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JEAN (SAINT), DOCTRINE DES ÉPITRES JOHANNIQUES


lui seul on a la vie éternelle. * Qui a le Fils a la vie, qui n’a pas le Fils n’a pas la vie v, 12.

La / » Joannis insiste plus que le quatrième évangile sur l’expiation du péché opérée par le sang de Jésus-Christ. Jésus-Christ est venu, non pas seulement avec l’eau, mais avec le sang, v, 6, allusion à sa mort sanglante, et probablement aussi à l’eucharistie où se perpétue la vertu expiatrice de cette mort. Son sang nous purifie de tout péché, i, 7, Jésus-Christ s’est fait propitiation, lXaqj.6ç, terme qui indique l’action du prêtre offrant un sacrifice expiatoire, cf. Rom., iii, 25, pour nos péchés et aussi pour ceux du monde entier, ii. 2 ; cf. Joa., i, 29 et xi, 52. Ayant ainsi virtuellement expié tous les péchés, il purifie constamment les croyants des péchés qu’ils peuvent commettre, pourvu que ceux-ci les reconnaissent et les avouent, i, 9. Il le fait par son intercession auprès du Père, car il est le défenseur, l’avocat, rcapdbcXTjToç, des pécheurs. Peut-être cependant y a-t-il des péchés pour la rémission desquels il ne prie pas, car saint Jean distingue des péchés qui sont et d’autres qui ne sont pas ad modem, v, 16-17. L’intercession des frères peut obtenir la rémission des premiers, pour les seconds il ne convient pas de prier.

2. Le salut et ses conditions.

a) Nature du salut : la filiation dinine. — Le salut, c’est la vie éternelle, qui est communiquée en Jésus-Christ, lequel la possède pleinement, v, 11, 13. Par cette communication de vie divine, on a droit au titre d’enfants de Dieu, bien plus, on l’est réellement, iii, 1. Cette filiation divine est une réalité pour ainsi dire physique : le chrétien est engendré de Dieu par le moyen d’un germe (sans doute cette expression désigne-t-elle ici le Saint-Esprit) qui subsiste, et qui a pour effet de rendre l’homme capable de ne plus péch’r, aptitude trop négligée d’ailleurs, puisque l’auteur assure en un autre endroit que tout le monde pèche. La filiation divine se traduit par la ressemblance avec Dieu, dont le croyant imite la sainteté, iii, 3, la justice, iii, 7, la charité, iii, 16 ; mais cette ressemblance, imparfaite durant la vie terrestre, s’achèvera seulement dans la vie éternelle, lorsque l’union à Dieu seia consommée et que nous verrons Dieu tel qu’il est. iii, 2.

b) Conditions du salut. — La condition du salut, c’est toujours, et avant tout, la foi, la foi en Jésus-Christ, à son caractère messianique, et à sa filiation divine, iv, 15 ; v, 1, 5, 10. Cette foi est la profession d’une doctrine, dont il ne faut pas s’écarter : les épîtres johanniques insistent sur la nécessité de l’orthodoxie, et mettent en garde contre les fausses doctrines : t Quiconque ne reste pas dans la doctrine du Christ, n’a pas Dieu ; qui reste dans la doctrine, celui-là possède et le Père et le Fils. » II Joa., 9. Il ne faut même, ajoute saint Jean, avoir aucun rapport, tût-ce « le simple politesse avec les maîtres d’erreur. II Joa., 11. Cependant la foi qui sauve n’est pas simplement la profession spéculative d’une doctrine exacte, c’esl l’adhésion de l’âme tout entière a Dieu par le Christ, grâce à laquelle on est en Dieu et en son Fils : « Nous savons que le Fils de Dieu est venu, et nous a donne l’intelligence pour connaître le Véritable ; et nous sommes dans le Véritable, en son Fils Jésus-Christ. » I Joa., v, 20. Alors la foi ne reste pas inactive, et se manifeste par l’observation des commandements et l’imitation du Christ. La I* Joannis insiste beaucoup sur cette condition morale du salut, ii, 3-7 : m. 21-21 ; v, 3. Mais le commandement sur lequel saint Jean revient sans cesse, i. 7-11 ; iii, 13-23 ; iv, 7-1 I. 2(1-21 ; v, 2, c’est le commandement de la charité fraternelle, parce quic’esl en aimant ses lïercs, en allant Jusqu’à se sacrifier pour eux que le chrétien imite le mieux Mien qui est amour, et le Christ qui a donné sa vie pour les hommes, iii, Ki ; parce.pie la charité poul ie prochain que l’on voit et auquel on peut rendre service est la seule garantie que l’on aime vraiment Dieu que l’on ne voit pas et qui ne peut être objet d’un amour effectif par rapport à lui. iv, 20.

