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JEAN XIII

JEAN XV

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trône pontifical, car il semble établi que Jean était le îils de la deuxième Théodora, le petit-fils par conséquent de Théophylacte et de la première Théodora. Imposé par l’étranger, le pape impérial fut bientôt insupportable aux Romains ; au bout de deux mois et demi éclatait une émeute dirigée par Rofried, comte de Campanie et le préfet de la Ville. Pierre. Le pape fut jeté au château Saint-Ange, puis expulsé ; il ne parait pas que l’on ait immédiatement pensé à lui donner un remplaçant. D’ailleurs les Romains n’eurent pas longtemps le loisir de songer à la singularité de cette situation ; au bout de quelques mois, Jean XIII reparaissait sous les murs de Rome avec une armée imposante : en même temps l’on apprenait que pour la quatrième fois l’empereur venait de franchir les Alpes et marchait sur Rome. Il y était à Noël 966, et sévit durement contre les auteurs et fauteurs de la révolte. Cette répression assagit les Romains, et, la présence à peu près continuelle d’Otton aidant, Jean XIII put se maintenir sans autre difficulté. Il dut se faire d’aili ; urs le très humble serviteur de la politique germanique. Le 25 décembre 967, Jean couronnait Otton II, dans la basilique de Saint-Pierre, en présence de son père, assurant ainsi la dignité impériale à la nouvelle dynastie ; quatre ans plus tard, le 14 avril 972, il célébrait dans la même basilique le mariage du jeune empereur avec Théophano, la fille du basilcus Nicéphore Phocas. Ce résultat n’avait pas été. obtenu sans difficulté. La négociation du mariage avait été confiée à Liutprand, dès 968 ; celui-ci fut assez mal reçu par le basileus ; des propos fort désagréables furent échangés de part et d’autre. Une lettre de Jean XIII aggrava encore la situation ; elle priait Nicéphore, empereur des Grecs de nouer des relations d’amitié avec Otton, empereur des Romains. Jaffé, n. 3727. Rien ne pouvait être plus désagréable à un basileus, lequel se considérait toujours comme l’empereur romain par excellence, qu’une telle désignation. Nicéphore entra dans une violente colère. Les naïves prétentions d’Otton. qui demandait comme dot de Théophano les dernières possessions byzantines de l’Italie achevèrent de l’exaspérer. Les négociations lurent rompues, et le basileus pensa à ériger Otrante en archevêché dépendant directement de Constantinople, et à supprimer le rite latin dans l’Italie méridionale. La tragédie du 10 décembre 969 coupa court à ces projets ; Nicéphore périt assassiné. Son successeur, Jean I" Tzimiskes, consentit au mariage de la jeune I béophar.o avec l’héritier d’Otton le Grand.

Le pape Jean XIII servit également en Allemagne ki politique de son empereur. C’est à la demande de celui-ci qu’il organisa le ressort métropolitain de Magdebourg, les circonscriptions épiscopales de Mcisscn, Mersebourg et Zeitz, tous évêchés destinés à porter dans les populations slaves d’au delà de l’Elbe l’in-Quence germanique. Jaiïé, n. 3731, 3732. Ajoutons, pour être juste, que le fondateur du Saint-Empire romain de la nation germanique entendait faire servir .i la réforme de l’Église le pouvoir de fait et de droit dont il disposait. On saisit, sous le pontificat de Jean XIII les premières velléités de la grande entreprise que commenceront les papes du xi c siècle. Un concile tenu à Ravenne en avril 967 par le pape en présence de L’empereur aurait, entre autres prescriptions utiles à l’Église, remis en vigueur les lois trop oubliées sur la continence des clercs : de mulierositale relinquenda. Jaffé, p. 172. La faveur croissante montrée à la réforme clunisienne est également l’indice bonnes dispositions de Jean XIII. Cf. JalTé, n. 3711. Enfin quelques interventions du pape en I pagne t en Bretagne montrent quc l’horizon des n cupations pontificales s’est de nouveau agrandi. JalTé. n. 3746 3750, 3756.

