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chose en soi, et suivant le double rapport qu’il soutient avec ces deux extrêmes, il reçoit une double qualification. Par rapport à la chose, à laquelle il est conforme, il est dénommé vrai ; par rapport à l’intelligence du croyant, à laquelle il ne fait pas apparaître la chose par le dedans, ; '/ ! suis intrinsecis, il est dénommé obscur. » De virtutibus infusis, 1905, 2e édit., thés, x, coroll., p. 239. Cette obscurité, qui tient à notre manière naturelle de concevoir par concepts très imparfaits sur Dieu, et par énoncés groupant ces concepts, est une imperfection qui vient du sujet, mais que l’on peut attribuer à la foi elle-même, acte ou vertu. La foi, en effet, n’est pas un don qui transforme notre connaissance abstraite de Dieu en vision intuitive — ce que fera au ciel le lumen gloriee — mais en élargissant notre connaissance et en lui donnant plus de certitude, elle en laisse subsister l’imperfection innée, et pour elle-même utilise les énoncés composés de concepts, si défectueux surtout quand il s’agit de connaître Dieu. C’est ainsi qu’elle s’adapte aux condition^ de cette vie d'épreuve, où nous devons lutter librement contre l’incrédulité et le péché, que la vision intuitive de Dieu rendrait impossibles ; où le mérite de la volonté compte beaucoup plus que la perfection et la satisfaction de l’intelligence ; car dans cette vie il s’agit de mériter la claire vue de Dieu, et non pas dru jouir. De là cette doctrine de saint Thomas que le bonheur final auquel l’homme aspire « ne peut consister dans cette connaissance de Dieu que donne la foi. i Contra génies, 1. III, c. xi.. I.e bonheur comporte, dit-il, une parfaite opération de l’intelligence, une parfaite connaissance de Dieu ; or la foi ne peut la donner. In cognilione fidei invenitur operatio intelleclus imperfectissima. Ce qui fait surtout la valeur de la foi, ce n’est pas la perfection intellectuelle qu’elle donne, c’est son côté volontaire, méritoire : in cognilione fidei, principalilatem habet uolunlas, loe. cil. ; paroles qui, arrachées de leur contexte, ont été de nos jours souvent mal entendues, tout comme cette autre phrase, qui dérive du même ordre d’idées : Hic habilus (fidei) non movel per viam intellecius sed inagis pet viam voluntaiis : unde non façit videre illa quic crcduntur, nec cogil assi nsum (deux choses que fera la vision de Dieu), .serf facit voluntarie assentiri. In Boetium, de Trinitate,

qm. a. 1. ad i dans Opéra, Paris, 1875, t. xxviii,

I » . 508. Cette connaissance très Imparfaite de la foi nous lait paraître Dieu comme lointain et nous éloigne Intellectuellement de lui, même quand nous sommes pics de lui par l’amour et la volonté. S. Thomas, Cont. génies, lot. cil. C’esl la parole de saint Paul, comparant la foi et la vision intuitive de Dieu ; Tant que nous habitons dans ce corps, nous sommes loin du Seigneur : <"/ nous marchons par la foi. et non par la vue. i II Cor.. v. ;. 7. Remarquons ce car. Doue la foi. en conclut Capréolus, lait que l’homme soit loin de Dieu (intellec tuellement), qu’il tende a Dieu comme a un objet éloigni Defensiones I). Thomte, I. 1 1 1 Sent., dist. WXI, q. i. a..".. n. 1. Tours, 1904, I. v. p. 381. El Barth. Médina. O. I'. : Voyons dans ce texte quelles

dispositions met en nous la foi. Elle nous rend éloignes liés de la pallie céleste… Il a donc opposition absolue entre la vision béatifique et l’acte de foi.

silio m i " il', q. i.xvii. a..".. :  ; édit., Venise, I.V.im. p :  ; 17.

