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JANSÉNISME, L’AUGUSTINUS, T. III. CONCLUSION


corruption, il eût été malaisé de faire comprendre à l’homme la justice de Dieu dans les uns et sa miséricorde dans les autres pour leur inspirer la crainte ou la confiance, si Dieu ne leur eût mis, devant les yeux, des exemples sensibles pour leur représenter sans cesse les effets de sa justice et de sa miséricorde.

Cependant on ne peut pas dire qu’il y a, dans l’œuvre de Dieu, des créatures qui ont besoin du mal d’autrui pour devenir sages, car Dieu n’est pas l’auteur de la malice des méchants ; mais prévoyant qu’il y aurait des méchants, il les a créés et a fait profiter de leur malice ceux qui ne peuvent s’avancer dans le bien que par l’exemple des méchants. La vie des réprouvés sert de miroir aux justes qui peuvent y considérer les voies de Dieu et y reconnaître ses bienfaits,

c. XVII.

Les plaintes de ceux qui protestent contre la sévérité de Dieu a l’égard des réprouvés sont absolument injustifiées ; ils veulent examiner les jugements de Dieu par leur petite raison humaine et les blâmer, quand ils ne les croient pas justes. Ils devraient bien plutôt s’étonner de Is conduite de Dieu qui a condamne à l’enfer éternel tous les anges prévaricateurs au moment même où ils ont péché, qui condamne aujourd’hui les enfants qui meurent sans baptême. Qu’ils cessent denc de se plaindre, quand on dit qu’il va des hommes que Dieu ne veut pas sauver, qu’il ne veut pas délivrer de la masse de perdition, qu’il ne veut pas laisser baptiser, malgré la diligence et les soins des parents ; qu’ils cessent de critiquer Dieu qui permet que beaucoup vivent dans le monde sans recevoir le secours de sa grâce et se précipitent dans l’enfer par leurs péchés, puisque, sans la moindre injustice, il a pu tout d’abord les destiner à la damnation à cause du péché originel qui les a rendus dignes de cette punition, c. xviii.

Jansénius termine l’Augustinus par un épilogue final où il indique de nouveau la méthode qu’il a suivie : il n’a rien dit de lui-même, il a tiré toute sa doctrine de saint Augustin dont il a exposé les théories aussi objecti veinent que possible sur la grâce, l’état d’innocence et la chute du premier homme, les châtiments infligés à sa postérité, les forces et les faiblesses du libre arbitre, la nature pure, la libération de la nature déchue, la grâce médicinale de Jésus-Christ, la différence de la première et de la seconde grâce, l’accord de l’une et de l’autre avec la liberté, la prédestination et la réprobation des anges et des hommes. Beaucoup de ces choses, dit-il, paraîtront nouvelles et peut-être étonnantes à ceux pour qui les choses anciennes, parce qu’elle leur sont inconnues, paraissent nouvelles. Pour ce travail de restauration, il n’a épargné ni les prières, ni les labeurs opiniâtres pendant de nombreuses années, afin de découvrir la vraie pensée du grand docteur. Chemin faisant, il a rencontré beaucoup de modernes qui ont mal interprété la doctrine de saint Augustin et ont parfois pris les objections de ses adversaires, pour les solutions du docteur. Au reste, il n’a pas l’arrogance de prétendre qu’il ne se soit jamais trompé. € Je suis homme, donc exposé au péril des chutes humaines ». Homo sum, humanorum lapsuum obnoxius. S’il s’est trompé, ce n’est qu’en expliquant les sentiments de saint Augustin, car son but n’a point été de dire ce qui es* vrai ou faux, mais ce que saint Augustin a pensé. Il se soumet entièrement au jugement du siège apostolique et à l’Lglisc romaine, sa mère, pour condamner et anathématiser avec elle ce qu’elle estimerait condamnable et digne d’anathème ; il a été élevé au sein de cette Église, a été initié à la foi avec le lait de sa mère, a grandi, a vieilli et ne s’est jamais séparé d’elle par l’esprit, les faits ou les paroles et il veut vivre et mourir, attaché à son jugement.

    1. APPENDICE GÉNÉRAL A L’AUGUSTINUS##


APPENDICE GÉNÉRAL A L’AUGUSTINUS. — Souvent, au cours de son ouvrage, Jansénius a montré

l’écart, l’opposition même, qui existe entre la doctrine de saint Augustin et celle des nouveaux théologiens et, au tome I, il a maintes fois, signalé la ressemblance frappante des thèses molinistes avec celles des semi-pélagiens. Pour mieux mettre en relief cet accord foncier, Jansénius termine l’Augustinus par un parallèle entre les erreurs des Marseillais et les doctrines de quelques théologiens modernes. Ces théologiens sont Molina, Suarez, Vasquez et surtout Lessius.

