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IMMACULEE CONCEPTION


sidère comme contenue dans la chair de Marie, soumise elle-même à cette loi, ceux-là cherchaient dans la purification opérée au jour de l’annonciation un moyen d’exphquer comment la chair prise par le Verbe n’était plus chair de péché quand il la prit. Ce qu’ils avaient en vue directement, c’était donc de sauvegarder la pureté absolue du Sauveur, pureté qu’ils auraient cru compromise s’il avait reçu de sa mère une chair restant dans la condition où elle-même l’avait reçue. Ce qui montre qu’au xiie siècle, le principal obstacle à la croyance en l’immaculée conception vint des fausses idées qui régnaient dans l’esprit d’un grand nombre sur la nature du péché originel et de la concupiscence et sur les rapports mutuels de l’un et de l’autre.

3 » Progrès de la fêle. — Qu’au xiie siècle la conception de Notre-Dame ait été célébrée en beaucoup d’endroiis, c’est là un fait incontestable : quam populus Christi longe latcque concélébrai, pouvait dire l’anonyme d’Heiligenkreuz. De son côté, Abélard commen » cait ainsi son traité : « La plupart, plcrique, sont animés d’un tel sentiment de dévotion envers la mère du Seigneur que, non contents de célébrer sa naissance et sa mort, ils ont encore institué une autre fête pour honorer le jour de sa conception, verum ctiam diem que conccpla est, institærini solemnem. » Ces témoignages sont corroborés par celui d’un adversaire, le canonisle Huguccio de Pise, (évêque de Ferrare en 1190) ; dans une glose sur le Décret de Gratien, il reconnaît que la fête se solennise « en beaucoup de régions, surtout en Angleterre : sicut in miiUis regionibus fit, præserdm in Anglia. » Toute preuve serait superflue en ce qui concerne ce dernier pays ; disons seulement que la fête de la Conception est mentionnée dans plusieurs manuscrits liturgiques postérieurs à ceux qui ont été déjà signalés et se rapportant aux monastères de Saint-Alban, vers 1160, de Westminster, vers 1189, et d’Abingdon, sur la fin d’.i siècle.

La France rivalise avec l’Angleterre. La fête de la Conception aura’t été célébré en Il iO dans l’Église de Narbonne, dit Pierre d’Alva, Funiculi nodi indisso-Itibilis, p. 229, d’après un ouvrage ms. de l’èvêque de Toul, .

