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503 JANSÉNISME, QUESTION DE DROIT ET QUES1 ION DE FAIT 504

constitution fut reçue du clergé, de la cour et de tous les ordres du royaume. »

La lettre d’Arnauld, écrit son éditeur, t. xix, p. xi., eut un succès prodigieux et fut présentée au pape le 27 août ; celui-ci en loua « la piété et l’érudition, mais demanda le silence. » Elle fut dénoncée à la Sorbonne le 4 novembre 1655 parle syndic Denys Guyart, comme « contraire à l’autorité du pape et des évèqucs et en opposition avec la foi catholique et les décrets de la faculté. » Arnauld protesta contre l’assemblée et dans les Considérations sur ce qui s’est passé en l’assemblée du -1 novembre 1055, Œuvres, t. xix, p. 602-('>2f>, il souligna les vices de fond et de forme. Il se porte appelant comme d’abus contre les conclusions de la faculté, mais le 12 novembre, un arrêt du Conseil ordonne de passer outre et d’examiner la lettre de M. Arnauld ; aussitôt celui-ci récuse les commissaires comme « étant ses adversaires et ses parties dans une lettre à M. Messier, cure de Saint-Landry (24 novembre), Œuvres, t. xix, p. C26. Rapln, Mémoires, t. ii, p. 310-322, 336-356, 528-536, raconte les scènes mouvementées qui se passèrent en Sorbonne du 2 décembre 1655 au Il janvier 1656 ; le chancelier Séguier dut assister aux délibérations pour y maintenir « l’ordre, la paix et la liberté. » On décida la question de fait le 14 janvier à la pluralité de 127 voix contre 9, mais après le départ de 60 docteurs et l’introduction dans la faculté de 40 moines mendiants qui n’avaient pas voix délibérative. La proposition d’Arnauld fut jugée « téméraire, scandaleuse, injurieuse au pape et aux évêques et même elle donnait lieu de renouveler entièrement la doctrine de Jansénius ci-devant condamnée. » La question de droit fut décidée le 29 janvier et la proposition d’Arnauld fut déclarée « téméraire, impie, blasphématoire, frappée d’anathème et hérétique, renouvelant la première proposition. » Il fut arrêté que, si, dans la quinzaine. Arnauld ne se soumettait pas à la censure et ne la souscrivait pas, il serait retranché du corps de la faculté et rayé du catalogue de ses docteurs. En fait cette condamnation d’Arnauld n’avait été obtenue que par un véritable coup d’État ; Arnauld ne se soumit point et la censure fut publiée avec les passages incriminés de la lettre d’Arnauld et les propositions condamnées (31 janvier 1656).

Arnauld avait déjà protesté contre le projet de censure le 27 janvier ; aussitôt après la publication de la censure, il reprit ses attaques. La Lettre d’un bachelier à un docteur de Sorbonne et la Réponse du docteur (février 1656). reparut plus tard SOUS une forme plus développée et sous un titre différent : l-cluircissement sur cette question morale et ecclésiastique si un docteur ou un bachelier peut en conscience souscrire. Œuvres, t. xx, p. 1-38. Arnauld rapproche ses thèses de celles de saint Thomas, connue d’ailleurs dans un autre écrit : Vcra S. Thomes de gratta sufl’icienti et ef}icaci doctrtna diluctde ezplanutur, Ibld., t. xx, p. 39 77. Arnauld s’élève encore contre sa condamnation dans ses Lettres npoloqét-ques à un évêque (M. Vialart), Œuvres, t. xx, p. 85-158. Il se plaint qu’on ait choisi pour commissaires des docteurs qui sont ses adversaires et qu’ila récusés ; de plus, parmi ses juges, il y a des docteurs demeurant à la communauté du séminaire de Salnt-Sulpice dont la conduite est en question el enfin on lui donnait pour juges un grand nombre de religieux mendiants, contrairement aux

Statuts anciens qui n’accordent le droit d’opiner qu’à

<ieu membres de chaque ordre mendiant

Dans la première lettre apologétique (10 mars 1656), Arnauld veut Justifier sa conduite depuis le commencement des assemblées de Sorbonne Jusqu’à la conclusion de la question de rail : dais la econde (24 mars), il parle de la question de droit et veul montrer l’injus tice de ses ennemis ; dans la troisième (15 avril), il justifie la proposition censurée par une partie des docteurs de Sorbonne ; enfin une quatrième lettre, qui ne fut pas publiée alors, signale les faussetés évidentes et les erreurs grossières dénoncées par la Sorbonne.

