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put même être enterré « dans sa demeure », c’est-à-dire,

dans son propre tombeau. Is., xiv. 19. Le chant d’Isaïe s’adapterait beaucoup mieux au destin de conquérants comme Sargon ou Sennacherib qu’à celui du dernier roi de Babylone, le faible Nabonide, cqui ne fut d’ailleurs pas mis à mort par Cyrus. mais fait prisonnier, et préposé ensuite comme gouverneur à son ancien royaume Dans ces conditions, il faudrait admettre encore que la satire primitivement consacrée a un roi d’Assyrie aété reprise plus tard dans un oracle sur la ruine de l’empire ( haldéen, car c’est bien de la prise de Babylone par les Mèdes que traile la chapitre xiii, et le chant du chapitre xiv est lui-même encadre dans des versets qui se rapportent à la fin de la captivité, xiv, 14 », et à la destruction de Babylone. xiv. 22-23. Le P. Dhorme le reconnaît : « Il va sans dire que l’ancienne complainte sur la mort de Sargon a pu être recueillie dans un morceau plus récent. » Et alors la question de l’origine isaienne de l’oracle actuel contre Babylone des chapitres xiii-xiv se repose dans les mêmes termes qu’au début de cette étude. Beaucoup de critiques continu, nt d’ailleurs à croire que c’est bien la chute du monarque chaldéen qui est célébrée dans Isaïe xjv, 4'>-21, mais le prophète n’aurait pas précisément en vue Nabonide ni un autre roi babylonien déterminé ; le roi de Babylone lui apparaîtrait avant tout comme représentant du puissant empire chaldéen dont il décrirait la ruine dans la chute de son roi.

Nous avons examiné assez longuement le problème de l’authenticité des chapitres xiii-xiv, parce qu’il se reposera à peu près dans les mêmes termes à propos d’autres oracles du livre d’Isaïe.

/) xv-xvi, 12. — Les chapitres xv-xvi d’Isaïe contiennent, à proprement parler, deux oracles contre Moab, xv-xvi, 12 et xvi, 13-14. Le premier décrit l’attaque soudaine des forteresses de Moab, le deuil de ses habitants, leur détresse et leur fuite. xv.Sion est invitée à donner un abri aux fugitifs de Moab : cet acte de miséricorde affermira le trône de David, xvi, 1-5. La dévastation de Moab est le châtiment de son orgueil ; elle n’en excite pas moins la vive compassion du prophète, xvi, 6-12. Le second oracle reprend le premier pour son compte, et en fixe la réalisation à un délai de trois ans, xvi, 13-14. Cet épilogue peut très bien avoir pour auteur Isaïe qui l’aurait composé sous Sargon, peu de temps avant l’expédition contre Azot en 711, alors que les Moabites, les Philistins et les Égyptiens s’étaient ligués contre l’Assyrie. Quant au premier oracle, plusieurs indices permettent d’y voir une composition d’un prophète antérieur, reprise par Isaïe : l’épilogue constate lui-même que cette parole sur Moab a été prononcée autrefois, dans le passé ; le Ion, le style et le vocabulaire diffèrent assez de ceux d’Isaïe, il n’est pas rare de voir les prophètes adapter à leur époque des prophéties antérieures : un siècle après Isaïe, Jérémie, xlviii, reprendra à son tour l’oracle contre Moab pour annoncer à ce peuple sa ruine totale par les Chaldéens, comme Isaïe l’avait repris pour annoncer la dévastation par les Assyriens.

g) xix, 16-25. — L’oracle sur l’Egypte comprend deux parties. La première, 1-15, décrit les fléaux qui vont s’abattre sur l’Egypte et atteindre toutes les classes de la population. La seconde, 16-25, prédit le châtiment et la conversion de l’Egypte, le culte de Jahvé en Egypte, l’union de l’Egypte, de l’Assyrie et d’Israël aux temps messianiques. La première partie présente les meilleures garanties d’authenticité, il n’en est pas de même de la seconde. Non seulement le prophète proclame, comme dans la première partie, 1, 4, 12, 14, que Jahvé est l’auteur des désastres de l’Egypte, mais il suppose, 17, que les Égyptiens eux-mêmes connaissent ce dessein du Dieu de Juda, c’est pourquoi l’eflroi les saisit rien qu’au nom du pays de Juda.