dré du Saussay : Séries chronologica rerum in ncclesio occidenlali geslanim circa celebraliorum Fesli cuUum, que mi/sterie immaculaUv conreplionis Suiic Œi Genitricis Mariie, ab ipsiiis, Fesli instilutione ad hoc usquc tempera. L’assertion aurait besoin d’être confirmée. En) 1.54,.tton, prieur du monastère bénédictin de Saint-Pierrc-de-la-Réole. au diocèse deBazas, Institue la fête en présence et par l’autorité de l’èvêque, Guillaume de Tantalon (qui l’aurait aussi prescrite dans son diocèse) ; Alton justifie l’introduction de la nouvelle solennité par ce considérant, que le peuple chrétien la célèbre maintenant en France presque universellement et avec la plus grande dévotion. » Marlènc, De antiquis monaclwrum ritibns, Lyon, 1690, t. IV, c. II, n. 16 ; A. Degert, Le culte de l’immaculée conception en Gascogne, Auch, 1004, p. 533, 544. Alfirmation emphatique dans les termes, mais confirmée pour diverses régions par des témoignages moins généraux, notamment par des missels et autres documents liturgiques conservés dans des bibliothèques publiques : à Paris, bibliothèque Mazarine, un missel parisien ; à Nantes, collection Delbrcl, un missel angevin ; à Houen, divers missels provenant des abbayes de Jumièges et de Fécamp ou de Rouen même, abbaye de Saint-Ouen et cathédrale, outre un sacramentaire d’.vranches, côté xe siècle, mais avec insertion au xii< d’une messe de la Conception, identique à celle du missel de Winchester mentionné ci-dessus, col. 1005. A. No von. Notes bibliographiques, juillet-octobre 1920, p. 307 ; i :. Vacandard, Les ori gines de la fèle de la Conception dans le diocèse de Rouen, p. 168 sq. Sans compter, pour ce qui est de la Normandie en particulier, plusieurs faits qui confirment l’extension et la solennité du culte en cette province : à Bayeux, une charte est rédigée par l’èvêque Henri II (1155-1205), in capella nostra die lune post festum conceptionis béate Marie ». Cartularius antiquus ecclesie Baiocensis, édit. V. Bourrienne, 1. 1, p. 145 ; à l’abbaye de Saint-Pierre-sur-Dives, rattachée alors au diocèse de Séez, la fêle est mentionnée dans un coutumier comme très solennelle ; à Rouen, les archevêques Rotrou (1165-1183) et Gautier le Magnifique (11841207) instituent ou confirment une distribution de pain et de vin en faveur de leur chapitre pour la célébration de la fête du 8 décembre ; en 1197, une procession publique se déroule le même jour dans les rues de la ville, etc. E. Vacandard, art. Les origines de la fête, p. 268 ; A. Noj’on, Les origines de la fête, p. 28 (786). Dans la région lyonnaise, l’opposition de saint Bernard n’avait pas triomphé ; au siècle suivant, Etienne de Bourbon, prédicateur dominicain, originaire de Belleville-sur-Saône, le constatait en signalant la coutume de la métropole et des églises dépendantes, qui font la fête de la Conception : Lugdunensis ecclesie consueludinem, que cum suis suffraganeis de conceptionc eius festum facit. A. Lecoy de la Marche, Anecdotes historiques, légendes et apologues, tirés du recueil inédit d’Etienne de Bourbon, dominicain du XIW siècle, publiés pour la Société de Vhistoirede France, Paris, 1879, p. 93 sq. Un calendrier de l’Église de Reims porte au 8 décembre : Concepcio bcate Marie, IX Iccl., IX cerei, avec mention d’un legs fait par Gui Pied-de-Loup, qui fut chanoine en 1193 et 1197. U. Chevalier, Sacranjen^j/re et martyrologe de l’abbaye de SaintRemy, Martyrologe, calendrier, ordinaires et prosaires de la métropole de Reims, Paris, 1900, p. 90. Saint -Vincent de Laon doit être ajouté, s’il s’agit bien, comme il semble, de la solennité du 8 décembre dans l’Obituarium de cette abbaye bénédictine ; car il y est dit que l’abbé Baudoin de Retest (f vers 1152) fit en mourant divers legs relatifs à des jours de fêle, notamment celui de la Conception, in Conceptionc. Dom R. Wyard, Histoire de l’abbaye Saint-Vincent de Laon, publiée, annotée et continuée par l’abbé Ccrdnn, Saint-Quentin, 1858, p. 404.

L’Allemagne apporte aussi ses témoignages. Un office de la Conception apparaît dans deux manuscrits, donnés par G. Dreves comme étant du xiie siècle : un Codex lat. monaccns., provenant de Schtiftlarn, en Haute-Bavière ; un Codex Virunen.(l Friesach, en Carinthie). Analecin hymnica, t. v, n. 12 ; voir aussi t. IV, n. 65. De même une hymne ou cantique, dans un Codex wirceburgens. (Wurzbourg), Ibid., t. xx, n. 297. A.ugsbourg, la fête fut instituée au monastère de Saint-Ulrich sous l’abbé Henri (1183-1188), à la demande de l’archevêque de Mayence, Conrad von Schleyern, et du consentement de l’èvêque d’Augsbourg, Udelscalk von Eschenlohe. F. G. Hôynk, Geschichte der kirchlichen Liturgie des Bistums Augsburg, Augsbourg, 1889, p. 282. On la célébrait, à la fin du siècle, à l’abbaye bénédictine de Wessobrun, en Haute-Bavière. Celest. Leutiier, Ilistoria monasterii Wesso(ontani, Augsbourg, 1753, p. 205, 235 sq. Vers l’an 1200, elle est indiquée dans un martyrologe de Seligenstadt. F. Faite, Marianum Mogunlinum, Mayence, 1906, p. 65,

Moins nombreux sont les renseignements relatifs aux autres pays. Pour la Belgique, mention est faite dans la (Chronique de (iilles d’Orval, à l’année 1142, d’une révélation privée lendanl à porter l’èvêque de Liège. Albéron II, à faire célébrer la fête dans son diocèse. I.ii 1195, deux diplômes sont octroyés par