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insufnsaniinciU éUihlics, jjar cxeinpie, que le pape Pascal 11, consacranl en 1100 la lunivelle l ; asilique de l’abbaye d’Ainay, y aurait béni un aulel sous le vocable de la (^oncejjtion immaculée de Marie, comme il est rapjjorlé dans la Chronique de la très ancienne abbaye ruijale d’Ainay, par le chanoine J.-B. Lamure : ou que Gauccrand, d’abord abbé de (C monastère, puis primat des (ùuiles (1107-1118), aurait été le véritable proiiioteur du culte de la Conception, comme on le lit dans Lyon et Marie du chanoine J.-B. Vanel. Le fait historique, c’est l’existence de la fête à la primatiale de Saint-Jean dans le second quart du xii<e siècle, ou, d’une façon plus pncise, l’an li ;  ; G, s’il faut en croire Pierre de Alva, Funieiili nodi indissoliibilis, Bruxelles, 1663, p. 229 : 1136. In .suncta Ecclesia Lugduncnsi solemniter celebrabaliir Concej’linnis feslum, ut constat ex quodam instrumenta authentieo a nobis visa et lecto apud D.D Andreum Sausay, cum sigiilo Capituli Lugdunensis. D’après le contexte, c’est d’André du Saussay, évêque de Tout au xviie siècle, qu’il s’agit.

Sous quelle influence l’événement s’était-il produit ? Sonjjer à saint Anselme, connue l’a fait ! M. Bernard, L’Éylise de Lyon et l’immaculée conception, p. 18 sq., paraît chose bien difficile après ce qui a été dit précédemment de ce docteur : mais il n’est pas hors de ]iropos de rappeler que son aller ego, Anselme le .Jeune, avait passé par Lyon, comme par Rouen, quand il rentra dans son monastère de Cluses après la mort de son oncle et, plus tard, quand il revint de Rome en Angleterre avec le titre de légat apostoliciue. L’allusion que, dans sa lettre, saint Bernard fait au récit d’une révélation céleste qu’on mettait en avant, profertur scriptum superniv, ut aiunt, revelationis, reporte naturellement l’esprit à la vision d’Helsin et suggère la probaldlité d’une dépendance entre Lyon et l’Angleterre, en ce qui concerne le culte de la Conception. Conjecture dont la valeur croîtrait beaucouji, s’il était permis d’interpréter l’objet de la fête lyonnaise au XII’e siècle d’après le missel imprimé de l’abbaye d’Ainay ; car si ce livre ne date que du xvit’siècle, il reproduit manifestement un texte ancien. Le culte s’j' adresse à la mère de Dieu, considérée dans sa pureté et son innocence ineffables : ul qui ine/fabilis ejus innoccntiiv puritatem sincera devolione confitemur (Postcommunion). Il s’adresse aussi à sa conception proclamée sainte : ut qui simclissimum ejus conccptum per hec sacra mysteria jubila ndo veneramur (Secrète). Il s’étend même au corps de la bienheureuse Vierge, lui aussi déclaré saint et préservé de toute souillure du péché : Omnipotens et misericors Dcus, qui corpus bcatissime Virginis Marie sanctum esse preordinasti, et ab omni pcccali immundicia preservasti, ut Verbum tuum ex eo carnem assumcret (Première oraison). Incliti cenobii athematensis in diœcesi Lugd. ordinis divi Benedicti niissule nunquam anteu iniprcssum, avec cette indication à la fin du volume : Ir.ipressum in diclo monasterio atlianatensi aiuw domini 1331. Cette manière d’envisager la fête de la Conception n’est-elle pas celle-là même que nous avons rencontrée dans les écrits d’Eadmer et d’Osbert de Clare’?