D’autre part, le ton de sympathie à l’adresse de l’Egypte, l’annonce de sa conversion, et surtout les détails précis de la prédiction dans les versets 18-25 paraissent trahir un auteur de longtemps postérieur à Isaïe. L’Egypte connaîtra Jahvé et lui offrira des sacrifices, des offrandes et des vœux, 21 ; il y aura cinq villes sur la terre d’Egypte qui parleront la langue de Canaan et l’une d’elles s’appellera Léontopolis, 18 ; il y aura un autel pour Jahvé dans la terre d’Egypte, et à la frontière un obélisque lui sera consacré, 19. Ces prédictions détaillées d’événements lointains ne concordent guère avec la manière idéale dont les prophètes décrivent d’ordinaire l’avenir. On a même cru pouvoir identifier les cinq villes dont parle le verset 18 ; surtout la mention de Léontopolis semble bien contenir une allusion au temple construit en cette localité, vers 160 avant J.-C, par Onias iv, avec l’assentiment de Ptolémée Philométor Josèphe, Anliq., XIII, iii, 1. En conséquence, la composition de xix, 16-25 devrait se placer vers le milieu du iie siècle av. J.-C.

La force de cet argument dipend essentiellement de l’intirprétation du verset 18. Contient-il effectivement des détails si précis ? L’identification des cinq villes est purement fantaisiste ; le nombre cinq n’a que les apparences de la précision ; il signifie ici, comme en d’autres endroits de la Bible, un petit nombre, quelques villes, Lev., xxvi, 8 ; I Reg., xxi, 3 ; xvii, 40 ; IV Reg., vu, 13 ; Is., xxx, 17 ; xvii, 6, etc. La lecture Léontopolis n’est qu’une conjecture peu probable. Le texte massorétique actuel devrait se traduire : ville de destruction ; les LXX ont lu : ville de justice ; la Vulgate, Symmaque, un grand nombre d’exégètes (Houbigant, Knabenbauer, Crampon, Condamin, etc), lisent : ville du soleil, et cette leçon est la plus probable. « Le prophète ferait allusion à la ville de On, célèbre par un temple du dieu-soleil, d’où son nom grec’HXioujtoXiç. Jérémie parle des stèles ou obélisques de Beth-Sémès (maison du soleil : Héliopolis), xliii, 13. Parmi les ruines d’Héliopolis, à peu de distance du Caire, un obélisque est encore debout » (Condamin, op. cit., p 132). Dès lors, cette prédiction n’a plus rien d’insolite, et l’on ne voit pas pourquoi Isaïe n’aurait pu annoncer, vers l’an 700, la conversion des deux grandes puissances voisines de Juda, l’Egypte et l’Assyrie. Il prophétise entre autres la ditlusion de la langue de Canaan et du culte de Jahvé en Egypte et jusque dans les foyers de l’idôlatrie égyptienne. Cette prophétie se réalisa progressivement par les établissements successifs de colonies juives en Egypte et par la propagation du christianisme dans ces contrées. Il y a d’ailleurs des raisons positives qui militent en faveur de l’authenticité : les relations étroites qui existent entre 16-25 et 1-15 ; les expressions et les tours de phrase de 16-25 qui rappellent certainement Isaïe ; au verset 19, le symbole d’une ma<seb<ilt (sièle) élevée à la frontière d’Egypte, pour prédire le culte futur de Jahvé : après la promulgation du Deutéronome qui interdit si formellement toute ma>schâh comme idolatrique, le choix de cet emblème, dans ce but, serait tout à fait improbable.

h) xxi, 1-10. — A quel événement se rapporte cette prophétie sur la chute de Babylone ? Quelques critiques ont cru que* le prophète visait le siège de Babylone par Sargon en 710. A l’avènement de Sargon en 722, Mérodach-Baladan réussit à faire de la Babylonie un royaume indépendant. Le canon de Ptolémée le lait monter sur le trône de Babylone en 721. Pour affermir sa position, il chercha à gagner des alliés, tant à l’est, du côté d’Élam, qu’à l’ouest, du côté d la Syro-Phénicie, de la Palestine et de l’Egypte. C’est dans ce but qu’il envoya des ambassades aux différente, cours, entre autres à celle d’Ézéchias. Is., xkxix Sargon attaqua et défit le patriote babylonien en 710-7O&, et