Liber Pontiftcalis, t. ii, p. 252-234 ; Jaflé, Regesla, t. i, p. 470-477 ; Watterich, Pontificum rom. Dites, t. i, p. 44, 6465, 685-686 ; le récit de l’ambassade de Liutprand a Constantinople dam P. L., t. cxxxvi, col. 309-338 ; pour les relations de Jean avec Rathicr, évêque de Vérone, voir le Liber apologeticus de ce dernier, P. L., Ibid., col. 629-642 ; llefele, Jlistoire des Conciles, trad. Leclercq, t. iv b, p. 825832 ; L. Duchesne, Les premiers temps de l’État pontifical, p. 187-188 ; Langen, t. iii, p. 354-363 ; Gregorovius, t. iii, p. 354-362 ; Baxmann, t. ii, p. 119-125 ; Hartmann, t. iv « , p. 17-34 ; A. Ilauck, K irchengesehichte Deutschlands, 3e édit., t. iii, p. 230-240.

K. Am

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15. JEAN XIV, pape, installé en novembre 983, renversé en avril 984, meurt le 20 août 984. — Imposé aux Romains par l’empereur Otton II, qui depuis 980 résidait dans la Ville, Pierre Canepanova, évêque de Pavie, qui prit le nom de Jean XIV, ne pouvait subsister que par la volonté de l’empereur. Depuis 974 en effet, Boniface VII, le pape nommé par Crescentius, et renversé par Otton II se considérait toujours comme le souverain pontife légitime. Malheureusement pour Jean XIV, Otton mourut très peu de temps après la nomination de ce dernier (7 décembre 983). La régente Théophano dut aussitôt partir pour l’Allemagne, où elle voulait faire valoir les droits de son fils, le jeune Otton, âgé de trois ans. Aussitôt les Romains profitent de l’occasion ; averti sans doute par Crescentius, Boniface VII, réfugié à Constantinople, débarque en Italie ; en avril 984 il est à Rome ; Jean XIV est renversé, jeté au château Saint-Ange et finalement étranglé.

Liber Pontiftcalis, t. ii, p. 257 et 259 ; Jaffé, Regesla, t. i, p. 484 ; Watterich, Pontif. rom. Dite, 1. 1, p. 66, 87, 686-687 ; L. Duchesne, Les premiers temps de l’État pontifical, p. 190. Voir aussi Boniface VII, t. ii, col. 591.

E. Amann.

16.JEANXV. pape, consacré en août 985, mort en avril 996. — Originaire de Rome, fils d’un prêtre nommé Léon, Jean fut élevé au trône pontifical par la volonté de Crescentius II, fils de ce Crescentius qui avait, dans les années précédentes opposé Boniface VII aux papes impériaux. Profitant de la carence momentanée de l’autorité germanique, Crescentius II prit le titre nouveau de patrice des Romains, et relégua le pape aux affaires strictement ecclésiastiques. Le retour à Rome de l’impératrice Théophano en 989 ne semble pas avoir modifié beaucoup la situation, la souveraine s’étant entendu avec Crescentius sur le partage des attributions politiques. La mort de Théophano en 991 fut le signal de nouvelles discussions entre Romains et Allemands. Jean qui avait tendance à s’appuyer sur ces derniers, s’était aussi rendu odieux aux Romains par son népotisme, au dire du Liber Pcntiftcalis. A la suite d’incidents qu’il est dillicile de préciser, et qui forcèrent peut-être le pape à se réfugier en Toscane, il se vit obligé de faire appel à Otton III. Celui-ci se dirigeait sur Rome, quand il apprit la mort de Jean XV, qui venait de rentrer dans sa capitale.

Bien qu’elle soit mal connue, l’action ecclésiastique de ce pape paraît avoir été assez considérable. En 991, il intervient dans un différend entre Ethelred roi. d’Angleterre et Richard, duc de Normandie, â qui il impose la paix de Rouen. Jaffé, n. 3840. En Allemagne il soutient la politique ecclésiastique de la régente, puis d’Otton ni ; c’est lui qui canonise solennellement saint Ulric, évêque d’Augsbourg, premier exemple connu de canonisation par le pape. Jaffé, n. 3848. Ses relations avec L’épiscopat français furent beaucoup plus difficiles. L’attitude de l’archevêque de Reims Gerbert, le futur pape Sylvestre II, est particulièrement intéressante à étudier. On sent bien que tous les scandales qui, depuis un siècle, s’étaient multipliés à Rome tendaient à supprimer le respect pour le siège