mieux la dépendance où le pape est tombé que son attitude dans la querelle entre les deux patriarches d’Aquilée et de Grado. Au début de son pontificat, Jean avait été amené à s’en occuper. Après avoir favorisé d’abord les prétentions d’Aquilée, Jafïé, n. 4060, il s'était décidé dans un synode tenu au Latran en décembre 1024, a casser sa première décision et a reconnaître les droits de Grado. Jafïé, n. 4063, 4064. Mais en 1027. nouveau revirement, sous l’influence cette fois de Conrad. Poppon, patriarche d’Aquilée esl l’homme de l’empereur ; Urson, titulaire de Grado, est mal vu du souverain. En conséquence, le concile rassemblé au Latran le avril 1027, décidera que désormais l'évêque de Grado ne saurait exercer aucun droit métropolitain et serait soumis au patriarche d’Aquilée. Lue bulle de Jean XIX confirme cette sentence et confère au favori de l’empereur droit de préséance sur tous les évêques d’Italie. Jafïé, n. 4060 Le même synode, et sous la même Influence, décide que l’archevêque de.Milan, lequel a rendu de grands services à Conrad, aura désormais le pas sur l’archevêque de Ravenne. dallé, n. 517 ; Veut-on une autre

preuve de la dépendance étroite dans laquelle Jean

se trouve par rapport à l’empereur ? Le pape a concédé à Bernon, abbé de Reichenau, le droit de porter dans les cérémonies certains ornements pontificaux. Ceci déplait à l'évêque de Constance, qui porte plainte a Conrad. Sans hésiter, l’empereur ordonne à l’abbé de livrer de suite le diplôme pontifical à l'évêque, qui le jette au feu. Jafïé, n. 4093. Parmi les bulles de Jean relatives à la France, qu’il sullise de signaler celles qui sont relatives aux privilèges des clunisiens. el celle qu’il adressa à Jordan, évêque de Limoges, el a tous Les prélats de Gaules, pour trancher la controverse aiguë soulevée autour du caractère apostolique de saint Martial. Le pape se déclara partisan de l’apos tolat de saint Martial ; simple concession verbale, d’ailleurs, car il ajoutait : « quiconque par suite d’une révélation divine est envoyé pour prêcher et par ses prédications et ses exemples convertit le peuple qui lui a été divinement confié, peut être a juste litre, nommé

apôtre, car apôtre signilie envoyé. Jafïé, n. 1092.

Cette décision lui acceptée par les conciles de Bourges el de Limoges en 1031. Cette dernière réunion est

célèbre pail’ordonnance qu’elle porta et qui tut comme le prélude des règlements sur la trêve de Dieu. Les amis du chant liturgique doivent de la reconnaissance

à Jean XIX. pour la protection qu’il accorda à Gui d’Arezzo. l’inventeur de la nouvelle notation musicale. Liber Pontiflcalis, t. ii, p. 269 ; Jafïé, Regesla, t. i. p. 51 I519 ; Watterich, Ponlif. rom. vitu ; t. i, p. 70, 708-711 ; le texte de Raoul Glaber, dans P. L., t. i xi.ii, col. 671 ; les divers synodes dans Mansi, t. xix, col. 491, 1711 ; I lefele. Histoire des conciles, tiad. I.eclercq, t. iv b, p. 936-939 ; 942-959 ; LDuchesne, Les premiers temps de l'État pontifical, p. 199 ; Ch. Pflster, Études sur le règne de Robert te Pieux, Paris, ISSâ ; Langen, t. iii, p. 418-428 ; Gregorovius. t. iv. p. 30-39 ; Baxmann, t. ii, p. 189-191 ; Hauck, Kïr eliengeseh. Deutsehlands, t. iii, p. 541 sq.

E. Amann.

21.JEAN XXI, pape, septembre 1270, mai 1277. - - Il n’y a pas de pape Jean XX. Martinus Polonus et ses successeurs ont donné au pape Jean du xme siècle, le numéro XXI. parce qu’ils supposaient, à la suite de Marianus Scolus. l’existence entre Boniface VII et notre Jean XV d’un autre pape Jean qui aurait régné quatre mois. Wilmanns, J 'ahrbûcher des deutschen Reiches tinter Oilo III, p. 208 et 212, a montré que ce Jean, (ils de Robert, est un personnage mythique. L’erreur causée par son insertion a causé un trouble dans la série des papes suivants, dont le numéro d’ordre a été augmenté d’une unité, Jean XV devenant Jean XVI et ainsi de suite. La confusion a été encore accrue du fait que l’antipape Jean Philagalhe a été compté par les uns, omis par les autres. L’usage toutefois a prévalu de donner aux papes Jean des r et xie siècles les numéros d’ordre que nous avons adoptés. La correction n’a pas été faite pour Jean XXI et les deux suivants. Quoiqu’on l’ait prétendu, ce trouble dans la numérotation n’a rien à voir avec le roman de la papesse Jeanne.

En septembre 1276 (le jour est difficile à préciser) les cardinaux assemblés à Viterbe donnèrent pour successeur au très éphémère Adrien V. Pierre Juliani, cardinal-évêque de Tusculum. On le connaissait sous le nom de Pierre d’Espagne, Petrus Ilispanus. car il était originaire de la péninsule ibérique, étant né à Lisbonne, el étant devenu évêque de liraga. Le nom de Pierre d’Espagne est bien connu des historiens de la philosophie et de la médecine. Il se lit en tête d’un traité de logique, Summulse logicales, traduction ou adaptation de Michel Psellus, et qui a fondé l’enseignement de la logique médiévale, tel qu’il s’est maintenu jusqu'à nos jours. Pierre d’Espagne était aussi un médecin ; il reste sous son nom toute une série de traités, qui ne sont pas sans intérêt pour l’histoire de l’art de guérir : Commentewia in Isaacum medicum ; Thésaurus pauperum seu de medendis humani corporis membris ; De medenda podagra ; etc. Le curriculutn vitm de ce Pierre d’Espagne est assez obscur ; l’opinion qui l’identifie au Pierre d’Espagne, devenu pape sous le nom de Jean XXI semble pourtant assez solide. Les diverses appréciations portées sur ce pontife par les chroniqueurs contemporains signalent la haute culture scientifique de Jean : magnas sophista, logicus cl dispuiatoT atque theologus ; foetus papa prdpter florern scieniiarum ; magnus luit in scient ia ; les Annales de Colmar l’appellent même un magicien : Johannes papa magus, in omnibus disciplinis instructus. Voir Potthast, t. ii, p. 17 IN.

Le pontificat de Jean XXI lut trop court, pour

qu’on puisse le caractériser avec justice. Dans les deux graves affaires politiques qui préoccupaient alors le Saini sie^e. la question d’Orient, et la question du Saint-Empire romain, Jean nous apparaît surtout

comme le très dévoué serviteur de la cause de Charles d’Anjou, roi de Sicile depuis 1266. Pour favoriser le roi français, il tant multiplier les obstacles à la reconnaissance de Rodolphe de I labsbourg comme empereur des Romains. Potthast, n.21 180 sq. La question d’Orient soulève des problèmes Infiniment plus coin-