Corollaire. Explication théologiqut de lu cessation de l’acte ri de la vertu de jm mi ciel. Elle découle de ce qui nous venon (le ' oil car on ne peut en même i' nui. lie éloigné de Dieu (pai la foi) et lui être prisent (pai la vision intuitive), le tout sous le même rapport intellectuel ; on ne peut, mi même temps, être dans la

coud il ion de l'épn UVC et de l.i possibilité de pé< - J i i. I I

dan, l.i condition de la récompense et de l’impossibl llti de pécher. Il aurait contradiction. Durand,

UK.T. DI TIIHII.. CATHOL.

ajoute Capréolus, part d’une fausse théorie, c’est que l’acte de vision et l’acte de foi ne différent que comme le plus évident et le moins évident, qu’ils n’ont pas entre eux d’opposition contraire ou contradictoire. » Loc. cil. Sans doute, on doit lui accorder qu’une connaissance moins parfaite pourrait subsister avec une connaissance plus parfaite du même objet : mais la question n’est pas là. La foi divine, telle que Dieu nous l’a donnée, n’est pas seulement imparfaite au sens d’une moindre évidence ; elle implique essentiellement une absence de vision concomitante de l’objet divin : elle n’est donc pas compatible avec la présence de la vision, et de Dieu par la vision. La vertu infuse de foi, adaptée aux conditions de cette vie d'épreuve, tend ainsi que son acte à l'énoncé du mystère essentiellement obscur, comme à un objet principal qui la spécitie : quand disparaîtra l’obscurité du mystère sans possibilité de retour à cause de la stabilité éternelle de la vision béatifique, alors cette vertu infuse, perdant pour jamais ce qui la spécifie, deviendra sans objet, sans but, et ne pourra subsister. Voir S. Thomas, Sum. theol., Ia-IIæ , q. lxvii, a. 5, ad 3° ni. Elle sera remplacée par une autre espèce de connaissance surnaturelle de Dieu, laquelle ne procédant pas par énoncé appuyé sur le témoignage divin, mais par intuition directe de la chose en soi, aura une manière essentiellement différente d’atteindre la même chose, et ne souffrira aucune obscurité. Nous ne pouvons donc admettre cette idée de Gratry : « Il y aura encore foi dans la vision : comme, dans la vue de ce monde par nos yeux, il y a une foi ; comme, dans l'évidence des premiers principes, il y a une foi ; et cela parce que nous ne voyons le tout de rien, » etc. De la connaissance de Dieu, part. 11, c. iii, 2 a édit.. Paris, 1854, t. ii, p. 266. Gratry allègue pour sa thèse l’article de saint Thomas que nous venons île citer ; il y découpe ces mots ; laides pariim lollitur, sciUni quantum ml senigma, et pariim manet, scilicel quantum ml substanliamcognitionis. Mais ces paroles sont mises par saint Thomas dans la bouche de gens qu’il critique : Quidam dixerunt quod… fides pariim lollitur, etc. Et le saint docteur ne concède ce manet quoad substantiam qu'à la condition d’entendre subsiantia d’un élément seulement générique et abstrait, d’une simple classification qui réunit la foi et la vision sous la même étiquette générale de i connaissance » : fides enim cum visione patries convenit in génère, quod esteognilio. Mais rien de ce qui est spécifique ou indii’iduei dans la foi ne peut rester, d’après lui : Nihil idem numéro net specie, quod est in fuie, ranimer in pulriu, sedsolum idem génère. Ceci ne favorise donc en lien la lli : se de (.rati qui voudrait faire continuer dans la vision du ciel une imperfection qui appartient spécifiquement a la foi et a la vie présente, une sorte d’obsCU rilé. Pour cela, il recourt aussi a ce que « nous ne pourrons voir ni Dieu, ni le monde, ni les principes de la raison, autant que 1 Heu les voil. Inc. cil. ; à ce quc notre vision Intuitive, d’après la théologie, restera essentiellement inférieure a la vision compréhensive quc Dieu

a de lui-même. Tout cela est vrai : mais la manière dont l'Écriture et les Pères, connue nous l’avons mi. Opposent la foi a la ision du ciel, ne nous autorise pas

a mettre en celle et une obscurité véritable. L’obscurité proprement dit<. telle qu’elle est dans la loi. n’est pas seulement un degré inléiieiii de ision. comme se l’est imaginé Durand de Saint l’ouiçain : c’esl une

privation absolue de vision, credere quod non vides. Or,

la ision des saints dans la pal lie n’a i ieu de cet le |>i i viliou. On ne peut donc l’appelei obSCUTe ni la

rapproche ! de la toi ni mettre en « lie un peu de fol sous prétexte qu’il exl te en Dieu une vision beaucoup

plus pal faile.

X" Conlroversi célèbrt peut-on avoii simultanément tur un même objet la /m et la sciena (ou la vision)

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