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FOI


pas demeurer et exercer une influence virtuelle sur tous les actes de foi, sans être aussi souvent renouvelée par un acte réfléchi, distinct et pleinement conscient ? Si ce renouvellement en règle était nécessaire, l'Église devrait en avertir les fidèles, qui n’y pensent pas, et, infaillible gardienne de la foi et de la morale, elle ne manquerait pas de le faire : or elle ne le fait pas. Du reste il y a, comme préludes nécessaires de l’acte de foi, d’autres actes qui n’ont pas besoin, eux non plus, d'être ainsi renouvelés. Telle la preuve apologétique du fait de la révélation ; nous savons confusément qu’elle existe, que nous l’avons vue, mais nous ne la repassons pas dans notre esprit à chaque nouvel acte de foi. Il en sera de même de cette résolution, qui prélude à l’acte de foi du côté de la volonté. Et en généra], tout acte de vertu que l’on ne fait pas pour la première fois, qui est passé plus ou moins en habitude, peut être beaucoup plus rapide, confus et implicite, parce qu’il s’appuie sur des actes précédents de la même vertu, faits plus distinctement, et trouve en eux son point de départ, son explication et sa justification. Enfin il faut se rappeler que les fidèles renouvellent assez souvent, sous une forme ou sous une autre, la résolution dont nous parlons, par exemple, dans les actes de « foi implicite » , lesquels expriment directement et avant tout cette résolution même. Voir col. 384. — b) La manière qu’avec de grands théologiens nous avons donnée d’entendre dans la foi le super omnia nous débarrasse de questions oiseuses introduites par quelques auteurs qui ou bien ne l’avaient pas comprise ou bien l’avaient oubliée : par exemple, disent-ils, devons-nous préférer les vérités de foi, données par le témoignage divin, aux préambules mêmes de la foi, donnés par la raison humaine ? — Si l’on a compris que le super omnia équivaut à super omnia contraria, la question tombe d’elle-même : car jamais les préambules de la foi, vérités certaines et présupposées à la foi, ne seront contraires à la foi ni à la révélation.

IV. CERTITUDE PARTICULIÈRE DE I.A FUI. 1 ° Éléments caractéristiques de la certitude de foi. — Partant de ce principe que la certitude en général a deux éléments, l’infaillibilité et la fermeté, voir col. 206, 207, nous avons déjà montré séparément ce que la foi possède par rapport à chacun de ces éléments. Il est temps d’en faire le résumé et la synthèse.

1. Infaillibilité particulière de la foi.

Nous avons vu que l’assentiment de foi divine doit être surnaturel, voir col. 362 sq., et procède de la vertu infuse de foi, quand elle existe déjà dans le sujet, voir col. 368 sq. ; que cette vertu a une infaillibilité propre, qui ne lui manque jamais quand elle entre en acte. Voir col. 369 sq. Voilà donc la « certitude de foi » caractérisée par une infaillibilité spéciale, à laquelle le concile de Trente fait allusion dans ces mots : certiludine fidei, cui non potest subesse falsum, sess. VI, c. ix, Denzinger, n. 802. — Objection. — Dans notre acte, une telle infaillibilité nous est invisible, comme est invisible la surnaturalité d’où elle découle. Voir col. 371 sq. Restant inaperçue, elle ne peut servir à la certitude de notre acte. — Réponse. — Elle ne peut servir à augmenter la fermeté d’adhésion, soit ; mais elle n’en est pas moins, par elle-même, un élément de la certitude. Invisible pour nous, cette infaillibilité venant du surnaturel n’en est pas moins, aux yeux de Dieu qui voit toute la réalité, une perfection de notre acte même, et une perfection qui l'éloigné du faux et le rattache au vrai, par suite, une perfection appartenant à la certitude de cet acte. Dans un acte qui vaut surtout aux yeux de Dieu, comme la foi divine, il faut lenir compte d’une perfection que Dieu voit, quand même la faiblesse de notre vue nous empêche de la voir. De plus, vouloir que les éléments de la certitude

