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IMMACULÉE CONCEPTION


et pnsente comme plus raisonnable celle qui s’en tient à la sanctification de Marie au premier instant de son existence, en vertu d’une grâce prévenante, Alleg. IV, p. III : Prædidus modus ponendi sanctificationcm beatissimæ Virginis per gratiam præoenientem, est mullo rationabilior. Tout le reste du traite n’est qu’une réponse aux objections théologiques, patristiques et scripturaires. Deux ans plus tard, il composa les Septem auisamenla, reprise du travail précédent, mais d’une façon sommaire, et, souvent, plus pratique et plus intéressante. Les deux derniers avis sont d’une particulière importance, comme touchant de plus près, sous son double aspect, le problème agité. Le sixième concerne la croyance : vi. In quo summario declaratur, quomodo doctrina di sancta conceptione sil mullum conlormis ralioni, sacrée Scripluræ, pietali fidei et sancionim dodrinse. Le septième se rapporte surtout à la fête : vu. De innouanda jestiuitate et verilate diffinienda ; quodque celebritas hœc jam fueril in Ecclesia a Irecentis annis, in majorem devolionem semper excrescens. Enfin, Jean de Ségovie fit un recueil de quatorze miracles : Pulcherrima mirarula ab codem auctore studiosius coUeda, pro immaculata virginis Mariæ conceptione. En tête figure la vision d’Helsin ; entre le onzième et le douzième, on rencontre une double digression, sur la confrérie aragonaise de Notre-Dame, et sur une dispute publique qui avait eu lieu à Girone en 1390 et où le champion du privilège, Jean de Rota, sorti vainqueur, avait été couronné par le roi d’Aragon. Cf. Roskovâny, op. cit., t. I, p. 227, n. 1252. Cette troisième pièce, de l’aveu même de l’auteur, resta privée et ne parut pas aux débats publics.

L’ouvrage de Jean de Ségovie est incontestablement remarquable, malgré des déficits : les preuves, trop multipliées, sont de valeur inégale, l’érudition historique est souvent en défaut, et l’arbitraire a sa place dans l’interprétation des témoignages, allégués ou réfutés ; on peut aussi regretter l’immixtion de questions secondaires et systématiques, par exemple, quand l’auteur fait intervenir la théorie de l’incarnation indépendante du péché d’Adam, Alleg., ii, docum. III, p. 63 ; ce qui, rapproché de cette autre affirmation, en soi excellente : Esse matrem Dei, est privilegium Virginis ipsam eximens a peccato originali, Alleg., iii, p. 81, pourrait facilement donner l’idée d’une préservation simple, sans besoin réel de rédemption. En revanche, beaucoup de preuves sont bien présentées, et la valeur de certains faits pratiques est mise en rehef ; parlant de la fête, Jean de Ségovie avait raison de rappeler ce qui se passait depuis longtemps à la cour pontificale ; parlant de la pieuse croyance, il avait le droit d’invoquer en sa faveur le témoignage de presque tout l’univers, fere totius orbis, et de faire remarquer que l’assertion contraire ttait devenue, sinon dès le commencement, du moins depuis longtemps et surtout à l’époque du concile, si désagréable au peuple chrétien qu’il ne supportait plus de l’entendre. Alleg. i, docum. iv, p. 21 sq.

En face du traité que nous venons d’analyser, s’en dresse un autre, d’allures très différentes, mais dont l’importance n’est pas moindre en son genre. Il fut composé sur la demande des légats par le célèbre dominicain Jean de Torque mada, maître du Sacré-Palais, ensuite cardinal : Tradatus de veritate conceptionis beatissimæ Virginis, pro facienda relatione coram palribus concilii Basilicnsis, anno Domini M. CCCC. XXX. VII, mense julio, de mandata sedis apostolicæ legatorum, eidem sacro concilio præsidentium, compilatus. Il ne fut imprimé qu’en 1547, à Rome, par les soins d’Albert Duimius de Catharo ; Pusey l’a fait réimprimer à Oxford et Londres, en

