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pas l'évidence de la chose, Mastrius et Frassen soutenir qu’elle ne rend pas évident « l’objet même de la foi » du moins < d’une évidence intrinsèque ; » que o l'évidence extrinsèque laisse subsister l’obscurité de l’inévidence de la chose révélée, ce qui suffit à la foi ; » que « la science, au contraire, demande une évidence intrinsèque. » Voir col. 402. — c) Docteurs de Sorbonne. — Grandin, loc. cit., p. 38. Duplessis d’Argentré résume ainsi toute la théorie : Cum omnis evidentia sit clara cl perspicua cognilio rei, vel in seipsa proxime, vel in alio quod ipsi ex principiis inlrinsecis et essentialibus annexum sit, sive lanquam causa, sive tanquam efjcctus ; fides uulem non sit cognilio rei in seipsa proxime, neque in ullo alio ex principiis inlrinsecis et essenlialibus illi annexo, sed in solo dicenlis teslimonio, rei ipsi omnino exlrinseco, consequens igiiur est omnem fldei assensum, quacumque cerliludine plénum, obscuritatem aliquam involverc. Porro evidentia consecutionis, quæ nonnunquam reperitur leslimonium inter et verilalem ici tali teslimonio confirmais, confundenda non est rum ipsa euidenlia rei, cui fides adhibetur. Sœpius enim res cui (quæ) creditur non cognoscitur evidenter in seipsa, licel connexio sil evidens inter ejus veritatem et leslimonium quo nilitur. Elementa theologica, etc., c. xvi, Paris, 1702, p. 316, 317. — d) Théologiens de la Compagnie de Jésus. — Le cardinal Tolet dit que « la vérité d’une chose peut être connue de deux manières : en elle-même… ou bien dans un intermédiaire qui lui est étranger, comme lorsque nous connaissons par le témoignage, même évident et évidemment veridique, qu’il est vrai que Naples existe… Je n’ai pas alors l'évidence de la chose en elle-même, parce que je n’ai pas vu Naples… C’est l'évidence de la vérité de la chose (ou de l'énoncé qui exprime cette vérité) plutôt que l'évidence de la chose elle-même. » In Summam S. Thomse, Rome, 1869, t. i, q. i, a. 2, p. 22. Louis de Torrez dit de l'évidence extrinsèque : « L’opinion la plus commune est que ce n’est pas l'évidence au sens propre, aussi l’appelle-t-on evidentia in attestante (non pas evidentia tout court). C’est l’enseignement de Cajétan, d’Aragon, de Vasquez et de beaucoup de doctes théologiens de notre temps… Quand nous prouvons que Dieu s’est fait homme parce que Dieu l’a révélé, ce témoignage n’explique pas une connexion particulière, ex natura rei, entre les termes de la conclusion, c’est-à-dire entre Dieu et l’homme. Le témoignage de Dieu est commun à toute vérité que Dieu révèle… Le témoignage n’est pas un effet particulier et propre, manifestant la connexion entre les termes, » etc. Torrez, Disput. in Il am II*, disp. IX, dub. ni, Lyon, 1617, col. 145, 146. Coninck, bien qu’il préfère regarder l’evidenlia in attestante comme une véritable évidence (question secondaire de définition de mots et de terminologie), s’accorde avec les précédents pour le fond de la question : « Il est très différent de dire : Cette chose, la Trinité, m’est évidente en elle-même — ou bien de dire : Il m’est évident que cette proposition (ou énoncé). Dieu est un en trois personnes, est vraie… Dans la première assertion, on veut dire que la nature du sujet et de l’attribut, ou du moins la nature et la qualité de leur connexion, me sont clairement connues ; que je sais clairement comment l’attribut convient au sujet, et quelle connexion il y a entre eux. Dans la seconde, on veut dire que je connais clairement qu’il y a connexion « parle rei : ce qui peut être vrai, quand bien même j’ignore quelle est cette connexion ; et ainsi la seconde assertion peut être vraie, quoique la première soit fausse… Il est donc assez certain que l'évidence du témoignage ne fait pas que la chose en elle-même me soit évidente. » De… aci. supernatural., disp. IX, n. 108, Anvers, 1623, p. 181. « Le témoignage de Dieu sur la Trinité, dit Thyrse Gonzalez, ne la suppose pas comme un’effet