tombent tous et nécessairement sous la réflexion psychologique, c’est faire de cette réflexion parfaite un élément essentiel de la certitude, ce qui est faux. Sans doute, une certitude parfaitement réfléchie et contrôlée a de ce chef une perfection accidentelle plus grande. Mais la réflexion parfaite n’est pas un élément essentiel de la certitude. Autrement, ce qu’on appelle la « certitude directe » ne serait pas vraiment certain. Il faudrait refuser cette qualité, par exemple, à la foi des enfants et des simples, qui ont tant de peine à réfléchir sur leurs actes, ou les obliger à des réflexions qu’ils ne peuvent faire. Il faudrait refuser le nom de certitude proprement dite à des actes dont tout le monde reconnaît la perfection en ce genre. Par exemple, dit Lugo, « un saint du ciel, qui voit Dieu, a l’acte de tous le plus certain, et cela sans réflexion sur l’infaillibilité de son acte. » Tout à son objet, il ne s’amuse pas à de pareilles réflexions. « Quand nous voyons la lumière, ajoute-t-il, nous sommes certains de son existence sans aucune réflexion sur notre assentiment. » Disput., Paris, 1891, t. i, disp. VI, n. 5, 20. Lugo réfute ici Coninck, qui exige comme élément essentiel de la certitude la réflexion sur l’infaillibilité de son acte. De moraliiate… actuum supernaturalium… et de fide, spe ac caritaie, Anvers, 1623, disp. XIV, n. 45, p. 247. Ce n’est pas Lugo seul qui rejette cette exigence arbitraire ; un peu plus tard, Borrull dit que « cette opinion du P. Coninck déplaît généralement, et à bon droit. » Tract, de essenlia et allributis Dei, Lyon, 1664, disp. I, n. 65, p. 33. Répondant à une objection semblable à celle que nous avons citée plus haut, les Salmanticenses disent : « Il n’est pas besoin d’un acte distinct, par lequel on réfléchisse sur son assentiment, quoique cela aussi puisse avoir heu… Tout ce que prouve cette objection, c’est que la certitude de l’assentiment de foi ne nous apparaît pas complètement ; mais elle ne prouve pas que cette certitude (en ce qu’elle a de caché) ne soit pas une propriété de cet assentiment, en tant que dans la réalité il procède de la vertu de foi. » Cursus theologicus, Paris, 1879, t. xi, De fide, disp. II, n. 109, p. 155.

2. Fermeté particulière de la foi.

Nous savons déjà que l’assentiment de foi est ferme. Voir col. 88 sq. Mais en cela, la foi n’a rien de particulier : la science a aussi des adhésions fermes. Ce que la foi, en ce genre, peut ajouter de spécial, d’original, c’est cette résolution de persévérance et de préférence, requise d’après les documents de la révélation et de l'Église. Voir col. 383 sq. Cette résolution, nous venons de le voir, est pour la foi un élément volontaire qui contribue essentiellement à son caractère de vertu théologale, en donnant à son acte ce que les théologiens appellent le super omnia, la souveraine appréciation de son objet. Cette résolution fortifie évidemment la volonté, et lui donne plus de fermeté contre les défaillances possibles. Mais la « fermeté » de la foi n’est pas seulement dans la volonté, elle doit être aussi dans l’assentiment intellectuel, nous l’avons vu. Peut-on montrer que la résolution dont il s’agit donne de la fermeté à cet assentiment lui-même ? Oui : mais pour le montrer, il faut distinguer d’abord, dans la fermeté d’un assentiment intellectuel quelconque, deux éléments que nous n’avons pas eu l’occasion de distinguer encore. — a) Élément négatif : absence de doute. C’est l'élément que nous nous sommes contentés de considérer, quand il s’agissait vaguement et en général de la fermeté d’adhésion : l’exclusion du doute suffisait à la faire reconnaître. Voir col. 88, 206. Nous n’avions pas alors à distinguer des degrés positifs dans la fermeté d’adhésion. Maintenant nous devons compléter la théorie de cette fermeté. — b) Élément positif. — La simple absence de doute, élément purement négatif, ne suffit pas : autrement une pierre, qui ne doute pas,