1869. Sous la forme où il nous est parvenu, ce traité comprend treize parties ou sections, subdivisées en chapitres qui, additionnés, montent au chiffre de 351. Véritable somme de l’opposition, où se trouve réuni tout ce qu’on pouvait alléguer contre la croyance et contre la fête. Dans la VP partie, c. xxv-xxxvi, il énumère une certaine quantité d’auteurs de toute provenance, comme opposes à l’exemption de Marie. La position générale est celle de saint Thomas et des scolasliques de la même époque. Dans une Dispiitalio generulis, elle est résumée en ces dCux propositions : Omnes homines preeter Chrisium conlraxerunt peccatum originale, et : Solus Christus fuit immunis ab omni prorsus peccato. D’où comme corullarium genercde totius operis, cette affirmation finale, que la vraie piété n’est pas dans le sens du privilège, mais à l’opposé : Magis pium est credere beatam Virginem conceptam esse in originali peccato, quam oppositum. Affirmation modérée dans les termes, et même plus large que les pri misses ; car si celles-ci avaient été vraies, dans le sens de l’auteur, il aurait fallu conclure à un rejet pur et simple de l’opinion favorable à l’exemption.

En ce qui concernait la fête, Torquimada concluait : « Si l’on tient à l’instituer en ordonnant qu’elle soit célébrée dans f Église, il faut plutôt lui donner le nom de sanctification que celui de conception : convenientius nominandum venit festum sandificationis, quam conceptionis. » Part. III, c. ix : Tertia conclusio. En réalité, il n’était pas favorable à cette institution. Jean de Ségovie avait dit, Alleg. i, docum. iv, p. 21 : « C’est un fait notoire que la cour romaine, près le siège apostolique, célèbre chaque année, le huit décembre, cette fête de la Conception, et que les cardinaux, les prélats et les membres les plus éminents de cette cour y prennent part d’un commun accord. «  Torque mada répond « en niant que l’Église romaine ou le siège apostolique ait institué ou canonisé ou proclamé ou célébré la fête ou qu’elle l’ait fait inscrire au calendrier. On n’a pas le droit de donner comme fait ou ordonné ou institué par l’Église romaine ou le siège apostolique, tout ce qui se fait à la cour romaine soit par nos seigneurs les cardinaux, soit par les évêques, soit par le peuple, soit par les rédacteurs des bréviaires et des missels. Car on ne peut pas dire de l’Église romaine (en entendant par là, comme d’ordinaire, le siège apostolique qui tient de Notre-Seigneur la plénitude de fautorité), qu’elle célèbre une fête quand nos seigneurs les cardinaux ou les prélats ou le peuple romain ou les officiers de la chancellerie se réunissent, par motif de dévotion, dans une église pour y assister à la célébration d’une messe solennelle, mais seulement quand le souverain pontife, entouré du collège de nos seigneurs les cardinaux de Rome, célèbre cette fête solennellement dans un lieu public. » Part. IX, c. xvi. Mais n’était-ce pas jouer d’équivoque que de répondre ainsi ? Que l’Éghse romaine, considérée’comme dépositaire du magistère universel et suprême, ne se fût pas encore prononcée en faveur de la fête, qu’elle ne l’eût pas inscrite au canon, Jean de Ségovie et ses amis le savaient bien, puisqu’ils demandaient précisément qu’on en vint là. Mais il y avait, en outre, l’Église romaine, ou du moins la cour pontificale, considérée comme corps particulier ayant ses traditions, ses cérémonies, ses fêtes pratiquées au vu et su des papes qui, souvent, y participaient eux-mêmes. Ce fait, car c’était un fait, et vraiment notoire, ne pouvait-il pas être invoqué comme beaucoup d’autres, en faveur de la fête ?

Le traité de Torquémada ne fut pas examiné par les Pères de Bâle. L’auteur raconte, à la fin de l’ouvrage, qu’après f avoir composé, il s’était présenté au concile, ad faciendam relationem mihi injundam. Le