Quoiqu’il en soit de l’intluence subie et du motif déterminant, les chanoines de la primatiale avaient adopté la fête, et c’est là ce qui détermina l’intervention de saint Bernard. Dejjuis quelque temiJs, il suivait le mouvement d’un œil inquiet, gardant le silence avec une certaine impatience, « par égard pour la piété de ceux qui agissaient de la sorte dans la simplicité de leur cœur et par amour de la Vierge. » Jugeant que le temps de réagir était enu, il écrivit vers 1138 (date donnée par Pierre de Alva et préférable à celle de 1128-1130, proposée par M. l’abbé. Vacandard) sa fameuse lettre ad canonicus Lugdunenses Epist.,

ci.xxiv, ]>. L, t. ci.xxMi, col. 332. Elle débute ))ar un splendide éloge de l’Église-mèrc, reconnnandable par la dignité de son siège, l’éminence de la doctrine et la fécondité des saintes institutions, la vigueur de la discipline et la gravité des mœurs, la maturité dans les conseils et le poids de l’autorité, le respect du passé, surtout en matière liturgique ; mai^ ce bel exorde n’en prépare que mieux l’attaque, la protestation du grand a !)bé contre ce qu’il considère comme une innovation malheureuse et répréhensiblc, cette acceptation d’une solennité « étrangère au ritode l’Kglise, dénuée de fondement rationnel et d’appui dans l’ancienne tradition : guam ritus Ecclesiæ neseil, non probat ratio, non commendat antiqua. tradilii’. Qu’il faille honorer la mère de Dieu, et l’honorer beaucoup, rien de plus rai ; mais il faut y mettre de la discrétion. L’Église fête son asscmption : elle fê.e sa natiité, et du culte rendu à sa naissance il faut conclure que Marie fut sanctifiée dès le sein de sa mère, ante sanctu quara iiata ; privilège insigne, dont la mère de Dieu a dû être honorée à plus juste titre encore, que Jérémie et Jean-Baptiste. Maintenant on prétend vénérer la conccption de la Vierge, comme la naissance, par ce motif que l’une suppose l’autre (cf. pseudo-Ansehne, Sermo de conc^ptione, P. L., t. eux, col. 321 : ita débet ejus exiolli conceptio ; nisi enim concipereiur, nunquam /icscrrc/izr^. Argument sans portée : de ce que la conception précède la naissance, comment suit-il que celle-ci doive à celle-là son caractère de sainteté : Xumquid quoniam præcessit (natalemj, fecil et sanctum ? Vainement prétend-on s’autoristr d’une révélation d’en haut : « comme si le premier venu ne pouvait pas également produire un écrit où la Vierge serait censée demander le même hommage pour ses propres parents 1° Les récits de ce genre ne sont recevables que s’ils ont l’appui de la saine raison et d’une autorité indiscutable.

Quittant alors le point de vue juridico-liturgique, l’abbé de Clairvaux aboriie la question de fond. < D’où viendrait donc la sainteté de cette conception ? Veut-on dire que Marie, préalablement sanctifiée, aurait été déjà sainte, quand elle fui conçue et qu’en conséquence sa conception elle-même auiait été sainte, qualenus jam sanctu concipcretur ac per hoc sanctus fuerit et conceptus ? Ainsi la dit-on sanctiliée dans le sein de sa mère, pour que sa naissance, elle aussi, fût sainte. Mais Marie n’a pas pu être sainte avant d’exister, et elle n’existait pas avant d’avoir été conçue. Dira-.-on que pendant l’acte générateur la sainteté se serait mêlée à la conception, et que de la sorte il y aurait eu en même temps conception et sanctification ? Mais la raison s’oppose encore à cette hypothèse. Ccmment yaurait-il eu sainteté sans l’Esprit de sanctification ? ou comment l’Esprit-Saint aurait-il pu s’associer au péché ? ou comment n’y aurait-il pas péché quand il y a volupté charnelle ? Nulle issue, à moins qu’on n’en vienne à dire, ce qui serait chose inouïe, que Marie fui (onçue du Saint-Esprit, et non pas de l’homme ? Après avoir rappelé qu’une telle conception est k privilège exclusif du Verbe incarné, Bernard conclut : ce Si donc la Viei-ge na pas pu être sanctifiée avant sa conception, puisqu’elle n’existait pas alors, ni au moment même de sa conception, puisque le péché s’y rencontrait, que reste-t-il si ce n’est de croire qu’elle a reçu le don de la sainteté après sa conception, alors que déjà elle existait dans le sein de sa mère ; don qui, faisant disparaître en elle le péché, a rendu sainte sa naissance, mais non ] ?as sa conception ? » Conséquence : la sainteté manquant, comment la conception de Marie jiourrait-elle être un objet légitime de culte ? quomodo… festus habebitur (conceptus j. qui minime sanctus est ? En tout cas, on n’aurait pa> dû agir avec tant de inécipitation et de légèreté ; il