c) Les motjens de salut. — Les sacrements ne sont pas mentionnés clairement dans les épîtres johanniques. Mais il y a très probablement une allusion au baptême et à l’eucharistie dans le passage assez obscur, v, 6-8, sur l’eau et le sang qui rendent témoignage en même temps que l’Esprit. L’allusion est d’abord sans doute au baptême de Jésus et à sa mort ; mais saint Jean doit penser aussi au baptême du chrétien par lequel celui-ci s’assimile au Christ baptisé, et à l’eucharisti", par laquelle il s’unit au Christ mourant pour ressusciter. On peut se demander également si c l’onction » dont il est question I Joa., ii, 20, 27, ne ferait pas allusion au rite complémentaire du baptême, qui constitue le sacrement de la confirmation.

Eschatologie.

L’eschatologie des épîtres johanniques

diffère assez notablement de celle du quatrième évangile, et c’est une des principales raisons pour lesquelles beaucoup de critiques n’admettent pas que les lettres puissent avoir le même auteur que l’évangile. La doctrine sur les fins dernières qui y est exprimée, non point spécialement, mais en passant, se rapproche davantage par contre de l’eschatologie de saint Paul et de celle de l’Apocalypse. Tandis que le quatrième évangile met l’accent sur la vie éternelle déjà présente, dont la vie céleste ne sera que la consommation, la 7 a Joannis insiste davantage sur le second avènement du Christ, sa « parousie », à laquelle le chrétien doit se préparer, afin de n’être pas couvert de confusion devant le Christ lorsqu’il se manifestera, il, 28 ; et sur le jugement, iv, 17, qui accompagnera la parousie, et que peuvent attendre avec confiance ceux qui ont pour Dieu un amour parfait. L’auteur rappelle aussi à ses lecteurs la doctrine bien connue des chrétiens de son temps, d’après laquelle la fin du monde doit être précédée par la venue d’un Antichrist : Il voit cet Antichrist dans les faux docteurs qui, sortis de l’Église, essaient de séduire et de perdre les fidèles en leur enseignant l’erreur ; et il en conclut que la dernière heure est arrivée. I Joa., ii, 18. Ainsi, tandis que dans l’Apocalypse. l’Antichrist paraît être un individu, dans les épîtres johanniques, c’est une collectivité, une secte qui est désignée sous ce nom. Quant à la proximité de la fin du monde, le langage de la /" Joannis est conforme à celui des épîtres de saint Paul et de la 7° Pétri ; il doit être interprété de la même façon. L’idée essentielle, c’est qu’on est entré dans la dernière période de l’histoire du monde, mais la durée de cette période n’est nullement précisée, bien que la façon dont s’expriment les écrivains apostoliques laisse supposer qu’ils ne lui attribuaient pas une très longue durée. Cette interprétation large des données contenues dans les épîtres Johanniques s’impose, quand on admet qu’elles ont le même auteur que le quatrième évangile, car on est alors en droit d’expliquer l’eschatologie de l’épltre, plus conforme sans doute à la croyance populaire, par la doctrine plus spirituelle de l’évangile, et on peut conclure de ce rapprochement qu’il ne faut point interpréter trop Strictement les expressions qui, dans les écrits apostoliques, semblent indiquer la parousie comme prochaine Cf. Allô. L’Apocalypse, Paris, 1921, p. xcxviiic. xxvin.

t. Commentaires. l « Anciens. - Clément d’Alexandrie, Adumbrationes inepist. Z* m efJJ* IB J<i<m., P. o’., t.ix, col. 733-740 ; Didyme, in epist. Joan, enarrat., I’. G., I. wi. col. 1775-1812 ; s. Augustin, in Epist. Joan. ad Parthos, tract. A, P.L., i. xxx. coi. 1977-2062 ; Casslodore, Complextones m Epist. apostol., P. L., t. ix, col. 13691376 ; Bède, Exposit. in Epist. S. Johan., P. L., t. secra,