Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 7.1.djvu/555

Cette page n’a pas encore été corrigée
1095
1096
IMMACULEE CONCEPTION


nal et régis en même temps par des chapitres généraux ayant pouvoir de formuler des ordonnances communes ; tous ces ordres suivent peu à peu l’exemple donné, aux siècles précédents, par tant de monastères bénédictins, et, plus récemment, par l’ordre franciscain. Les carmes adoptent la fête dès le commencement du xive siècle, peut-être en 1306, au chapitre de Toulouse. Voir t.iii.col. 1788 ; B. Zimmerman, Ort/mai’re de l’Ordre de Notre-Dame du Monl-Carmel par Siberl de Beka (vers 1312). Paris, 1910, p. 267, sq. ; P. Doncœur, loc. cit., p. 45 (281). Les prémontrés suivirent de près les carmes, s’ils ne les précédèrent pas, comparer Mabillon, Sancti Bernardi opéra, Paris, 1690, t. i, col. Lxi, n. 140, et S. Beissel, Geschichte der Verehrung Mariens in Deuischland wahrend des Mittelalters, p. 211 ; Geschichte der Verehrung Mariens iin 16. und 17. Jahrhunderten, p. 226. Une ordonnance du chapitre général des chartreux, en 1333, étabht la fête. Voir t. II, col. 2303. Elle existait certainement chez les trinitaires, les servîtes et autres ordres. Les dominicains eux-mêmes l’instituèrent, quoi qu’il en soit du sens donné : en 1388, pour l’obédience d’Avignon, au chapitre de Rodez ; en 1391, 1394 et 1397, pour l’obédience de Rome, aux chapitres de Ferrare, Rimini et Francfort. R. P. Mortier, op. cit., t. iii, p. 631 sq., 645. En somme, sur la fin du siècle, les ordres religieux s’étaient ralliés au culte de la Conception.

b) Témoignages particuliers. — a. Angleterre. — En 1328, dans le concile tenu à Londres sous l’archevêque Mepham, la fête fut déclarée obligatoire pour la province ecclésiastique de Cantorbéry, et par conséquent pour la plupart des diocèses anglais : festive et solemniter de cœtero celebretur. Wilkins, Concilia magnæ Brilanniæ et Hiberniæ, Londres, 1737, t. ii, p. 552. Aussi figure-t-elle sur le catalogue des fêtes chômées dressé vers l’an 1400, par l’archevêque Richard Arundel. H. Spelman, Concilia, décréta, leges, constitutiones orbis britannici in re ccclesiastica, Londres, 1644, t. ii, p. 659. York ne resta pas en arrière, puisque la messe de la Conception figure au célèbre missel de cette Église, dans la partie qui date au moins du xiv » siècle : The York Missal, édit. Henderson, Durham, 1872, t. ii, p. 6. En Irlande, la fête fut établie pour toute la province ecclésiastique de Dublin par l’archevêque Jean de Saint-Paul, dans un concile provincial tenu l’an 1351.

b France. — On n’y rencontre pas.encore d’ordonnances prescrivant la célébration de la fête d’une façon générale, mais le progrès suit une marche constante, comme on peut en juger par la simple énumération d’endroits indiqués par Mgr Malou, t. I, p. 122 sq., où il s’agit d’institution ou de confirmation ou de simple mention de la fête ; Châlonssur-Marne, 1306 ; Cambrai avec ses sufCragants, 1310 ; Orléans, 1317 ; Soissons, 1334 ; Langres et Albi, 1337 ; Meaux, 1356 ; Strasbourg, 1364 ; Lavaur, 1368 ; Annecy 1370. Énumération très incomplète et, par là même, impropre à donner une idée suffisante du progrès accompli. Pour s’en convaincre, il suffit de recourir aux documents liturgiques étudiés par le P. Noyon, voir col. 1042 ; de son enquête, inachevée pourtant, il résulte que sur environ 64 manuscrits consultés ou signalés, 56 ont la fête, soit mentionnée au calendrier, soit mise à son rang, avec simple renvoi à la Nativité ou avec office propre, en tout ou en partie. Beaucoup de ces pièces ne font que confirmer des données acquises déjà ; tel est le cas, en général, - pour celles qui se rencontrent dans les bibliothèques de Paris ou de Normandie et qui concernent des églises de cette ville ou de cette province. A l’occasion, tel document a sa valeur particulière. Ainsi, nous apprenons qu’en 1327, Hugues Micheli de Besançon, évêque de Paris, se rendit au chapitre de sa cathédrale et manifesta l’in tention de faire de la Conception une fête annuelle et pontificale, et les chanoines d’accepter avec d’autant plus d’empressement que, suivant leur remarque, le prélat aurait plus à mettre du sien qu’eux-mêmes en cette alTaire : 1327. Rev. D. D. Hugo par ep. venil ad capitulum parisiense, et dixit quod ipse volebat quod festum conccptionis esset annuale et dies episcopalis, et cantorius et capitulum respondit quod ipse hoc volebat quia plus de suo in hoc opère debebat ponere quam ipsi. Archives nationales, LL, 283, p. 17. Par là s’expliquent les formules de bénédiction épiscopale pour la fête de la Conception, qui apparaissent dans les pontificaux parisiens de date postérieure, par exemple ms. lat. 962 et 964 de la Bibliothèque nationale.