suppose la perfection de sa cause, dont il participe et qu’il développe ; ce témoignage ne la contient pas non plus comme une cause son effet ; c’est un intermédiaire tout à fait extrinsèque. Il s’ensuit que, même connu avec évidence, ce témoignage ne peut découvrir la convenance de l’attribut avec le sujet : mais cette convenance demeure cachée comme sous un voile, et par suite l’objet demeure obscur et proportionné à la loi. Le témoignage de Dieu est donc extrinsèque à la chose non seulementontologiquement, in essendo, mais encore logiquement, ('/ ! cognoscendo ; tandis que l’effet propre d’une chose ne lui est pas extrinsèque de cette seconde manière, comme l’explique le P. Amicus. » Manuductio ad conversionem maliumelanorum, part. I, I. II, n. 81, Dillingen, 1689, p. 89. Amicus, en effet, a bien défendu le système contre plusieurs objections. Cursus theologicus, De fide, disp. II, n. 150, Anvers, 1650, p. 33. Élizalde donne cet exemple typique : « Il nous est évident que les démonstrations d’Euclide sont bonnes… Le monde entier, depuis tant de siècles, atteste la vérité de leurs conclusions… Qui les dirait fausses serait, je crois, aussi fou que s’il niait l’existence des Cicéron et des Pompée… Avons-nous pour cela, nous autres ignorants en mathématiques, l'évidence de ces choses ? Les savons-nous, les comprenons-nous ? Heureux êtes-vous, si en un jour, par cette simple réflexion sur le grand témoignage rendu à Euclide, vous acquérez l’intelligence de ces choses et la qualité de parfait mathématicien ! Pour moi, je ne me crois pas devenu un savant à si bon marché. L'évidence incontestable de la vérité d’un énoncé n’engendre donc pas l'évidence de la chose : la chose ne doit pas être confondue avec l'énoncé, res cum diclo. » Forma veræ rcligionis, etc., n. 341, Naples, 1662, p. 232. Enfin, parmi les auteurs récents, voir Pesch, Prœlecliones, 3e édit., 1910, t. viii, n. 396, p. 182. Critique du système. — a) Il montre dans la foi un élément d’obscurité qui ne se trouve point dans la science, et qui, résultant du procédé même de la foi, par opposition à celui de la science, sera justement appelé spécifique et essentiel. — b) La distinction fondamentale qu’il pose entre la foi et la science résiste bien à toutes les attaques. Celles qui viennent des anciens théologiens trouvent leur réponse dans ce que nous venons de dire et de citer. Pour ce qui est des philosophes modernes, Kant a rangé parmi les « choses de fait » , qui sont d’après lui objet de « science » et non de foi, « les choses et les qualités des choses que nous pouvons connaître ou par notre expérience personnelle, ou par l’expérience d’un autre qui nous les atteste. » Critique du jugement, § 91, n. 2, dans Opéra ad crilicam perlinenlia, trad. lat. de Gottlob Boni. Leipzig, 1797, t. iii, p. 497. Il voulait donc réduire la connaissance par témoignage, l’histoire, etc., à l’expérience et conséquemment à la science, sous prétexte qu’un autre a eu l’expérience de la chose à notre place, et nous en fait bénéficier par son témoignage. OlléLaprune a fait justice de cette idée de Kant. « Sans doute, dit-il, ce que j’affirme parce que vous nie l’attestez, vous pouvez l’avoir vii, et il faut que la chose connue maintenant par le témoignage ait été pour le témoin primitif objet d’expérience… Mais qu’importe ? moi, qui n’ai point vu cette chose, je ne l’affirme que parce que vous me l’attestez : pour moi donc, elle est objet de foi. » La certitude morale, 2e édit., 1892, p. 159. La vision d’un autre ne me donne à moi ni vision ni science ; saint Thomas l’avait déjà remarqué : Fides cognilio quædam est, in quantum intelleclus detcrminatur per fidem ad aliquod cognoscibile. Sed hsec delerminalio ad unum non procedit ex visione credentis, sed a visione ejus cui creditur (du témoin à qui l’on croit). Et sic in quantum deesl visio, deficit(fides) a ralione cognilionis quæ est in scientia. Sum. theol.,