Peu après la censure de Sorbonne, Arnauld composa sa Dissertatio qucdripartila, Œuvres, t. xx, p. 159-314, « pièce très savante., disent ses amis, où il légitime sa doctrine et explique, en particulier, l’impuissance absolue de l’homme privé de la grâce. Cet ouvrage fut réédité en 1656, 1682, 1689.

Il est impossible de citer ici tous les écrits qui furent composés pour ou contre Arnauld. Œurres, t. xx, p. 315-842. Quesnel, dans la Causa Arnaldina (1699), a réuni tous les écrits latins publiés soit avant soit après la censure et, dans le Recueil des écrits français (1702), il ajoute un discours historique et apologétique dont la première partie n’est guère que la traduction de la préface latine de la Causa Arnaldina et la seconde est une réfutation des » faussetés annoncées, au sujet de la censure de 1656 », par Dumas dans son Histoire des cino proposition* (1699), ouvrage que le même Quesnel avait déjà réfuté dans La puix de Clément IX.

En même temps, les amis d’Arnauld, parla plume de Pascal, je’aient le ridicule sur les assemblées de Sorbonne : dans ses trois premières Lettres à un Pro"incial (23, 29 janvier, 9 février 1656), Pascal raille sur le droit et le fait, sur le pouvoir prochain et la grâce suffisante qui ne suffit pas. Les treize Provinciales suivantes sont dirigées contre la morale des jésuites. G. Hermant, op. cit.. t. iii, p. 1-6, 124-128.

Cependant l’assemblée du clergé s’occupa du jansénisme : le 23 août 1656, elle fit supprimer l’éloge de Saint-Cyran qui se trouvait dans la Gallia CttiJiana et décida de faire exécuter les bulles contre le jansénisme. G. Hermant, op. cit., t. iii, p. 130. Sur la relation de M. de M ::rca contre laquelle protesta Nicole dans Belga pcrcontntor, l’assemblée confirma tout ce qui avait été délibéié et résolu par les assemblées de 1653, 1654, 1655 et elle approuva en particulier la décision du 20 mai 1655 et le bref du 29 septembre 1654 qui imposaient la signature du formulaire. Contrairement aux thèses jansénistes, le clergé déclara que l’Église est faillible seulement pour les faits particuliers et personnels, mais non point pour les faits qui concernent la foi ou les mœurs dans l’Église, c’est-à-dire, pour les laits doqmuliques. Aussi, dans l’affaire de Jansénius, le droit ne peut se séparer du fait ; sans doute, il y a une distinction entre ces deux propositions : les cinq propositions contiennent une doctrine hérétique (droit) et cette autre : ces cinq propositions sont contenues dans le livre de Jansénius (fait). Ces deux propositions distinctes sont cependant Inséparables depuis que l’Église les a condamnées toutes deux, car l’Église n’a pu se tromper, quand elle a dit que le sens hérétique se trouve dans le livre de Jansénius, puisque P Église est infaillible dans le jugement qu’elle porte sur le sens des livres de religion.

Le 2 septembre, l’assemblée du clergé écrivit au pape une lettre dans laquelle les prélats rendent compte de ce qu’ils ont fait pour l’exécution des bulles

et du bref d’Innocent X.

Alexandre VU qui, n’étanl que le cardinal Chigi, avait été un des principaux commissaires nommés par [nnocent X pour examiner les cinq propositions, répondit par une nouvelle constitution Ad sanctam II. Pétri scicm (16 octobre 1656). Le pape déclare qu’ayant assiste comme cardinal aux congrégations qui eureni lieu sous son prédécesseur pour l’examen des cinq propositions, il atteste <|ue ces proposi lions sont tirées du livre de Jansénius et qu’elles furent condamnées dans le sens de cet auteur ; il les