Des bréviaires conservés dans les divers fonds de la capitale rendent témoignage à d’autres régions : Châlons-sur-Marne, Chartres, Limoges, Meaux, Metz, Noyon, Orléans. Aux archives du chapitre de Bayeux, un missel et pontifical d’Etienne Loypeau, qui monta sur le siège de Luçon en 1388, contient, pour le jour de la Conception, une bénédiction dont l’air de parenté avec celles que nous avons rencontrées aux siècles précédents est frappant : Omnipotens Deus sua vos dignetur protectionc benedicere, qui hune diem per conceptionem béate Marie fecit clarescere. Amen. Et qui per eam filium suum voluit nasci, eius intercessione ab omni vos jaciat adversitate deffendi. Amen. Quo in presenti eius mcritis et precibus adiuti sempiterna valeatis gratanter felicilate per/rui. Amen. D’autres diocèses, comme Nantes, Tours, et, dans le midi, Avignon, Auch, Causerans, Tarbes, trouvent dans leurs propres archives des preuves de leur ancien culte envers la conception de Marie. Nîmes semble de voir être ajouté, d’après le manuscrit signalé col. 10&2 Sans compter les ordres religieux, dont la part est riche : bénédictins, de Cluny ou de Saint-Maur, célestins, dominicains, guillelmites, niathurins ou trinitaires, représentés par des bréviaires ou des missels dans les diverses bibliothèques de Paris ; cisterciens, par un missel de Morimond, à la bibliothèque de Chaumont ; prémontrés, par un martyrologe de Mondaye, au chapitre de Bayeux ; en outre, d’après les Analecta hymnica, t. Lrv, p. 278, le Mont Saint-Michel et Fontevrault, l’un par un missel et l’autre par un graduel, biblioth. d’Avranches et de Limoges.

Avec le culte se développe la dévotion des fidèles envers la conception de Marie ; à preuve, l’établissement à Paris, d’une confrérie sous ce vocable dans l’église de Saint-Séverin, dès 13Il ou du moins avant 1361. Lesêtre, op. cit., p. 38. Parmi les étudiants de l’université, l’exemple donné au siècle précédent par la nation normande est imité : la fête de la Conception est adoptée par la nation anglaise, en 1376, Auctarium Chartularii, t. i, p. 481, et par la nation française, en 1380. Chartularium, t. II, p. 297. L’université elle-même célébrait la fête, comme on le voit par un calendrier en usage au xiv<e siècle : Decemb. S. Conccptio sancte Marie virginis. Non legitur in aliqua jacultate. Chartularium. t. II, p. 715. L’usage était certainement antérieur à la fin du siècle ; dans les conclusions de son Compendium veritatis immaculatx conccptionis, compose vers 1390, François Martin reproche aux anciens étudiants de l’université qui ont juré d’en garder les statuts, de manquer à leur serment, s’ils ne font pas la fête de la Conception, vu que c’est là un point des statuts : patet, quia de hoc est statutum in studio Parisiensi. Mais de quelle époque datait l’usage ? Dès le milieu du siècle, Ludolphe Caracciolo fait allusion, loc. cit., à des statuts relatifs à la fête, qu’il veut observer : et quia juratus Universitati Parisiensi, ipsius statuta scrvare cupicns, huius sacrx