Dans cet écrit, Jansénius signale 80 points ou notes divisées en 5 chapitres : l°la prédestination (18 notes) ; 2° la grâce efficace (notes 19-29), 3° accord et différence au sujet de la grâce admise par les uns et les autres (notes 30-G5) ; 4° opinion commune et propre à chacun au sujet de la prédestination (notes 66-73) ; 5° comment ils sont tombés par degré dans l’erreur (notes 74-80).

Jansénius conclut qu’il n’y a pas de différence essentielle entre la doctrine des molinistes et celle des Marseillais, en particulier au sujet de l’universalité de la grâce suffisante, de l’identité intrinsèque de la grâce suffisante et de la grâce efficace, de la prédestination postérieure à la prévision des mérites. Cette ressemblance va plus loin : les uns et les autres, pour asseoir leurs thèses, s’appuient sur les mêmes textes scripturaires et patristiques et ils font à la doctrine catholique de saint Augustin les mêmes objections.

Analyse « le quelques parties de l’Augustinus. Bibliothèque nationale, Ms. fr. 17 760 : Analyse des deux premières parties de l’AU(/USriNUS ; ms. fr. 13 890 : Jugement du livre de Corn. Jansénius, évêqued’Y près, intitulé Augustinus, par un docteur de Sorbonne, 16C0 ; ms. fr. 17 724 : Abrégé de la doctrine contenue dans le troisième tome de M.l’évéqued’Ypres.

Abbé***(Du Vau), Analyse de l’Augustinus de Jansénius où l’on expose toutes ses erreurs sur les divers états de la nature pure, de la nature innocente, de la nature tombée et de la nature réparée. On y joint les erreurs de cet auteur sur l’Église, la tradition, les Pères et les théologiens scolastiques, in-4°, (s. 1.), 1721. La Bibliothèque nationale possède un exemplaire avec de nombreuses lettres et notes préliminaires, Réserve D., 39 054 bis.

III. LES PREMIÈRES LUTTES JANSÉNISTES JUSQU’A LA PAIX DE CLÉMENT IX (1669).

La publication de VAuguslinus ne devait pas tarder à soulever des luttes ; celles-ci fuient alimentées encore par l’apparition de la Fréquente communion, d’ATnauld. Après s’être dispersée pendant quelque temps, la bataille ne tarda pas à se concentrer autour des cinq propositions. — I. Autour de l’Augustinus et de la Fréquente communion (col. 450). — II, Histoire des cinq propositions jusqu’à leur condamnation (col. 474).

— III. Les cinq propositions sont-elles dans l’Augustinus (col. 476) ? — IV. Autres erreurs ou exagérations contenues dans l’Augustinus (col. 496). — V. De la condamnation des cinq propositions à la Paix Clémentine, 1653-1669 (col. 500). On trouvera à la suite de chacune de ces divisions la bibliographie qui s’y rapporte.

Bibliographie générale. — Il est impossible de signaler tous les travaux théologiques et historiques qui ont été composés BUT le jansénisme ; on ne trouvera ici que les écrits les plus caractéristiques.

Théologie.

(Fr. De Ville), Préjugés légitimes contre le

jansénisme avec une histoire abrégée de cette erreur, depuis le commencement des troubles que Jansénius et M. Amauld ont causésdans le monde jusqu’à leur pacification, in-1 2, Cologne, 1686 ; Aniauld, PhantSme du jansénisme, ou justification des prétendus fansinistes pur le livre même. Intitulé : Les préjugés légitimes contre le jansénisme, publiée par Petitpied, in-8°, s. 1., 171 1 ; Jean Leporcq, de l’Oratoire, Les sentiments de S. Augustin sur la grâce opposés d ceux de Jansénius, in-4°, Boris, 1682, Lyon, 1700 ; Pierre de Saint-Joseph, De/ensio S. Augusttni Ippancnsis adversus Augustinum Iprcnsem quoad auxiltum grattas et hominis llbertolem, in- 1°, Baris, 1643 ; P.’tranquille de Baveux, capucin, Défense de la doctrine de S. Augustin touchant la grâce efficace par elle-même.